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Méthode Islamique pour la Méditation (Muraqaba)

 

 

 

 

Le terme Muraqaba (مُراقَبة), généralement traduit par méditation, signifie en vérité « vigilance». L’un des noms d’Allâh – subhanahu wa ta’ala – est Ar-Raqîb : Celui Qui sait toute chose et rien n’échappe à Sa science. De notre côté, nous aspirons également devenir raqîb, c’est-à-dire un de ceux qui veillent à préserver en eux la présence d’Allâh, et ceci peut s’acquérir par la méditation.

La méditation a pour but de construire consciemment en soi la présence d’Allâh, c’est-à-dire d’établir une connexion entre soi et Allâh, entre notre cœur et Allâh. La Muraqaba aide ainsi à se rappeler de manière constante qu’Allâh nous voit, qu’Il nous entend et qu’Il est avec nous, en permanence. Ceci conformément au Hadith qui évoque la notion d’Ihsân dans lequel le Prophète Muhammad ﷺ a déclaré : « Al-Ihsân consiste à adorer Allâh comme si tu Le voyais car même si tu ne Le vois pas, Lui te voit. » [1] Une fois que le croyant possède cette conscience de la présence d’Allâh, cela se répercute de manière positive et productive dans sa vie quotidienne et c’est un bienfait immense dans son cheminement vers Son Créateur.

Parmi les effets, nous pouvons citer :

– La reconnaissance des droits d’Allâh (et donc l’accomplissement consciencieux des devoirs religieux et la recherche de la perfection dans cette pratique, comme une meilleure concentration et recueillement (Khushu) dans la Prière…),
– La reconnaissance des droits du Messager d’Allâh ﷺ (et donc l’augmentation du respect qui lui est dû…),
– La reconnaissance des droits des créatures d’Allâh (et donc l’augmentation du respect à leur encontre ainsi que l’arrêt des nuisances et des injustices que nous sommes susceptibles de leur causer. Cela s’applique et profite aux parents, aux conjoints, aux enfants, à la famille, aux savants, aux voisins, aux collègues, à l’ensemble des Musulmans, aux non-Musulmans, aux nécessiteux, au monde animal comme au règne végétal et même aux choses inanimées comme ce qui fait partie de notre environnement…), etc.

Le Dhikr et les Dou’as sont aussi des formes de méditation. Ces pratiques représentent le cœur de l’adoration, son âme, car cela permet de développer notre connexion avec Allâh.

 

Comment procéder :

La méditation est une activité qui demande du calme, de la sérénité et de la concentration. Préférez les moments où vous pouvez vous isoler et ne pas être dérangé. Si possible se placer dans la pénombre. Le temps de Tahajjud est le meilleur moment pour faire cet exercice, mais il peut aussi être réalisé à n’importe quel autre moment. Chacun pourra évaluer la durée qui lui convient, l’important étant la régularité. Une pratique quotidienne de 10/15 mn constitue une bonne habitude.

Avant de commencer, il faut bien se remémorer qu’Allâh nous voit, qu’Allâh nous entend et qu’Allâh est avec nous, en ce moment même et de manière constante. Cette pensée ne doit pas quitter notre esprit (y compris en dehors de la méditation et cette dernière permet justement de développer cette proximité).

Fixez le nom d’Allâh durant 1 ou 2 minutes (celui de l’image en haut de l’article par ex.), puis fermez les yeux.

Le fait de regarder le nom « Allâh » aide à se rappeler avec qui nous devons maintenant entrer en communication. Voir ou ne pas voir le nom une fois les yeux clos n’est pas important, il est simplement question de garder l’esprit concentré sur la présence d’Allâh, fin de ne pas laisser son esprit se disperser. Notez que la disparition progressive du nom est normale, l’emprunte du nom s’estompera petit à petit et ce n’est pas grave car la visualisation du nom aide à se concentrer, à se focaliser sur la présence d’Allâh, mais elle n’est pas une condition de réussite de la Muraqaba. Une fois le nom disparu, il faut garder à l’esprit cette connexion établie.

1/ Penser à chaque bénédiction qu’Allâh nous a accordée, à commencer par notre propre existence. Allâh a pensé à moi, Il m’a créé et m’a donné l’opportunité d’être avec Lui pour toujours, de parler avec Lui, de Le voir, etc. Au milieu de beaucoup d’autres créatures, Allâh a choisi de me créer. Quelle immense preuve d’Amour. Je me dois d’être reconnaissant envers Lui.

Pensez aux bienfaits qu’Allâh nous a donnés, à ce qui nous entoure, toutes les choses magnifiques crées par Allâh, les dons qu’Il nous a octroyés, le plus grand d’entre eux étant le Prophète Muhammad ﷺ, puis de nous avoir gratifié de la Foi (être devenu Musulman), la santé, les parents, l’entourage, la famille, les enfants, avoir appris le Deen, avoir rencontré des Shuyukhs … pensez à tout cela puis remerciez Allâh (think and thank).

2/ Pensez maintenant à ce que vous avez fait. Votre désobéissance, votre paresse, le temps pendant lequel vous avez délaissé Allâh, désobéi, tous les péchés commis, en secret, en public, les mauvaises pensées… et demandez pardon à Allâh pour chacun d’entre eux et demandez-lui d’effacer ces péchés.

3/ Demandez de l’aide à Allâh afin qu’Il vous aide, vous protège et vous sorte des péchés et de votre insouciance. Pensez à vos besoins religieux et demandez de l’aide pour chacun d’entre eux.

4/ Demandez à Allâh de vous guider, de vous aider à prendre les bonnes décisions dans le domaine religieux et dans le domaine de la vie d’ici-bas également. Demandez que cette aide soit continue jusqu’à votre mort, de mourir avec la Foi et avec Son plein Agrément.

A effectuer chaque jour inshaa Allâh.

Sachez que plus nous restons en présence d’Allâh par la pratique de Dhikr, de la Muraqaba, des dou’as, etc. et plus nous devenons des êtres spirituels, développant les bonnes manières Prophétiques, augmentant notre bon comportement, notre douceur, notre gentillesse, etc.  A contrario, plus nous restons en état d’insouciance (ghafla) et plus nous développons une nature Sheytanique.

Sheykh Abd al-Qadir al-Jilaniyy رضي الله عنه a dit (sens) : « Si une simple mouche est présente à l’endroit où vous êtes, dans la même pièce que vous, elle devrait se sentir à l’aise, à l’abri de tout mal de votre part ».

Si notre état devient celui-ci concernant les plus petites et les plus faibles créatures, imaginez quel pourra être notre excellence dans le comportement vis-à-vis du reste de la création et des humains en particulier.

Qu’Allâh nous permette d’atteindre les plus hauts degrés de piété, de marifah et de quitter ce bas-monde avec la Foi et avec Son plein Agrément.

 

Notes :

[1] Sahîh d’Al-Bukhârî, hadith n°48

A ce propos, on peut également se rappeler les deux versets suivants :

« Si Mes serviteurs t’interrogent à Mon sujet [Ô Muhammad], qu’ils sachent que Je suis tout près d’eux, toujours disposé à exaucer les vœux de celui qui M’invoque. Qu’ils répondent donc à Mon appel et qu’ils aient foi en Moi, afin qu’ils soient guidés vers la Voie du salut. » [Coran 2 : 186].

« Nous avons créé l’homme et Nous connaissons les plus intimes secrets de son âme, car Nous sommes plus près de lui que sa veine jugulaire. » [Coran 50 : 16].

L’effet des Awliyas (Les Amis d’Allâh)

 

 

Awliyas

 

 

Alors qu’il se promenait en ville, le grand Imam et Mutasawwif Abûl Qasim al-Junayd al-Baghdadiyy (radhia Allâhu ‘anhu) passa à proximité de l’endroit où se déroulaient les peines publiques (hadoud). Les gens étaient rassemblés et il y avait là un homme dont on allait couper la main et le pied. Il s’arrêta et demanda pourquoi cet homme allait ainsi être puni. Les gens lui répondirent qu’il s’agissait d’un bandit multirécidiviste. Il avait déjà été attrapé à plusieurs reprises et à chaque fois le Juge (Qadi) lui avait pardonné, mais cette fois-ci, face à ses nombreuses récidives, le juge avait décidé de le punir.

En dépit du fait que sa main et son pied furent coupés, le bandit continua ses activités malhonnêtes et demeura un leader du banditisme. Jusqu’au jour où, commettant un délit de cambriolage, il tua plusieurs habitants de la maison dans laquelle il était en train de voler. Cette fois-ci, suite à ces meurtres, le Juge ordonna qu’il soit exécuté.

Alors que la sentence allait être accomplie, l’Imam Junayd saisit le pied du bandit (celui qui restait) et l’embrassa. Tous les gens présents furent surpris et choqués, car l’Imam était connu comme étant un grand savant et comme faisant partie des personnes les plus pieuses de tous les temps, alors que l’autre n’était qu’un criminel. Ils pensèrent que l’Imam embrassait le pied d’un criminel. Tout le monde se demanda ce qui était en train de se passer. Un des Murids (disciples) présents demanda à l’Imam s’il pouvait donner une nassiha (conseil) afin de retirer toute confusion dans l’esprit des gens et qu’ils ne pensent pas du mal d’un des Awliya d’Allâh.

L’Imam Junayd al-Baghdadiyy répondit : « Ce n’est pas son pied que j’ai embrassé. Cet homme est un multirécidiviste et malgré les punitions infligées, il est resté déterminé. Il possède cette qualité nommée Istiqama (constance). J’aimerai que Junayd soit aussi ferme dans le suivi de la Sunnah de Saydinna Rassoul Allâh (salallâhou ‘alayhi wassalam), de sorte que même si ma main allait être coupée je continuerai tout de même la Sunnah, mais je n’ai pas ce courage et il est probable que je chercherai à sauver ma main. Lui sa main et son pied ont été coupés. J’aimerai être aussi constant dans le suivi des Lois d’Allâh et ce, même si je devais perdre une main et un pied. C’est cette qualité d’Istiqama que j’ai embrassé. »

Bien que ce bandit allait être exécuté dans les prochaines minutes, lorsqu’il entendit cela, quelque chose de profond se produisit en lui. Il dit alors : « Assurément, j’ai perdu mon temps tandis que j’avais en moi cette qualité ».

Juste après avoir écouté les paroles de l’Imam Junayd, le bandit se repentit. L’Imam Junayd demanda quelques minutes au bourreau et il transmit au bandit un Dhikr, une nassiha de Tawbah (repentance) et lui demanda de faire istighfar (demander pardon à Allâh). Puis, il s’en alla.

Alors que ce bandit, dans les dernières minutes de sa vie, se dirigeait probablement vers l’enfer, le simple passage d’un Wali lui fut profitable. Et ce n’est pas de Science dont il bénéficia, mais bien de la présence du Wali.

Ainsi, ne sous estimez jamais les bienfaits des Awliyas d’Allâh, cherchez leur compagnie et ne pensez pas du mal des gens, vous ne savez pas comment ils finiront.

Qu’Allâh nous compte parmi ces pieux serviteurs repentis et qu’Il nous fasse bénéficier des Ses Awliyyas.

 


La musique spirituelle à base d’instruments?


Réponse par  Sheykh Faraz Rabbani

musiquesoufi

 

Question :

À vrai dire, j’ai arrêté d’écouter de la musique, mais j’ai ensuite recommencé à en écouter, en partie en raison de certains Cd spirituels islamiques qui contiennent des instruments de musique comme des violons et différents types de percussions.

 

Réponse :

Walaikum assalam wa Rahmatullâh,

Siddi, je ne sais pas sur quelle argumentation se basait le CD. Allâh est plus savant. Il y a divergence d’opinion sur cette question, mais la position transmise par le Mufti Muhammad ibn Adam al-Kawthari est exactement la même que celle mentionnée dans les travaux de référence à travers les écoles Sunnites de fiqh, et tenue par les savants Sunnites les plus traditionnels, actuellement comme dans le passé. [1]

Quelques savants avaient, en effet, permis les instruments s’ils n’étaient pas utilisés dans des visées futiles, incluant en cela l’utilisation d’instruments par quelques soufis et d’autres, dans le but d’une élévation spirituelle, tant que cela ne comportait pas d’autres choses illicites (comme des chants interdits, des femmes qui chantent pour autre que des femmes, la libre-mixité lors de telles réunions, etc.)

Cela reste toutefois un avis minoritaire, et les précautions religieuses indiqueraient de s’en abstenir, pour les nombreuses raisons expliquées par le Mufti Muhammad ibn Adam dans sa réponse.

En même temps, Ibn Abidin explique dans son Radd al-Muhtar [2], qu’il ne faut pas condamner ceux (comme les Soufis vertueux), qui ont de nobles intentions dans leur écoute de ce genre de chants et sont loin d’entretenir des objectifs futiles, tant que rien d’autre d’illicite n’est joint à l’écoute.

Ainsi, la prudence religieuse et le suivi de l’avis juridique le plus solide (et le sens manifeste de l’interdiction du Qour’an et de la Sunnah) indiquerait d’éviter scrupuleusement la musique et le chant contenant des instruments autres que le duff [3].

Toutefois, il ne faudrait pas condamner autrui à propos de cela, en raison de la différence d’opinion concernant ce sujet.


Et Allâh est plus savant.

Wassalam,

Faraz Rabbani


© Traduit avec l’autorisation de l’honorable sheykh Faraz Rabbani (qu’Allâh le récompense)

 

Notes du traducteur :

[1] Voir l’ouvrage « Reliance of the Traveller » de Mufti Muhammad ibn Adam al-Kawthari.

[2] Ibn Abidin dans Radd al-Muhtar, 6.349, Ilmiyya ed.

[3] Dans un de ces articles, Sheykh Nuh Ha Mim Keller explique que l’interdiction de la musique instrumentale est également la position retenue de toutes les quatre écoles de jurisprudence sunnite, l’école Hanafite (Ibn ‘Abidin, Radd al-muhtar ‘ala al-durr al-mukhtar. 5 vols. Bulaq 1272/1855. Réimpression. Beyrouth: Dar Ihya’ al-Turath al-‘Arabi, 1407/1987, 5.253), l’école Malékite (al-Dardir, al-Sharh al-saghir ‘ala Aqrab al-masalik ila madhhab al-Imam Malik. 4 vols. Le Caire: Dar al-Ma‘arif, 1394/1974, 2.502), l’école Shaféite (al-Nawawi, Minhaj al-talibin, 152), et l’école Hanbalite (al-Bahuti, Kashshaf al-qina‘ ‘an matn al-Iqna‘. 6 vols. Beyrouth: Dar al-Fikr, 1402/1982, 5.170). Les lecteurs qui connaissent la littérature du fiqh remarqueront que chacun de ces ouvrages est la référence pour la fatwa dans son école.

Attachement de grands soufis à la Sounah [1]

 

Par l’imam Djalâl ad-Dîn As-Suyûtî

 

 

soufi

 

 

Dhû-n-Nûn (m.246H) a dit : « Parmi les caractéristiques de celui qui aime Dieu, le fait de suivre Son bien-aimé (salallahou ‘alayhi wassalaam) dans sa moralité, ses actes, ses ordres et sa Sounah. »Abû Sulaymân Al-Dârâni (140-215H) a dit : « Il arrive que des traits d’esprit dits par des sages m’enchantent pendant des jours; cependant je ne retiens d’eux que ce qui est conforme à la déclaration de deux témoins sûrs : le Coran et la Sounah. »

Al Haddâd a dit : « Celui qui ne mesure pas constamment ses actions et ses états d’âmes en fonction du Coran et de la Sounah et ne se remet jamais en cause alors ne le considérez pas dans le registre des grands hommes. »

Djunayd (m. 298H) a dit : « Le chemin qui mène à Dieu est barré excepté pour ceux qui daignent suivre les pas du prophète et le prennent pour modèle. Dieu a dit : «  En effet, vous avez dans le Messager d’Allah un excellent modèle à suivre. « [2] »

Il a dit aussi : « Celui qui n’apprend pas le Coran et ne transcrit pas les hadiths n’est nullement un modèle à suivre dans notre système ! Car notre doctrine est fondée sur le Coran et la Sounah ! »

Abû ‘Uthman AI-rî (230-298H) a dit : « Celui qui se soumet entièrement à la Sounah dans ses propos et ses actes, lorsqu’il parle, il parle avec sagesse. Et celui qui suit sa passion, lorsqu’il parle, il soutient l’innovation. Dieu a dit :  » Si vous lui obéissez vous serez guidés. « [3] »

Et lorsque ce demier était sur son lit de mort, son fils Abû Bakr se mit à déchirer ses vêtements ! Abû ‘Uthmân a alors ouvert les yeux et lui dit : « Cela est contraire à la Sounah dans son aspect apparent et est une marque d’hypocrisie dans son sens profond! »

Abû Al-Fawâris Al-Karamânî a dit : « Celui qui baisse son regard à la vue des femmes et contient ses  désirs, qui emplit son coeur de la conviction que Dieu l’observe continuellementet s’attache dans ses faits et gestes à la Sounah et qui s’exerce à ne manger que ce qui est licite, ses intuitions ne le trompent jamais. »

Al Tamastânî a dit : « La voie est distincte ! Le Coran et la Sounah sont parmi nous et le mérite des compagnons est manifeste. Celui donc qui prend pour guide le Coran et la Sounah, fuit ses désirs et la compagnie des hommes pour s’abandonner à l’adoration de Dieu est un homme véridique qui a atteint l’objectif. »

Nasr Âbâdî a dit : « Les fondements du soufisme sont : l’attachement au Coran et à la Sounah, le refus des passions et des innovations, la vénération des maîtres [4], admettre les excuses des gens, persévérer dans l’évocation de Dieu et éviter de commettre des choses équivoques au nom de la tolérance et de l’interprétation. »

Abû Hafs a dit : « La meilleure façon de nous rapprocher du Seigneur est de ressentir continuellement notre pauvreté et notre besoin de Lui dans tous nos états et de nous attacher à la Sounah dans tous nos actes et de rechercher notre nourriture d’une façon licite. »

Abû Nu’aym rapporte selon Sahl Ibn ‘Abdillâh : « Nos fondements sont six choses: « S’attacher au Livre de Dieu, prendre pour modèle la Sounah de Son prophète, manger ce qui est licite, ne pas causer de tort aux gens, éviter les péchés et remettre aux gens leurs droits. »

 

Notes :

[1] Sélection, à partit de la « Risâla » de Qushayrî, de certains propos de grands soufis qui attestent de leur attachement à la Sunna du prophète.
[2] Coran, 33 ; 21
[3] Coran, 24 ; 54
[4] Definition du mot « vénération » :  Profond respect à l’égard d’une personne