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La Méthode Prophétique pour l’Invocation (dou’a)

 

 

 

 

BismiLlâhi ar-Rahmani ar-Rahim,

Ce qui va suivre constitue d’après nos shuyukhs l’une des dix choses les plus importantes qu’une personne puisse apprendre dans sa vie :  La méthodologie correcte pour invoquer Allâh. C’est pourquoi nous invitons chacun à bien lire l’article et à retenir les points importants inshaa Allâh.

Lorsque l’on interroge les Musulmans sur la manière dont ils invoquent Allâh – subhanahu wa ta’ala -, on se rend compte que la très grande majorité ne sait pas comment effectuer correctement une invocation. C’est pourtant un acte d’adoration que nous faisons plusieurs fois par jour. Si le dou’a est réalisé de manière incorrecte ou incomplète, alors forcément, nous ne récoltons pas les bénéfices de nos invocations et cela entraîne des frustrations.

 

Introduction :

 

Selon le Prophète Muhammad ﷺ, le dou’a est pourtant l’outil le plus puissant que puisse utiliser le Musulman. Il est rapporté qu’il a dit : « L’invocation est l’arme du croyant et la colonne de la religion et la lumière des cieux et de la terre ». [1] L’invocation, si elle est bien réalisée est la clef qui ouvre toutes les portes et qui peut changer complètement le destin d’une personne. Lorsque nous avons un souci, c’est à Allâh en premier que nous devrions penser et auprès de qui nous devrions chercher assistance. Mais que faisons-nous ? Nous appelons d’autres créatures et si on dernier recours personne ne peut nous aider, nous tentons de demander à Allâh en nous disant : « peut-être que ça marchera… » AstarghfiruLlâh al-‘Adhim, quelle mauvaise compréhension et quel mauvais comportement nous avons.

L’invocation constitue un acte d’adoration qu’Allâh apprécie tout particulièrement, comme dans ce Hadith dans lequel il est rapporté que le Prophète ﷺ a dit : « Rien n’est aussi noble pour Allâh que l’invocation ». [2] D’ailleurs dans la pratique, il est rapporté du Messager d’Allâh ﷺ qu’il était à tout moment en état d’invocation : En entrant dans sa maison, en sortant de sa maison, en voyant une nouvelle lune, lorsque le vent soufflait, lorsque l’orage arrivait, lorsque la pluie tombait, lorsque la pluie ne venait pas, avant de manger, après manger, en buvant de l’eau, après avoir bu de l’eau, lors de la maladie, lorsqu’il allait mieux, lorsqu’il marchait, etc. Chaque moment est propice à l’invocation et c’est une habitude que nous devrions développer également, à l’image du Prophète Muhammad ﷺ.

C’est à ce point important qu’il est rapporté dans un Hadith que le Prophète ﷺ a dit : « Celui qui ne demande pas à Allâh Ta’ala, Allâh Ta’ala n’est pas satisfait de lui ». [3] La règle générale chez l’être humain, c’est que plus on lui demande, moins il est content. Tandis que pour Allâh, c’est le contraire, plus on lui demande, plus il est satisfait de nous.

On peut aussi évoquer le Hadith dans lequel le Messager d’Allâh ﷺ a dit : « L’invocation est l’essence (le cœur) de l’adoration » [4] En effet, lorsqu’un croyant invoque Allâh, il se connecte directement à son Créateur et c’est bien là le cœur de l’adoration.

Allâh nous invite à nous adresser à Lui, comme dans ce Hadith : « Si tu demandes, demande à Allâh et si tu cherches de l’aide, cherche-la auprès d’Allâh ». [5] Non pas qu’il soit interdit de demander de l’aide parmi les créatures, mais celles-ci sont limitées, tandis que la meilleure des aides est indéniablement celle qui vient d’Allâh qui n’a pas de limites.

Malgré cela, nous utilisons peu ou mal cette arme puissante. Pourquoi ? La raison est claire : nous constatons que ça ne marche pas ; sans même nous rendre compte que cet échec est dû à notre (mauvaise) manière de procéder.

Parmi les erreurs commises, le fait d’aller chercher la science dans les livres et non chez les savants, les Mashaykhs et Awliyas vivants et reconnus de notre communauté. Beaucoup de Musulmans basent aujourd’hui leur pratique sur le Hadith, pensant ainsi bien faire. Mais un Hadith ce n’est pas la Sunnah. Il existe beaucoup de Ahadith que les savants ne prennent pas en compte, quand bien même ils seraient bons dans leur chaîne de transmission. Quant à la personne qui ne sait pas faire le tri, elle mettra en pratique ce qu’elle a lu, selon sa propre compréhension, en pensant bien agir. Mais la Sunnah, c’est ce qui est vivant et mis en pratique par les savants, les Mashaykhs et Awliyas et non une somme de paroles rapportées et classifiées dans les livres. C’est un point essentiel qu’il convient de garder à l’esprit.

Lorsqu’on invoque, il faut mobiliser à la fois sa langue, son esprit, son cœur et son âme. En d’autres termes, cela demande un engagement tant extérieur (langue, placement corporel…), qu’intérieur (humilité, concentration, présence d’esprit et du cœur…). Sans quoi l’invocation est juste une coquille vide dénuée de sens. Le principe est « Si tu n’es pas connecté, tu n’es pas accepté ».

 

L’aspect corporel :

 

Selon la Sunnah, il existe cinq méthodes pour invoquer Allâh :

1/ Il s’agit de la méthode la plus courante. On lève ses mains au niveau de la poitrine et du cœur, paumes vers le ciel, les mains droites, à plat, on laisse une légère distance entre chaque doigt, entre les deux mains, entre les mains et la poitrine et entre les coudes et le corps. C’est la position naturelle de la personne qui est en nécessité, comme le mendiant et qui demande de l’aide.

Ainsi, il n’est pas correct d’invoquer en se tenant les deux mains, en les collant, en les plaçant sur ses genoux, ou en écartant les bras à droite et à gauche, etc. Cela constitue une bi’daa (innovation) car cela va dans le sens contraire de la Sunnah rapportée du Messager d’Allâh ﷺ qui nous a montré la bonne manière de faire qui doit refléter l’humilité et la nécessité et non l’arrogance ou l’insouciance. Ainsi, il est rapporté de ‘AbduLlâh ibn ‘Umar رضى الله عنه qu’il a dit que lever ses mains au-dessus ou en dessous de la poitrine pour invoquer constitue une innovation.

Lors du dou’a, la tête doit être penchée vers le bas, reflétant l’humilité. Il n’est pas correct de la laisser droite ou de regarder en l’air ou pire de regarder à droite et à gauche ce qui montre le peu d’intérêt que l’on porte à l’invocation que l’on est en train de faire ou d’écouter.

2/ En certaines occasions, comme lors de la bataille de Badr, il a été rapporté du Prophète parfait ﷺ qu’il invoquait en levant ses bras vers le ciel. Les Compagnons ont dit qu’ils pouvaient alors voir la blancheur de ses aisselles. Ils ont aussi rapporté que de la lumière et un agréable parfum en sortaient à cet instant-là.

3/ Il existe aussi une 3ème méthode qui consiste à invoquer avec les paumes des mains tournées vers le sol, mais cela est spécifique à la demande pour faire tomber la pluie (Istisqa’), tel que cela est rapporté dans le célèbre recueil de Ahadith authentiques de l’Imam Muslim, rapporté que Anas Ibnu Malik رضى الله عنه qui a dit : « Le Prophète   a invoqué Allâh pour demander la pluie et il a dirigé le dos de ses mains vers le ciel. »

4/ Le Prophète faisait aussi des invocations sans lever ses mains. C’est le cas pour les invocations que l’on effectue quotidiennement comme celles que l’on fait avant de manger, en sortant de chez soi, en entrant aux toilettes, etc. Dans ces cas-là, il n’est pas nécessaire de lever ses mains. Après la prière, il arrivait fréquemment que le Prophète ﷺ invoque Allâh sans lever ses mains. Une fois la salat terminée, certains font du Dhikr, ou font dou’a, dans des mosquées certains chantent des Qassidas… mais lorsqu’il avait terminé sa prière, le Prophète ﷺ faisait ainsi :

Il disait une fois « Allâhu Akbaar », puis, il disait trois fois « AstaghfiruLlâh ». Puis il récitait : « Lâ ilâha illâ l-lâhu, wahdahu lâ sharîka lah, lahu-l-mulku wa lahu-l-hamdu wa huwa alâ kulli shay’in qadîr. Allâhumma lâ mânia limâ atayta wa lâ mutiya limâ manata wa lâ yanfau dhâ-l-jaddi minka-l-jaddu. », ce qui signifie : « Il n’y a d’autre divinité qu’Allah, Unique, sans associé. A Lui la royauté, à Lui la louange et Il est capable de toute chose. Ô Seigneur ! Nul ne peut retenir ce que Tu as donné et nul ne peut donner ce que Tu as retenu. Le fortuné ne trouve dans sa fortune aucune protection efficace contre Toi. »

Si la plupart d’entre nous se contentons de réciter « Lâ ilâha illâ l-lâh » en fin de prière, c’est parce que nous avons pris cette habitude en raison de la facilité de réciter ce dhikr simple qui n’est en fait que le début de celui que récitait le Messager d’Allâh et qui demande plus d’efforts pour être mémorisé.

Il est aussi rapporté par Boukhari dans son Sahih, qu’en fin de prière le Prophète et les Compagnons faisaient du Dhikr en groupe, à voix haute si fort que tous les gens au alentours savaient alors que la prière était finie. [6] Ceux qui prétendent suivre le Salaf, devraient prendre note de cette tradition et s’en inspirer, alors même que leur imam Ibn Taymiyyah رحمه الله a encouragé cette pratique.

5/ Le dou’a peut aussi s’effectuer lors de la prosternation (as-Sujud) car c’est un moment privilégié pour invoquer.

 

L’aspect Spirituel :


Pour qu’une arme soit efficace, quelle qu’elle soit, il faut cinq éléments :

1/ l’arme doit être parfaite (elle doit fonctionner)

Ainsi, les invocations les plus parfaites sont celles qu’Allâh a enseignées à Son Messager ﷺ

2/ la personne qui utilise l’arme doit avoir la force de s’en servir. Si mon bras n’a pas de force, même la meilleure arme du monde ne me sera d’aucune utilité.

Ainsi, celui qui dit : « oh, mon dou’a ne sera jamais accepté », ou « oh, il ne se passe rien… » a peu de chance de voir son invocation acceptée, car pour que cela fonctionne, il faut avoir la conviction et la certitude (Al-Yaqin) que Allâh exaucera. Al-Yaqin, c’est la force du muscle permettant d’utiliser l’arme qu’est le dou’a.  Sans force, l’arme ne vous sera d’aucune aide.

3/ il faut savoir comment utiliser l’arme. Si on ne sait pas où mettre la balle, où se trouve le barillet, ou comment dégainer l’épée, ça ne fonctionnera pas.

Ainsi, il faut savoir comment effectuer correctement une invocation (dou’a).

4/ de même, il faut aussi savoir à quel moment il est utile d’utiliser cette arme. Si l’ennemi est chez lui au chaud, loin, et que la personne se met à tirer toutes ses flèches n’importe où, dans n’importe quelle direction. Que va-t-il se passer ? En tout cas, il est peu probable que cette personne atteigne son objectif.

De la même manière, Rassoul Allâh ﷺ a mentionné le fait que certains moments sont meilleurs que d’autres pour effectuer des invocations (Durant le temps de Tahajjud, après l’Adhan, en prosternation, etc…). [7]

5/ enfin, il ne faut pas qu’il y ait un obstacle empêchant d’atteindre la cible. Si la flèche est tirée dans un mur en béton, elle se brisera et ne servira donc à rien.

Le Prophète Muhammad ﷺ a mentionné certaines choses susceptibles de stopper net le bénéfice des invocations (si on commet de l’injustice envers des gens, qu’on confisque leurs droits, si on mange ce qui est illicite, que notre argent a été acquis de manière illégale, qu’on porte des habits volés ou achetés avec de l’argent haram, etc.). Pensez-vous vraiment qu’Allâh nous donnera quoi que ce soit de ce que nous demandons alors qu’on comment une injustice ou une oppression envers une de Ses créatures ? Pour quelle raison le ferait-Il ? Pour que nous puissions être encore plus injustes ?

Allâh a interdit l’injustice entre ses serviteurs. Il dit dans un Hadith Qudssi : « Ô mes serviteurs, Je Me suis interdit l’injustice à Moi-même et Je l’ai rendu interdite entre vous. Ne soyez donc pas injustes ». [8]

A l’inverse, le Prophète Muhammad ﷺ nous a  avertis que les invocations de l’opprimé sont acceptées ! Il est rapporté qu’il a dit : « …Et crains l’invocation de l’opprimé, car il n’y a pas de voile entre elle et Allâh .» [9]

Donc, pour que l’invocation soit exaucée, il faut veiller à ce qu’aucun de ses murs ne vienne faire obstacle.

Aussi, il ne faut pas demander ce qui est considéré comme un péché, comme celui qui voudrait invoquer pour réussir à voler telle chose dans une bijouterie ou à trouver de l’alcool pour en consommer, etc. On ne demandera pas non plus à couper les liens, ou à ce qu’Allâh cause du tort à telle ou telle personne. On entend parfois des gens dirent : « Puisque c’est comme ça, je vais invoquer Allâh contre toi ! », ou la grande mode parmi certains de nos frères qui est de dire « Qu’Allâh te brise le dos ! »… Il ne faut pas avoir peur de ce type de dou’as. L’invocation ne part pas de la bouche de la personne pour aller directement sur celui qui est visé. Le dou’a va d’abord à Allâh qui choisi ce qui est digne d’être accepté et ce qui est rejeté.

Comment faire pour que nos invocations (dou’as) soient exaucées ?

Il y a plusieurs points importants à prendre en compte si on souhaite voir son dou’a accepté. Il convient en tout premier lieu de comprendre que le dou’a doit mobilier 5 éléments :

– la langue (qui demande verbalement)
– l’intellect (qui créé une image mentale de la demande)
– le cœur (qui a conscience de notre entière dépendance vis-à-vis d’Allâh)
– l’âme/rouh (qui est conscient de la présence d’Allâh, qu’Il nous voit, nous entend, qu’Il est avec nous)
– le nafs (qui naturellement désire que la demande soit exaucée rapidement et qui ici doit faire preuve de patience et s’en remettre en Allâh pour l’exaucement – at-Tawakkul)

Partant de là, pour qu’un dou’a soit correctement effectué, il faut :

1/ « Al-Hudur ma’ Allâh » (être en présence d’Allâh). Lorsque le dou’a est effectué, il faut mentalement être en présence d’Allâh – subhanu wa Ta’ala -. Il faut spirituellement se connecter à Allâh, en pensant qu’Allâh nous voit, qu’Il nous entend, qu’Il est en notre présence. C’est la même chose avec notre mobile. Si le mobile n’est pas connecté au réseau, avec qui parle-t-on ? On parle dans le vide. Il faut se rappeler à qui on parle : Allâh ! Il faut se rappeler qu’Allâh nous aime, qu’il souhaite le meilleur pour nous, qu’Il est celui qui pourvoit, qu’Il connait nos situations, etc. Il faut donc en tout premier se préparer en se connectant spirituellement à Allâh.

Cela a été confirmé par le Prophète Muhammad ﷺ qui a dit : « […] sachez qu’Allâh n’exauce pas l’invocation provenant d’un cœur distrait » [10]

2/ Une fois que la personne est mentalement préparée, elle se mettre en état de Hamd, elle doit louer Allâh. C’est la raison pour laquelle beaucoup de dou’as commencent par « Al-HamduliLlâh ». Que signifie louer ? Il y a une différence entre « hamd » (louer) et « shukr » (remercier). Hamd, signifie louer Allâh pour qui Il est, pour Ses Attributs, etc… Tandis que Shukr, c’est le fait de remercier Allâh pour ce qu’Il nous a donné.

Certains d’entre nous disent qu’ils aiment Allâh, mais en réalité ils ne L’aiment que pour eux-mêmes (Ô Allâh donne-moi ceci, Ô Allâh accorde-moi cela…). Où sont ceux qui L’aiment réellement pour qui Il est, pour Ses magnifiques Attributs, pour Sa Seigneurie, pour Sa Majesté ? Qu’Allâh nous compte parmi ces gens.

Allâh est exempt des similarités avec Sa création, mais donnons un exemple pour illustrer le propos.

Imaginons que vous soyez un père de famille qui a trois fils. L’un vous masse un pied, car il espère récupérer quelques-unes de vos propriétés, le deuxième vous masse l’autre pied, car il vous craint et qu’il a peur de la punition et qu’il a peur que vous ne le priviez de son argent de poche, quant au dernier, il vous masse le dos, il se met à votre service, juste parce qu’il vous aime, car vous êtes son père. D’après vous, lequel de ces trois fils est le meilleur ?

Il y a un grand danger à adorer et aimer Allâh pour ce qu’Il nous donne, car quand ces bénédictions s’en vont, notre relation avec Allâh s’en va avec. Celui qui aime son père en espérant ses biens en retour (argent de poche, voiture, héritage…), il est une sorte de « commerçant », qui donne en espérant recevoir quelque chose en retour. Il fait du business. Celui qui aime son père juste par crainte de la punition ou d’être privé est comme un esclave. Il n’aime pas ce qu’il fait, mais il le fait quand même, par contrainte, comme un esclave. Mais le troisième, il se met au service de son père juste par amour pour lui !

La même chose peut s’appliquer aux croyants dans leur relation avec Allâh (Ô Allâh donne-moi ceci, Ô Allâh, donne moi ça – une maison, un mari, des enfants, un bon travail, une promotion, le Paradis….) et tant qu’Allâh nous donne nous sommes obéissants. Mais dès qu’Allâh stoppe les bénédictions, nous arrêtons de prier, on se dit que de toute façon Allâh ne nous écoute pas, etc. Celui qui agit ainsi est un commerçant, pas un véritable adorateur d’Allâh. Celui qui est dans la deuxième situation, agissant par crainte d’Allâh, bien sûr que c’est une bonne chose de craindre Son Châtiment, mais ce n’est pas le niveau de Foi (ou de Taqwa) le plus élevé. Le niveau le plus élevé, c’est d’adorer Allâh par amour, de l’adorer pour qui Il est, pour Ses magnifiques Attributs, parce qu’Il est notre Seigneur, Il est notre Dieu (iLlâh).

Par conséquent, lorsqu’on dit : « Al-HamduliLlâh », cela signifie qu’on loue Allâh, dans la recherche de l’agrément d’Allâh et non dans l’espoir d’obtenir quelque chose (profit). On adore Allâh en cherchant Allâh et non en cherchant un profit. On adore Allâh pour Allâh et non pour soi-même. La différence entre les deux est immense.

Bien entendu, il est tout a fait possible de demander (dou’a) des choses de ce bas monde, ce qui concerne le Deen, comme la science ou le Paradis, etc. mais on adore pas Allâh dans ce but. Si on agit ainsi, alors l’invocation en elle-même est une adoration profitable. Il y a une différence entre 1/ adorer Allâh uniquement pour obtenir ce dont on a envie, car finalement on adore que par intérêt et 2/ adorer Allâh et utiliser le dou’a pour nos besoins.

C’est une question de sincérité. Allâh dit dans le Qour’an : « Pourtant, que leur a-t-on ordonné, si ce n’est de se vouer exclusivement au culte d’Allâh » ? [11]

Donc, sans animosité dans le cœur, il faut louer Allâh, pour qui Il est non pour dans l’intention d’en tirer un bénéfice quelconque. Sinon, c’est soi-même qu’on aime et non Allâh. Le pire des faux dieux qui est adoré est le nafs (l’ego – soi-même, nos désirs).

3/ Il faut remercier Allâh pour ce qu’Il nous a donné (Shukr – gratitude). Il faut se remémorer les innombrables bienfaits qu’Allâh nous a donnés et le remercier abondamment pour tout cela. C’est un état du cœur qui se manifeste par la langue.

Allâh dit dans le Qour’an : « Votre Seigneur ne vous a-t-Il pas prévenus, en disant : “J’augmenterai Ma grâce, si vous êtes reconnaissants » [12] Imaginez ce concept puissant qu’Allâh nous offre en nous proposant la multiplication de Ses grâces si on est reconnaissants. Il nous donne, on Le remercie et Il nous donne encore plus !

Celui qui remercie Allâh doit le faire avec sincérité, comme le ferait un homme envers un autre homme qui l’aurait sauvé de la noyade. Imaginez l’état du cœur de celui qui a été sauvé, imaginez sa joie, sa gratitude. C’est cet état que nous devrions avoir envers Allâh qui nous a envoyé un homme ﷺ qui nous a sauvés de bien pire que la noyade. C’est cela la gratitude.

Pour le commun des Musulmans, il convient également de demander pardon à Allâh pour nos péchés. Cela peut par exemple se faire en disant : « Lâ ilâha illâ anta, subhânaka, innî kuntu mina z-zâlimîn » [13], ce qui signifie : « Pas de divinité à part Toi ! Pureté à Toi ! J’étais vraiment du nombre des injustes. »

4/ Il faut ensuite remercier Allâh pour le plus grand des bienfaits qu’Il nous ait accordés, à savoir le Prophète Muhammad ﷺ qui a été envoyé comme Miséricorde pour l’Univers. [14]

Il est rapporté du Prophète Muhammad ﷺ qu’il a dit : « Lorsque l’un d’entre vous prie, qu’il commence par louer Allâh et faire les éloges d’Allâh puis qu’il prie sur le Prophète () puis après cela, qu’il invoque par ce qu’il veut. » [15]

C’est la raison pour laquelle il est recommandé (avec présence d’esprit) de dire des salutations (Salawats – Durood Shareef) sur le Messager d’Allâh ﷺ avant de commencer une invocation. C’est cela  le sens des Durood/Salawat : montrer notre gratitude envers Allâh pour nous avoir bénis par l’envoi de Son bien-aimé Prophète ﷺ. Ainsi, si Allâh peut nous octroyer un tel bienfait, pourquoi ne pourrait-Il pas nous donner autre chose dont le statut sera forcément inférieur ? Qu’est-ce que la duniya comparée au Prophète Muhammad ﷺ? Qu’est-ce que l’argent comparé au Prophète Muhammad ﷺ? Qu’est-ce que les enfants comparés au Prophète Muhammad ﷺ? Rien ni personne n’a un statut supérieur auprès d’Allâh que Son Messager ﷺ.

5/ Il faut maintenant se concentrer sur les Attributs d’Allâh qui sont en relation avec notre besoin. Exemple : J’ai besoin que mon commerce fonctionne mieux? Alors, je dois par exemple me concentrer sur l’Attribut d’Allâh qui est « Razzâq », car Allâh est Ar-Razzâq, c’est-à-dire Celui qui accorde la subsistance à toutes les créatures. Je souhaite avoir des enfants? Je dois me concentrer sur l’Attribut de « Wahhâb », car Allâh est Al-Wahhâb, c’est-à-dire celui qui accorde avec profusion et récompense ceux qui ont obéi, comme grâce de Sa part. Je souhaite qu’Allâh me pardonne ? Alors, je dois me concentrer sur l’Attribut de « Ghaffar », car Allâh est Al-Ghaffâr, c’est-à-dire celui qui pardonne les péchés. Il est également Al-Ghaffôur, c’est-à-dire celui qui pardonne beaucoup (encore et encore). Pour cela, il faut apprendre les Noms et Attributs d‘Allâh afin de pouvoir aller chercher le nom ou l’Attribut qui corresponde à ce dont à besoin. On se rappellera qu’Allâh est Al-Kârim, c’est-à-dire celui qui est généreux et qui accorde beaucoup de bienfaits, même à ceux qui ne le méritent pas, qu’Il est Al-Fattâh, c’est-à-dire celui qui facilite à Ses créatures, qu’Il est aussi Ash-Shâfih, c’est-à-dire celui qui guérit. Etc…

6/ Le moment est venu de présenter à Allâh ce dont on a besoin. Allâh sait ce que nous désirons, mais Il veut et Il aime que nous l’exprimions, et il y a un bénéfice pour nous en agissant ainsi. Il faut l’exprimer avec le cœur, avec les mots et avec l’esprit. Concernant l’esprit, cela signifie imaginer ce qu’on demande. Il s’agit de construire mentalement notre demande. Si cela porte sur son magasin qui est en difficulté, on peut imaginer que le magasin est devenu plus grand, qu’il est rempli de clients, que les bénéfices arrivent, etc. Si on a un problème de santé, on s’imagine en bonne santé, avec le souci réglé. Si on est en quête de spiritualité, on sait qu’on a du mal à prier ou à faire du Dhikr ou à progresser dans notre Religion, alors on s’imaginera priant nos prières à l’heure avec assiduité, faisant du dhikr, devenant une personne pieuse, se revêtant de la Sunnah du Messager d’Allâh autant intérieurement qu’extérieurement et dites à Allâh : « Ya Allâh, je veux devenir une personne qui ressemble à Ton Messager ». Il faut ensuite venir avec humilité de dire à Allâh que sommes des créatures limitées, que nous n’avons que la possibilité d’imaginer, tandis que Lui, avec Son infini Pouvoir (Qoudrah), peut transformer ce besoin en réalité sans la moindre difficulté. Il suffit qu’Il dise « Kun Faya Kun » (Soit !) et c’est réglé. [16]

S’il est autorisé de demander des choses relatives à la Duniya (ce bas monde), il est encore mieux de demander ce qui est en rapport à la religion et qui est susceptible de nous rapprocher davantage d’Allâh. Il faut bien entendu joindre la posture qui est Sunnah. Que dire de celui qui fait une invocation avec les mains dans une direction, la tête dans une autre, le cœur distrait par autre chose, etc ? Qui va écouter une telle invocation ? Il y a des gens qui ne veulent même pas lever leurs mains pour invoquer Allâh, alors que cette pratique est clairement mentionnée dans les Hadiths ! Les mains parfois levées au niveau de la poitrine, comme le mendiant qui attend qu’on lui donne quelque chose dans ses mains ; et d’autres fois les bras levés vers le ciel au point où l’on peut voir les aisselles [17]. Certains prennent à peine soin de lever leurs mains ou écartent les bras n’importe comment, etc. Est-ce là l’attitude d’un mendiant ? Est-ce là l’attitude de celui qui est clairement dans le besoin ? Regardez ce qui est rapporté dans les Ahadiths et agissez en conséquence, car la façon de faire du Messager d’Allâh ﷺ est la meilleure manière de procéder.

Il ne faut pas hésiter à demander à Allâh, jusqu’à ce qu’Il exauce. Ensuite, nous pourrons effectuer d’autres demandes.

7/ Donner, c’est recevoir. En effet, lorsque nous effectuons des invocations, Allâh aime que nous demandions pour autrui. Cela signifie qu’on étend nos demandes à l’Humanité et au reste de Ses créatures. Par exemple, nous pouvons demander à Allâh qu’Il bénisse tous les êtres humains, qu’Il guide les non-Musulmans par la lumière de l’Islam, qu’Il augmente leur subsistance, etc. Il faut ouvrir son cœur et devenir généreux.

Abou Ad-Dardâ’ رضى الله عنه rapporte que le Prophète ﷺ a dit : « Allâh exauce toujours l’invocation que fait le Musulman en faveur de son frère en son absence. Près de sa tête, il y a un Ange, chaque fois qu’il invoque Allâh pour le bien de l’absent, l’Ange, dont il a la charge, dit : âmîne et tu en as l’équivalent. » [18] Par conséquent, si vous souhaitez que des anges fassent le dou’a pour vous, invoquez pour autrui et en retour, ils invoqueront pour vous.

8/ La personne doit de nouveau se rappeler et mentionner que si Allâh nous a bénis par la venue du Messager d’Allâh ﷺ qui est la meilleure des créatures et la plus grande des bénédictions parmi toutes les bénédictions, alors Il peut sans aucun doute nous accorder toute autre chose d’inférieur. Il est ainsi recommandé de réciter à nouveau des salutations (Salawats – Durood Shareef) sur le Messager d’Allâh ﷺ.

Il est rapporté de Saydinna `Umar ibn Al-Khattâb رضى الله عنه qu’il a dit : « L’invocation reste suspendue entre ciel et terre jusqu’à ce que tu invoques Allâh pour ton Prophète Muhammad et que tu lui adresses tes salutations » [19]

9/ At-Tawakkul – Il faut maintenant laisser l’affaire entre à Allâh – subhanu wa Ta’ala -. Par exemple : « Ô Allâh, je t’ai confié ce dont j’ai besoin, mais Tu sais mieux ce qui est profitable pour moi, fais ce qui Te plait me concernant ».

De même, il est rapporté que le Messager d’Allâh ﷺ a déclaré : « Invoquez Allâh tout en étant sûrs d’obtenir l’exaucement […] » [20]

Ensuite, il y a cinq manières dont le dou’a peut être exaucé :

– Oui, voici ce que tu as demandé (la personne reçoit ce qu’elle a demandé)
– Oui, mais pas maintenant (la personne va recevoir ce qu’elle a demandé, mais ce n’est pas encore le moment. Tout comme le fruit, il faut attendre que le dou’a soit mur et alors il tombera de lui-même et nous pourrons en bénéficier)
– Oui, à la place Je te donnerai quelque chose d’encore meilleur
– Oui, à la place Je vais te retirer une énorme calamité qui allait te toucher
– Oui, mais tu en auras davantage besoin dans l’au-delà qu’ici-bas (par ex. durant l’attente lors du Jugement dernier)

10/ Dans la duniya, faire maintenant son possible pour montrer à Allâh qu’on fait tout ce qui est en notre capacité, à notre niveau, pour que ce que nous avons demandé se réalise. Par exemple, si cela concerne notre magasin, on va redoubler d’efforts pour l’embellir, pour mieux servir les clients, proposer des produits de qualité, etc. Si cela concerne la santé, nous irons consulter des médecins, etc. Cela pour montrer à Allâh qu’à notre faible niveau de créatures nous faisons tout ce qui est entre notre pouvoir, mais qu’au-delà, seul Lui est capable de nous aider.

Saydinna Abû Hurayra رضى الله عنه rapporte que le Prophète ﷺ a dit : « Allâh -exalté soit-Il- dit : Je suis tel que Mon serviteur M’estime… » [20] Donc, si le Musulman pense que Allâh va lui donner, Allâh lui donnera.

 

En résumé :

 

1/ Etre en présence d’Allâh
2/ Louer Allâh pour qui Il est
3/ Remercier Allâh pour Ses bénédictions (et lui demander pardon pour nos péchés)
4/ Remercier Allâh pour le Prophète Muhammad (Durood/Salawats) ﷺ
5/ Penser à l’Attribut qui correspond à notre besoin
6/ Présenter à Allâh notre besoin
7/ Demander pour autrui
8/ Remercier à nouveau Allâh pour le Prophète Muhammad (Durood/Salawats) ﷺ
9/ Etre confiant et laisser l’affaire à Allâh
10/ A notre niveau, faire notre possible pour que cela se réalise

Ps : Ceux qui le désirent peuvent aussi donner une sadaqa après l’invocation. Cela renforce les chances d’être exaucés, car Allâh aime que l’on vienne en aide à ceux qui sont dans le besoin. En retour, Allâh exauce et nous accorde ce dont nous avons besoin.

Qu’Allâh nous facilite cette adoration et accepte nos invocations, car Il est au dessus de tout ce que nous pouvons imaginer en terme de bonté. Il est Le Généreux (Al-Karîm), Le Pourvoyeur (Ar-Razzâq) qui octroie et exauce sans peine tandis que nous sommes des êtres faibles, en nécessité et dans la dépendance absolue vis-à-vis de Lui – Exalté soit-Il -. ameen

Wa Allâhu a’alam

Apprendre la méthode correcte pour invoquer Allâh (dou'a) Cliquez pour tweeter

 

Notes :

Réf principale : Mawlana Sheykh Ahmad Dabbagh حفظه الله

[1] Al-Hâkim dans son sahîh, d’après Saydinna ‘Ali ibn Abî Tâlib رضى الله عنه
[2] Rapporté et authentifié par at-Tirmidhi dans ses Sounan, n°3370
[3] At-Tirmidhi dans ses Sounan n°3373, Ibn Maja dans ses Sounan n°3827 et Ahmad
[4] At-Tirmidhi et Ahmad
[5] At-Tirmidhi et Ahmad
[6] Les Shaykhān [Bukhārī & Muslim] rapportent que Ibn ‘Abbās رضى الله عنه a dit : « Effectivement, à l’époque du Prophète les gens prononçaient le Dhikr à voix haute au sortir de la prière. » Ibn ‘Abbās rajoute : « Je pouvais savoir quand ils avaient terminé leur prière, car je pouvais alors les entendre faire le Dhikr. »
[7] Parmi les meilleurs moments pour effectuer des invocations : durant le temps de Tahajjud, après l’Adhan, après l’Iqâma, pendant le Sujud, après la Salat…
Parmi les actions qui renforcent le dou’a, on peut aussi citer : avoir son Wudhu, faire face à la Qibla…
[8] Rapporté par Muslim
[9] Rapporté par Boukhari, Muslim et d’autres
[10] At-Tirmidhi
[11] Qour’an, 98/5
[12] Qour’an, 14/7
[13] Qour’an, 21/87
[14] Qour’an, 21/107 « Ô Muhammad ! Nous ne t’avons envoyé que comme miséricorde pour l’Univers. »
[15] At-Tirmidhi dans Jami, chapitre sur az-Zuhd
[16] Cette duniya étant un lieu de test, Allâh décidera ce qui est préférable pour nous et Il peut par exemple décider de ne pas guérir une personne, selon Sa Science et Sa Connaissance et nous devons placer notre confiance en Son choix quel qu’il soit.
[17] Car le ciel est la direction (Qibla) des invocations.
[18] Muslim
[19] At-Tirmidhi
[20] At-Tirmidhi, n°3479
[21] Rapporté par Al-Bukhârî, n°2224

En complément, vous pouvez également lire l’article : Des règles de bienséance à observer lors d’une invocation (An-Nawawî)

Les 6 règles extérieures et intérieures de la lecture du Coran

 

Mawlâna Muhammad Zakariyya Kandhalawi

 

 

coran-adab

 

 

BismiLlâhi ar-Rahmani ar-Rahim,

Les Mashaykh ont mentionnés six adabs (règles de convenances) extérieures et six intérieures nécessaires à la lecture du Coran :

 

Adabs extérieurs

1) Accomplir ses ablutions (wudhu) et s’asseoir face à la Qibla [1] de façon extrêmement respectueuse.

2) Ne pas lire vite mais avec tartil et tajwid [2], c’est-à-dire d’une façon harmonieuse (tartil) et correcte (tajwid).

3) Essayer de pleurer même si l’on doit s’y efforcer.

4) A chaque verset ayant trait à la miséricorde nous devrions faire une pause, réfléchir et pour ceux exprimant le châtiment, nous devrions implorer le Pardon et la Compassion d’Allâh.

5) Lire à voix basse si l’on craint de sa part un manque de sincérité ou si l’on risque de gêner les autres. Autrement, lire à voix haute.

6) Lire d’une voix mélodieuse comme en soulignent l’importance de nombreux Hadiths.

 

Adabs intérieurs

1) Le cœur devrait être rempli de la grandeur du Coran et réaliser à quel point il est sublime.

2) Avoir le cœur baigné de la Grandeur, la Majesté et la Magnificence d’Allâh Tout-Puissant dont le Coran représente la Révélation.

3) Le cœur devrait être libre de toute source de doute et de distraction.

4) Prendre conscience de sa signification et éprouver un grand plaisir à sa lecture.

Une fois, l’Envoyé d’Allâh ﷺ passa une nuit entière en répétant ces versets du Coran :

« Si tu les chaties, ils sont tes esclaces et si Tu leurs pardonnes, Tu es le Puissant, le Sage. » [3]

Une fois également, Sa’îd Ibn Joubaïr رضي الله عنه passa la nuit à répéter ce verset :

« Et tenez-vous à l’écart aujourd’hui ô vous les criminels ! » [4]

5) Soumettre son cœur à la signification contenue dans les versets que nous lisons. Par exemple, si nous arrivons à des versets se rapportant à la Grâce d’Allâh, nous devrions avoir le cœur rempli de joie, et à d’autres exprimant Son châtiment, le cœur rempli de crainte.

6) On devrait s’efforcer de prêter une oreille attentive, comme si Allâh le Tout-Puissant Lui-même était en train de nous parler et que nous soyons en train de l’écouter.

Qu’Allâh par Sa Grâce et Sa Bonté nous permette de lire le Coran avec ces règles de politesse. Âmîn !

 

Notes :

Réf : A partir du Fadhâ’il al-A’mâl de Mawlâna Muhammad Zakariyya Kandhalawi, chap. des vertus du Coran.

[1] En direction de la Ka’aba (Makka)
[2] Lire plus lentement, en le psalmodiant, et le plus correctement possible. Toujours avec ses règles.
[3] Coran, s5/v118
[4] Coran, s36/59

Ps : Se rappeler que le Qour’an ne bénéficie qu’à ceux qui désirent être guidés et sauvés à travers lui.

Des règles de bienséance à observer lors d’une invocation

Par l’Imam An-Nawawî [1]

 

du-a

 

Sache tout d’abord que, de l’avis d’une majorité de juristes, de traditionnistes et de savants des différentes écoles, tant parmi les Anciens que parmi leurs successeurs –que Dieu soit satisfait d’eux-, l’invocation est recommandée. En effet, Allâh -exalté soit-Il- a dit : « Votre Seigneur a dit : « Invoquez-moi et Je vous exaucerai. » » [2]

Il a dit également : « Invoquez votre seigneur en toute humilité et en secret (ou intérieurement) » [3]

Et les autres versets présentant un sens analogue sont bien connus. Quant aux hadîths authentiques portant sur le sujet, ils sont eux aussi trop connus pour les mentionner ici. Nous en avons d’ailleurs suffisamment cité au chapitre relatif aux invocations. Et c’est Allâh qui accorde la réussite.

Nous extrayons ce passage de la « Risâla » de l’imâm abû al-Qâsim al-Qushayrî –que Allâh soit satisfait de lui- :

« Les hommes ont toujours divergé pour savoir s’il valait mieux invoquer [Allâh dans les moments difficiles] ou observer un mutisme satisfait ? Les uns estiment que l’invocation est une servitude en vertu du hadîth précédemment cité : L’invocation est l’essentiel de l’adoration, et aussi parce-que l’invocation est l’expression de son indigence à l’égard de Allâh -exalté soit-Il-. D’autres estiment que le mutisme et la soumission devant l’accomplissement des décrets divins est plus parfait, et qu’il vaut mieux, de ce fait, se contenter des dispositions prises par le destin. D’autres estiment, encore que pour satisfaire aux deux exigences, le fidèle devrait invoquer Allâh de sa bouche tout en gardant son cœur satisfait [du décret divin]. »

Selon al-Qushayrî, l’attitude la plus satisfaite est de tenir compte de la situation : l’invocation peut être en effet préférable au silence à certains moments, et cela en conformité avec la bienséance spirituelle alors qu’à d’autres moments c’est le silence qui sera préférable, en vertu de cette même bienséance. Tout ceci est fonction de l’instant : si le cœur du fidèle l’incline à l’invocation, c’est que celle-ci est alors préférable, mais si son cœur aspire au silence, c’est que celui-ci est plus parfait.

Ce que l’on peut dire avec certitude c’est que lorsque l’invocation est profitable aux musulmans, ou lorsqu’elle a un rapport avec un droit divin, elle est préférable, car elle constitue un acte d’adoration ; mais dès lors qu’il s’agit de droits individuels, le silence est plus parfait. En dehors de cela, la première des conditions qui prélude à l’invocation, est de ne se nourrir que de ce qui est licite.

On rapporte que Yahya b. Mu’âdh al-Râzî -que Allâh soit satisfait de lui- disait : « Comment pourrai-je T’invoquer moi qui suis un pécheur ? Et comment ne pas T’invoquer, Toi qui es le Généreux ? »

Parmi les règles de bienséance propres à l’invocation, la présence du cœur en est une des plus importantes. Nous allons indiquer, si Allâh le veut, les fondements scripturaires de cette règle. Selon certains savants, le but de l’invocation est de faire montre de son indigence, car Allâh  -glorifié et exalté soit-Il- fait ce qu’Il veut [c’est-à-dire que les invocations ont davantage pour objet de faire état de sa dépendance à l’égard de Allâh que d’obtenir quelque chose].

L’imâm abû Hâmid al-Ghâzalî précise pour sa part dans son « Ihyâ’ » que les règles de bienséance en matière d’invocation sont au nombre de dix :

* La première consiste à guetter les moments propices aux invocations, tels que le jour de ‘Arafât, le mois de Ramadhân, le jour du vendredi, le dernier tiers de la nuit ou le début de l’aube.

* La deuxième consiste à profiter des situations au cours desquelles les invocations sont exaucées, tels que la prosternation, le choc des armées, la tombée de pluie, la fin de la prière etc. J’ajouterai pour ma part que la disposition du cœur constitue aussi un moment privilégié.

* La troisième veut que l’on s’oriente vers la qibla, en levant les mains [au ciel] puis qu’après l’invocation, on se les passe sur le visage.

* La quatrième nous incite à ne pas hausser la voix, mais à L’invoquer à mi-voix.

* La cinquième consiste à ne pas employer d’artifices de langage au cours de l’invocation, au point qu’on a pu dire que de tels artifices portent atteinte à l’invocation. Il est même, peut-être préférable dans ce cas de recourir à des invocations traditionnelles, car il n’est pas donné à tout le monde de choisir avec bonheur les mots d’une invocation, et on peut craindre d’un ignorant qu’il prononce des formules regrettables à son insu.

Certains savants estiment même que puisqu’il faut invoquer [Allâh] avec humilité et en faisant montre de son indigence, à quoi bon employer des termes éloquents [à seule fin de plaire au public], voir suffisants ? On prétend du reste que les savants et les abdâls n’utilisent pas plus de sept paroles dans leurs invocations. Ceci semble confirmé par le contenu du dernier verset (286) de la sourate « La Vache » (al-Baqara) : Seigneur ne nous tiens pas rigueur. En effet, pas un des versets contenant des invocations attribuées à l’un des serviteurs de Allâh n’en contient davantage, comme on peut le constater notamment dans le trente-cinquième verset de la sourate « Ibrâhîm » : Seigneur fais de ce pays un endroit sûr

La majorité des savants n’interdit cependant pas d’utiliser plus de sept mots, ni ne le déconseille. Et il est même recommandé de manière générale de multiplier les invocations.

* La sixième règle à observer lors d’une invocation est d’implorer [Allâh] avec crainte et humilité, en vertu de la Parole de Allâh -exalté soit-Il- : « Ils s’empressaient de faire le bien, ils Nous invoquaient avec espérance (ou : amour) et crainte, et se montraient humbles devant Nous. » [4]

Il a dit également : « Invoquez votre seigneur en toute humilité et en secret » [5]

* La septième règle veut que l’on se montre résolu dans sa demande, tout en étant certain de la réponse et en faisant montre d’un espoir sincère. Les textes qui recommandent cette attitude sont nombreux et fort connus. Sufyan b. ‘Uyayna -que Allâh lui fasse miséricorde- a dit : « Ce que l’on sait de soi-même ne doit pas nous empêcher de demander (ou d’invoquer Allâh), car Allâh -exalté soit-Il- a exaucé la pire des créatures, à savoir Iblîs lui-même, quand ce dernier Lui demanda : Seigneur, accorde moi un délai jusqu’au jour où ils seront ressuscités. Allâh [lui] répondit : oui, ce délai t’est accordé (litt. Tu es de ceux qui sont attendus ! ). » [6]

* La huitième veut que l’on se montre insistant dans ses invocations, sans cependant les répéter plus de trois fois ni les trouver longues à être exaucées.

* La neuvième consiste à introduire son invocation par la mention de Allâh -exalté soit-Il- et j’ajouterai, pour ma part, de faire suivre cette invocation d’une demande de grâce [ou d’une prière : salât] sur l’Envoyé de Allâh -que Allâh lui accorde la grâce et la paix- précédée d’une louange adressée à Allâh -exalté soit-Il- puis de terminer l’invocation de la même manière.

* Et la dixième règle, la plus importante, est fondamentale pour espérer être exaucé : [avant de L’invoquer}, il faut tout d’abord se repentir, réparer les torts causés à autrui et tourner son cœur vers Allâh -exalté soit-Il-.

Al-Ghazâlî ajoute cette précision : « Si l’on me demande : à quoi donc servent les invocations, puisqu’on ne peut infléchir les décrets divins ? Je répondrais ceci : Sache que repousser le malheur par le biais de l’invocation est justement un aspect du décret divin. L’invocation, en effet, infléchit le malheur et appelle la miséricorde, de même que le bouclier préserve des armes et que l’eau fait pousser les plantes. Ainsi, tout comme le bouclier repousse la flèche et qu’ils se repoussent l’un l’autre, de même l’invocation a pour vocation de repousser les épreuves. Porter les armes n’implique pas une méconnaissance du décret divin, puisque Allâh -exalté soit-Il- a dit : « Qu’ils soient sur leurs garde et prennent leurs armes ! » [7] Allâh – exalté soit-Il – a à la fois prédestiné toute chose et la cause de toute chose. En outre l’invocation favorise le recueillement et la concentration du cœur, et fait naître chez le fidèle un sentiment d’indigence, ce qui constitue l’essence de l’adoration et de la connaissance. »

Notes :

[1] Réf : « Le livre des Invocations, de l’imam al-Nawawi , traduit de M. Al-Fâtih, édition entièrement revue et corrigée par Sheykh Abd-Allah Penot, éditions Alif – En nour », pages 492 à 495.
[2] Qour’an, s40/v60
[3] Qour’an, s7/v55
[4] Qour’an, s21/v90
[5] Qour’an, s7/v55
[6] Qour’an, s7/v14 et 15
[7] Qour’an, s4/v102

 

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Conseils sur la manière de parler des menstrues à ses filles

Par Ustadh Abdus Shakur Brooks

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Question :

Comment une mère doit-elle aborder le sujet des menstrues avec sa fille? Doit-elle la préparer à ce qui va se passer et lui parler du fiqh, ou doit-elle attendre qu’elle ait ses menstrues et le lui apprendre ensuite indirectement?

Réponse :

Il est généralement préférable de parler aux filles de leurs menstrues avant qu’elles n’arrivent, sans pour autant introduire des questions techniques de fiqh. Une mère peut introduire le sujet en informant sa fille qu’un jour viendra où elle verra quelque chose appelé « menstrues ». Elle doit lui expliquer de quoi il s’agit et pourquoi cela se produit (un signe de sa «croissance») et qu’à partir du moment où cela arrive, les deux anges situés à sa droite et à sa gauche commencent à enregistrer ses actions et que par conséquent Allâh aura envers elle des attentes plus élevées, qu’elle doit prier, jeûner et porter le hijab comme sa mère.

La mère doit également informer sa fille qu’elle devra rester loin des garçons et qu’Allâh n’aime pas qu’elle se mélange à eux. En général, la mère est tenue d’implanter dans l’esprit et dans le cœur de sa fille que l’arrivée des menstrues signifie un « grand changement dans sa vie » qui la rendra bien plus importante en ce qui concerne sa relation avec Allâh et sa religion. Cela la conduira à penser à la venue du « jour important », qu’elle verra comme une étape intéressante dans sa vie.

La mère peut aussi lui en parler un petit peu avant d’aller au lit. Cela devrait être fait de temps à autre et non en une seule fois. Une mère doit également informer sa fille qu’il y a des instructions qu’elle aura besoin d’apprendre et qu’elle les lui enseignera dans un avenir proche.

Quand elle verra les menstrues pour la première fois, elle se précipitera très probablement vers sa mère, bouleversée et excitée. A ce moment, la mère doit acheter (ou aura déjà acheté) un petit agenda et lui demander d’y inscrire les jours de ses menstrues. Ce type d’enseignement permet à la fille de commencer à se responsabiliser face à ce « nouveau départ ». Le but de l’agenda et du fait d’y noter  ses jours de menstrues étant d’inscrire dans son esprit qu’il est important qu’elle soit responsable sur cette question.

La mère doit demander à sa fille à ce qu’elle l’avertisse lorsque les saignements se produisent. Quand elle rapporte à sa mère que ses menstrues sont arrivées, la mère doit lui apprendre comment reconnaître les signes qui indiquent que les menstrues sont terminées. Elle doit aussi lui enseigner que ses menstrues ont désormais un nombre fixe de jours, basé sur le nombre de jours qu’elle a saigné la première fois.

La mère ne doit pas oublier de lui demander à ce qu’elle conserve chaque mois l’enregistrement de ses périodes de menstrues et également à ce qu’elle l’avertisse systématiquement lorsque son saignement s’arrête avant son nombre fixe de jours ou bien si le nombre fixe de jours est dépassé. Lorsque l’un de ces deux cas se produit et que la jeune fille en informe sa mère, celle-ci  doit lui enseigner les règles qui s’appliquent dans chacune de ces situations. Ces règles de base peuvent être trouvées dans le traité de Fiqh Malikite d’al-Akhdari. [1]

La mère doit dire à sa fille de noter ces principes (règles) de Jurisprudence (fiqh) dans son petit livre et doit également l’aider à le faire. Ce type d’enseignement (tarbiyyah) va permettre à la mère d’enseigner à sa fille comment appliquer et comprendre les préceptes Juridiques concernant les menstrues, sans être trop « technique », jusqu’à ce qu’elle soit un peu plus âgée et puisse apprendre dans les livres. Durant tout ce processus, la mère devient une sorte de guide pratique pour elle.

Il est préférable ce soit la mère qui parle de ce sujet à sa fille plutôt que le père, sauf si le père est seul à l’élever. Dans ce cas, il ne fait alors aucun doute qu’il devra lui-même se charger de cet enseignement.

Enfin, tout comme la mère apprend à sa fille les règles concernant les menstrues, elle doit aussi lui apprendre la façon d’effectuer correctement un lavage rituel (ghusl). Voilà mon conseil.

Et Allâh est plus Savant.

Ustadh Abdus Shakur Brooks
Examiné et finalisé le 14/06/2011

 

Notes :

[1] Parmi les règles Juridiques que l’ont peut trouver dans le Moukhtasar d’Al-Akhdari, Fi Al-îbadat (Abrégé sur l’adoration), il est dit dans la 3ème partie (Menstrues et Lochies) qu’il n’est pas permis à celle qui a ses règles de faire la prière, de jeûner, de faire les circuits autour de la Kaâba, de toucher le Coran (mushaf – en arabe), ni de pénétrer dans une mosquée. Elle est astreinte au rattrapage du jeûne sans l’être à la prière. Il existe d’autres règles et détails juridiques qu’il est important d’étudier et de connaître.

Le jeûne de Ramadan (Siyâm) par Al-Akhdarî

selon le rite Malikite

 
Extrait d’Al Moufîd fil ‘ibadat wal mou’amalat
de Sheykh Al-Akhdarî et Youssef Alî Bedioui [1]

 

ramadan (1)

 

 

1/ Quel est le caractère légal du jeûne de ramadan [2]?

Le jeûne du ramadan est obligatoire.

2/ Quelle source indique cette obligation?

La Parole du Très-Haut :

«  … ainsi, celui qui assiste à ce mois doit le jeûner [3] … »

De même, le hadith d’Abdallâh ben ‘Omar – que Dieu les ait tous deux en son agrément – qui a relaté que le Messager de Dieu (salallahou ‘alayhi wassalaam) a dit :

« L’islam est construit sur cinq choses : le témoignage qu’il n’y a de dieu qu’Allâh et que Mouhammad est le Messager d’ Allâh, l’accomplissement de la prière, l’acquittement de l’aumône canonique (zakât), le hadj à la Demeure et le jeûne de ramadan. » (Rapporté par al-Boukhâri et Mouslim).

3/ Qu’est-ce qui permet de confirmer le début du jeûne de Ramadan?

L’obligation du jeûne devient effective par le terme complet [4] du mois de cha’bân ou la vue du croissant de lune (au soir du 29ème jour de ce mois) par deux témoins honorables (‘adl).

4/ Le fidèle doit former l’intention de jeûner la nuit précédant la première journée du ramadan. Citer la référence en cela.

Le hadith relaté par ‘Omar – que Dieu l’ait en son agrément – :

« Les actes tiennent des intentions … » (Rapporté par Ahmad, al-Boukhâri et Mouslim).

De même le hadith de Hafça – que Dieu l’ait en son agrément – qui a relaté que le Prophète a dit:

« Qui ne forme pas la résolution, avant l’aube, de jeûner, son jeûne ne sera pas accepté. » (Rapporté par Ahmad, les quatre auteurs de Sounan, Ibn Khouzeyma, Ibn Hibbân et al-Dâraqotni).

5/ Le fidèle devra-t-il former cette intention à chacune des nuits suivantes du ramadan?

Le fidèle n’a pas à former cette intention le reste du ramadan, en référence au hadith :

« … et pour chaque personne, il y aura ce qu’elle aura formée comme intention … » (Rapporté par al-Boukhâri et Mouslim).

6/ Parmi les actes de la sunna, il y a le fait de rompre tôt le jeûne et de retarder la nourriture prise à la fin de la nuit. Citer en cela une référence.

Abou Dharr – que Dieu l’ait en son agrément – a relaté : « Le Messager de Dieu a dit :

« Ma Communauté ne cessera d’être dans une situation bénéfique tant qu’elle rompra tôt le jeûne et retardera la nourriture prise à la fin de la nuit. » (Rapporté par Ahmad).

De même, le Hadith d’lbn ‘Abbâs qui a dit : « J’ai entendu le Prophète dire :

« Nous autres, prophètes, il nous a été ordonné de rompre tôt le jeûne et de retarder la nourriture prise à la fin de la nuit. » (Rapporté par al-Tayâlissi et al-Tabarâni dans al-Kabîr)

7/ Quel caractère prend l’intention formée après l’aube?

Elle n’est pas valable après l’aube, en référence au hadith :

« Le jeûne n’est pas valable pour celui qui ne forme pas l’intention de jeûner depuis la nuit qui précède. » (Rapporté par an-Nasâï).

8/ Que doit-on faire si la vision du croissant de lune est constatée après l’aube?

Il est obligatoire de s’abstenir de manger en ce jour, en raison de l’inviolabilité de ce jour. La personne devra rattraper le jeûne de ce jour, du fait de l’absence d’intention précédente.

9/ Qu’en est-il de l’intention de jeûner formée avant que la nouvelle lune de ramadan soit observée?

Cette intention est nulle, même si la personne l’avait formée avant l’observation du croissant de lune, puis s’était ensuite abstenue de manger ou de boire, avant d’apprendre que le jour en question faisait partie de ramadan. Cela n’est donc pas valable et elle devra rattraper ce jour, en raison de l’absence de certitude et du fait qu’elle avait jeûné dans le doute.

10/ Qu’en’ est-il du fait de jeûner le jour du doute pour s’assurer de ne pas manquer le ramadan?

On ne jeûne pas le jour du doute à cette intention.

11/ Quelle source indique qu’on ne jeûne pas dans cette intention?

Le hadith d’Ammâr ben Yâserqui a dit : « Qui jeune le jour sur lequel on a un doute a désobéi à Abou’l-Qâsim, Muhammad. » (Al-Boukhâri l’a cité en note. Les quatre auteurs de Sounan ont déclaré sa chaîne de transmetteurs ininterrompue et at-Tirmidhi, Ibn Khouzeyma, Ibn Hibbân et al-Hâkem l’ont déclaré valide-sûr).

12/ Qu’en est-il lorsque le jour du doute tombe un jour où le fidèle avait fait vœu de jeûner ou qu’il jeûnait de manière surérogatoire?

Cela est permis, car c’est un jour parmi les jours de cha’bân.

13/ Quelle référence indique cette permission?

Ce qui a été rapporté du Prophète :

« Ne faites point précéder le jeûne de ramadan en jeûnant un jour ou deux jours avant, sauf s’il s’agit d’un jeûne que la personne avait coutume de jeûner. Qu’elle jeûne alors ce jour-là. » (Rapporté par al-Boukhâri et Mouslim).

14/ Quel caractère a le fait de s’abstenir de manger au matin du jour du doute [5]?

Il est recommandé que la personne s’abstienne de nourriture au matin du jour du doute, du fait de la possibilité que ce jour soit attesté comme faisant partie du ramadan. Elle évitera ainsi le fait d’avoir mangé durant le ramadan, sans le savoir. Cela même si le rattrapage de ce jeûne sera de toute façon obligatoire pour elle.

15/ Qu’en est-il de la personne qui vomit malgré elle, durant le jeûne obligatoire?

Ce vomissement ne rompt pas le jeûne. C’est le vomissement délibéré qui annule le jeûne.

16/ Citer une référence concernant la question précédente.

Le hadith d’Abou Houreyra qui a relaté que le Messager de Dieu a dit :

« Si quelqu’un vomit malgré lui, il n’a pas à rattraper son jeûne mais s’il se force à vomir, il renouvellera le jeûne de ce jour. » (Rapporté par Ahmad, Abou Daoud, at-Tirmidhi, Ibn Mâja, Ibn Hibbân et al-Hâkem).

17/  Quel caractère ont les pollutions « nocturnes » [6] et la saignée, le jour de ramadan?

Tout cela ne rompt pas le jeûne.

18/ Citer une référence pour la question précédente.

Ce qu’a relaté Abou Sa’îd du Prophète qui a dit :

« Trois choses ne rompent pas le jeûne : le vomissement, la saignée et les pollutions nocturnes. » (Rapporté par at-Tirmidhi et al-Bayhaqi)

De même, le hadith d’Ibn ‘Abbâs qui a relaté que le Messager de Dieu se fit pratiquer la saignée alors qu’il jeûnait. (Rapporté par al-Boukhâri, Abou Daoud, al-Nasâï et at-Tirmidhi).

19/ Quelles sont les conditions de la validité du jeûne ?

• L’intention formée antérieurement à l’aube [7], pour le jeûne obligatoire comme pour le surérogatoire.
• Pour la femme, être exempte de menstrues ou de lochies,
• Sa raison,
• S’abstenir de rapports sexuels, de nourriture et de boisson.

20/ Qu’en est-il lorsque le sang des menstrues cesse avant l’aube?

Si le sang des menstrues ou les lochies cessent, ne serait-ce qu’un instant avant l’aube, le jeûne du jour à venir devient alors obligatoire pour la femme. Cela, même si elle ne s’est lavée qu’après l’aube, car la purification n’est pas une condition du jeûne.

21/ Quel caractère a le fait de reformer l’intention du jeûne de ramadan, après que celui-ci fut interrompu par la maladie, les règles ou les lochies?

L’intention est alors reformée dans ces cas ou ce qui est comparable à ceux-ci.

22/ Qu’est-ce qui démontre la solution précédente?

Le fait que la rupture du jeûne se soit interposée pendant la durée du jeûne, chose qui interrompt la continuité de l’intention formée dès le début du ramadan.

23/ Le dément doit-il rattraper la période antérieure de jeûne, après le retour à la raison?

Il est obligatoire qu’il rattrape tout le jeûne ayant eu lieu durant sa démence, même si cela eu lieu pendant de longues années.

24/  Qu’en est-il du résident qui quitte la ville pour une distance non éloignée [8] et rompt le jeûne en pensant que cela lui est permis?

Il n’est pas tenu de l’expiation (kaffâra), car il n’a pas violé le caractère sacré du jeûne.

25/ Qu’en est-il de celui qui coïte, mange ou boit volontairement, durant la journée du ramadan, sans que cela soit dû à une Interprétation ambiguë ou à une erreur?

II est tenu du rattrapage de ce jour (qadâ’) ainsi que de l’expiation (kaffâra).

26/ En quoi consiste l’expiation?

Soit le fait de nourrir soixante pauvres, soit l’affranchissement d’un esclave croyant, soit le jeûne de deux mois consécutifs.

27/ Quel caractère a ce qui pénètre dans la gorge par une autre voie que la bouche, durant le jeûne?

Dans ce cas, la personne devra seulement rattraper ce jour, car cette compensation est de toute façon obligatoire dans tous les cas où il y a rupture du jeûne.

28/ Quel caractère prend ce qui arrive, par injection, à l’estomac?

Ce qui arrive à l’estomac par injection, entraîne seulement le rattrapage du jour en question.

29/ Qu’en est-il lorsque la personne mange, bien qu’elle ait eu un doute sur le possible lever de l’aube?

Elle sera seulement tenue de rattraper ce jour, non de l’expiation. La personne n’a guère l’intention, en effet, de violer le caractère sacré du ramadan.

30/ Quel caractère a le brossage (siwâk [9]) des dents, durant le jeûne?

Le brossage des dents est permis au jeûneur, durant tout le jour du jeûne.

31/ Quelle source indique cette permission?

Ce qu’a relaté ‘Âïcha – que Dieu l’ait en son agrément – : «  Le Messager de Dieu a dit :

« Parmi les meilleures attitudes du jeûneur, il y a le brossage des dents. » (Rapporté par Ibn Mâja et al-Dâraqotni).

De même, le hadith d’Âmir ben Rabî’a qui a dit : «  Je ne peux compter le nombre de fois que j’ai vu le Messager de Dieu se brosser les dents alors qu’il jeûnait. » (Rapporté par Ahmad, Abou Daoud et at-Tirmidhi, Ibn Khouzeyma, Abou Ya’la, al-Bazzâr, at-Tabarâni et al-Dâraqotni l’ont déclaré bon, alors qu’al-Boukbâri l’a cité en note dans son Sahih)

32/ Quel caractère a le rinçage de la bouche, suite à la soif?

Cela est permis, car cela aide le jeûneur.

33/ Qu’en est-il de celui qui se réveille au matin du jeûne en se trouvant en état de janâba?

Cela est permis, en référence au hadith de ‘Âïcha qui a relaté qu’un homme demanda : « Ô Messager de Dieu! Il arrive que la prière (de l’aube) arrive alors que je me trouve en état de janâba, et je jeûne alors ! Le Prophète de Dieu répondit : – Et moi aussi, il arrive que la prière arrive alors que je me trouve en état de janâba, et je jeûne !… » (Rapporté par Ahmad, Mouslim et Abou Daoud).

34/ Quel caractère a le jeûne de la femme enceinte lorsque celle-ci craint les conséquences du jeûne pour le bébé qu’elle porte?

Dans ce cas, elle rompra le jeûne et ne sera pas tenue de nourrir un pauvre en compensation (en plus du rattrapage obligatoire de son jeûne).

35/ Citer une référence concernant la question précédente.

Le hadith d’Anas qui a relaté que le Messager de Dieu m’a dit :

« Dieu, Puissant et Majestueux, a dispensé le voyageur du jeûne et de la moitié de la prière. Il a aussi dispensé du jeûne la femme enceinte et la nourrice. » (Rapporté par Ahmad et les quatre auteurs de Sounan. At-Tirmidhi l’a déclaré « bon »)

36/ Qu’en est-il de la nourrice qui craint pour son enfant?

Si elle craint pour le nourrisson et ne parvient pas à le mettre en nourrice, elle rompra le jeûne et nourrira en compensation un pauvre (pour un jour [10] qu’elle devra aussi rattraper).

37/ Quelle source étaye la question précédente?

La Parole du Très-Haut :

« .. Et à charge pour ceux qui le supportent (difficilement) de s’acquitter en réparation de la nourriture d’un pauvre [11] … »

Ibn ‘Abbâs a déclaré : « Cela (ce passage) est applicable pour la femme enceinte et la nourrice [12]. » (Rapporté par Abou Daoud)

38/ Quel caractère a le jeûne du vieillard?

Il rompt le jeûne et nourrit un pauvre par jour, en compensation.

39/ Qu’en est-il de celui qui a négligé de rattraper des jours de ramadan, au cours de l’année en cours, jusqu’à ce que le ramadan suivant soit arrivé?

Il jeûnera le ramadan suivant, puis rattrapera ensuite les jours du ramadan précédent non jeûnés en donnant en plus en compensation la nourriture d’un pauvre, par jour.

40/ Qu’est-ce qui est recommandé pour le jeûneur?

• Tenir sa langue.
• Se hâter de rattraper les jours de jeûne dont il est tenu.

41/ Citer une référence concernant la question précédente.

Abou Houreyra – que Dieu l’ait en son agrément – a relaté que le Messager de Dieu a dit :

« Qui ne délaisse point le mensonge et sa pratique, Dieu n’a de toute façon aucunement besoin qu’il s’abstienne de nourriture et de boisson. » (Rapporté par al-Boukhâri, Abou Daoud et an-Nasâï).

42/ Quel caractère a le fait, pour le jeûneur, de goûter le sel?

Cela est non-souhaitable, de crainte qu’une partie arrive jusqu’à la gorge et annule ainsi le jeûne. Si toutefois, rien n’arrive jusqu’à la gorge, cela n’entraîne aucune conséquence pour lui.

43/ Qu’en est-il des gestes pouvant introduire l’acte sexuel, tels que le baiser et le badinage, durant le jeûne?

Cela est non-souhaitable pour le jeûneur, de crainte que cela n’attise son désir et n’entraîne l’annulation de son jeûne. Cela concerne la personne qui est sûre d’elle. Quant aux autres, cela leur est interdit.

44/ Qu’en est-il si le jeûneur émet une sécrétion prostatique (madhy [13]) suite à ce qui peut constituer un préliminaire à l’acte sexuel?

S’il s’agit seulement de la sécrétion prostatique (madhy), il sera tenu de rattraper le jour en question.

45/ Qu’en est-il s’il émet du sperme, suite aux préliminaires de l’acte sexuel?

Dans ce cas, il sera tenu du rattrapage (qadâ ‘) de ce jour de jeûne, ainsi que de l’expiation (kaffâra), du fait qu’il était déterminé dans l’annulation de son jeûne.

 

Notes :

[1] Ouvrage disponible en langue française sous le nom « Les 1000 Questions/Réponses sur les Pratiques Religieuses en Islam (Selon le rite malikite) » avec les annotations d’Azzedine Haridi, aux éditions Universel.

[2] 9ème mois lunaire.

[2] Coran, (2, 185).

[3] Lorsque le mois lunaire compte 30 jours et que la nouvelle lune n’a donc pas été vue le soir du 29.

[4] Cela concerne la personne qui n’a pas formé l’intention, au soir du 29 de cha’bân, de jeûner ou non, du fait que l’information sur la nouvelle lune ne lui soit point parvenue. Le Hadith précédent montre en effet qu’il ne faut pas précéder le jeûne de ramadan par le jeûne d’un ou deux jours.

[5] En fait, celles qui ont lieu de jour, dans ce cas.

[6] Il faut bien évidemment être Musulman.

[7] Rappelons que le jeûne a lieu de l’aube (fajr) au coucher du soleil (maghrib)

[8] C’est-à-dire n’atteignant pas la distance du voyage, d’environ soixante à quatre-vingts kilomètres, selon les avis dans l’école Malikite.

[9] Celui-ci désigne l’acte du brossage comme la brosse en elle-même, laquelle pouvait être un rameau d’arak, d’olivier …

[10] Un moudd (mesure faisant un peu plus d’un demi litre) de denrée.

[11] Coran : 2/ 184

[12] Ca l’est aussi pour le vieillard que le jeûne éprouve, mais ce dernier n’est pas tenu de rattraper le jour non jeûné.

[13] Liquide blanc et subtil pouvant être émis lors de l’érection. A la différence du sperme (many), il n’entraîne pas l’ablution majeure.