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Les Salafis

 

Le Défi Lancé Aux Salafis

 

– Le mythe Salafi de l’avis unique selon le Qour’an et la Sunnah –

 

 

Les Salafis attaquent le suivi des 4 écoles (Malikite, Shafé’ite, Hanbalite et Hanafite) en prétendant qu’il est préférable de suivre « le Qour’an et la Sunnah », comme si les 4 écoles étaient basées sur autre chose que sur le Qour’an et la Sunnah et comme s’il n’existait finalement sur chaque question qu’un seul avis qu’eux seuls détiendraient. Les Salafis ont ainsi trompés les Musulmans en créant l’illusion qu’ils seraient les dépositaires de LA compréhension unique et authentique du Qour’an et de la Sunnah. Derrière les slogans aguicheurs, que se cache-t-il réellement et sont-ils capables d’apporter les preuves de leurs allégations?

 

Les 4 écoles sont en vérité les écoles des Sahabas, elles découlent directement de leur compréhension et de leurs enseignements. Suivre les 4 écoles, c’est suivre le Qour’an et la Sunnah.

Les Salafis prétendent par leur méthodologie unir la Ummah sur un avis unique, supprimant au passage toute possibilité de divergence. En réalité, il ne s’agit que d’un leurre, car lorsqu’on y regarde de plus près, les Salafis ne sont pas un groupe uni, au contraire, ils sont divisés en sept sectes différentes (au minimum).

 

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Photo de la couverture de l’article

 

Dans une fatwa nommée « La prédication Salafis en désordre » [1], Al-Albani reconnait lui-même que la da’awa Salafi est désunie, divisée en groupes et factions, qu’elle est en désordre et part à la dérive à cause du grand nombre de membres qui malgré leur ignorance, se lancent dans la fatwa et se permettent de déclarer halal ou haram telle ou telle chose. Il y a là le triple aveux de la division, de la désunion et de l’ignorance.

Un autre sheykh Salafi nommé Zubair ‘Ali Zai, qui est très connu au Pakistan, a déclaré que rien qu’au Pakistan il existe au moins huit groupes différents de Salafis avec de nombreuses différences et divergences.

Tous ces groupes donnent des avis très différents et se combattent les uns et les autres, car bien entendu chacun se pense mieux guidé que l’autre et n’accepte pas qu’on le contredise ou qu’on puisse être en désaccord avec lui.

Rien que si vous prenez les avis des trois principales références de la da’awah Salafiyya, à savoir al-Albani, Ibn Uthaymeen and Ibn Baz, vous constaterez les innombrables divergences qui existent entre eux, à tel point que même dans la ‘Aqidah ils ne sont pas d’accord. Ceci  amena les Salafis à essayer de trouver quelle méthodologie pourrait bien mettre tout le monde d’accord, ce qui engendra encore davantage d’avis et donc de divergences.

Vous pouvez trouver quelques-unes de ces divergences dans un livre écrit par Sa’d ibn Abdillâh al-Buraykqui nommé « al-Ijaz fi ba’dh ma Ikhtalafa fihi al-Albani wa ibn Uthaymin wa ibn Baz » qui compte deux volumes et pas moins de 1222 pages! Et il ne s’agit là que d’un abrégé. Imaginez si on se mettait à écrire un livre exposant ce sur quoi chaque prédicateur Salafi a divergé… assurément, il faudrait une bibliothèque entière pour contenir toutes ces divergences.

 

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Couverture de « Al-Ijaz fima Ikhtalaf fihi al-Albani wa ibn Uthaymin wa ibn Baz »

 

Imaginez, ces trois références Salafis sont incapables de se mettre d’accord en termes de ‘Aqida, comme c’est rapporté dans le 3ème chapitre de l’ouvrage [2] qui expose quelques-unes de leurs divergences en la matière. De l’autre côté, les 4 écoles (Malikite, Shaféite, Hanafite et Hanbalite) n’ont aucune divergence en matière de ‘Aqida! Les savants des 4 écoles sont tous Ash’arites ou Maturidites, les deux écoles de Croyance d’Ahl as-Sunnah wa-l Jama’a, issues directement des Salafs as-Salihin et tous possèdent la même Croyance. Les seules divergences qui existent au sein de ces deux écoles sont minimes et uniquement sémantiques [3]. Les Salafis eux divergent sur le cœur même de la ‘Aqida. Qu’Allâh nous préserve d’un tel bricolage scientifique.

On a donc d’un côté des milliers et milliers de savants des 4 écoles qui sont en accord sur la ‘Aqida et possèdent la même Croyance sur plus de 1000 années et de l’autre à peine une dizaine de savants contemporains incapables de se mettre d’accord sur ce qu’est la Croyance Musulmane. On voit là de manière flagrante l’amateurisme et les limites de la méthodologie Salafi.

Au lieu d’importuner la Ummah en faisant la promotion d’une pseudo unification d’interprétation du Qour’an et de la Sunnah, les Salafis devraient en premier lieu s’occuper de donner ce conseil à leurs propres savants afin qu’ils commencent à se mettre d’accord entre eux sur leur croyance.

Al-HamduliLlâh, Ahl as-Sunnah wa-l Jama’a est préservé d’une telle errance dans la ‘Aqida.

Il est normal qu’il y ait des divergences dans le Fiqh, on retrouve d’ailleurs ces divergences saines au sein des 4 écoles, chacune pouvant avoir plusieurs avis sur une même question. Mais en terme de ‘Aqida, c’est tout simplement inconcevable et inacceptable.

Ces gens clament haut et fort suivre une seule et unique interprétation du Qour’an et de la Sunnah alors même que leurs savants sont incapables de se mettre d’accord sur une interprétation unifiée du Qour’an et de la Sunnah. C’est pourtant cette divergence qu’ils reprochent aux 4 écoles. La différence, c’est que les 4 écoles viennent directement de la compréhension et de l’enseignement des Sahabas, qu’elles ont directement été élaborées par des Salafs et que le travail considérable qui y a été effectué a ensuite été complété et affiné par des milliers de grands savants de ces écoles. De l’autre côté, la da’awah Salafi est constituée d’une petite poignée de savants contemporains, tristement connus pour ne pas rapporter leur science par chaine de transmission et qui se sont mis en marge de la Ummah tant dans sur la Croyance (‘Aqida) que dans la Jurisprudence (Fiqh) ou dans le rejet des sciences de la Tazkiyya (Purification).

 

Nous lançons maintenant un défi à ceux qui se réclament Salafis :

Conformément à vos prétentions, présentez-nous UNE SEULE ET UNIQUE interprétation du Qur’an et de la Sunnah sur laquelle vos savants soient en accord! On ne vous demande pas que cette interprétation soit celle de la Ummah entière, juste celle de vos savants de référence. C’est un défi vraiment simple pour un groupe minoritaire tel que le vôtre. Dépêchez-vous de relever ce défi, car al-Qiyamah (le Jour du Jugement) arrive à grand pas et vous n’aurez toujours pas relevé ce défi, inshaa Allâh.

 

Nous espérons que ceci suffira à éclairer les esprits et à réveiller les frères et sœurs endormis par le discours de la da’awah Salafiyya.

Nous espérons que vous aurez compris que les slogans tels que « akhy, akhy, il faut uniquement suivre le Qour’an et la Sunnah » ne sont que des mots et ne reflètent aucune réalité.

Qu’Allâh nous sauve de cette fitna
Qu’Allâh nous fortifie dans le suivi des grandes écoles
Qu’Allâh nous maintienne dans notre attachement à nos ainés bien guidés

 

PS : L’article est désormais également dispo en vidéo sur notre chaîne YouTube : https://www.youtube.com/watch?v=NLFBdfFqtv0

 

Notes :

Basé sur un travail de Sheykh Muhammad Yasir Al-Hanafi

[1] « The Salafi Da’wah is now in disarray », article de 5 pages écrit par Sheykh Nasir ad-Din al-Albani
[2] Page 53 du livre.
[3] Sémantique : Qui concerne le sens des mots.

L’Imam an-Nawawi était Ash’arite

 

– Une réfutation des fausses allégations –

 

Par Abu Layth ash-Shâfi’î [1]

 

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Au nom d’Allâh, le Très-Miséricordieux, le Tout Miséricordieux,
Une des allégations du mouvement Salafi [Wahhabi] est de déclarer que l’Imâm an-Nawawi (radhia Allâhou ‘anhou) n’était pas Ash’arite dans la croyance [‘Aqîda]. C’est un postulat supplémentaire dans leur tentative de réécrire l’histoire afin de la faire pencher en leur faveur. Avant de prouver que l’Imâm an Nawawi était bel et bien Asha’rite, nous devons analyser pourquoi les pseudo-salafis émettent de telles allégations. L’Imam an-Nawawi est un Mujtahid dans l’école Shafi’ite jouissant du plus haut rang, juste après l’Imam ash-Shafi’i ! L’Imam an-Nawawi est respecté par tous les savants Sunnites et même non-Sunnites! Ses ouvrages ont été lus, mémorisés et préservés par chaque génération venant après lui. Il est sans doute l’un des savants les plus connus et les plus présents à l’esprit de la communauté Musulmane. Son commentaire du « Sahih de Muslim » est considéré par beaucoup comme étant le meilleur commentaire de l’histoire de l’Islam. Son livre « al Majmu’ » est considéré comme le seul livre pouvant rivaliser avec al-Moughni d’Ibn Qudama. Si les pseudo-salafis prétendent qu’il est anthropomorphiste et en accord avec leur croyance littéraliste, c’est parce qu’ils ont en face d’eux un savant hautement respecté au sujet duquel il n’existe aucune divergence sur son rang élevé en Islam. C’est pour cette raison que le groupe déviant pseudo-salafi fait tout son possible, n’hésitant pas à utiliser le mensonge, pour prétendre que l’Imam an-Nawawi est un des « leurs ».

Passons en revue les allégations des pseudo-salafis (prétenduments suiveurs des Salafs) :
1) L’Imam an-Nawawi n’est pas cité [comme référence] dans le domaine de la ‘Aqida car il n’est pas en accord avec la méthode des pieux prédécesseurs [Salaf as-Salih] en matière de croyance. Ou en d’autres termes, il n’est pas en accord avec ce que l’intervenant estime être le credo d’Ahl us-Sunnah ! L’Imam An-Nawawi réfute lui-même cette allégation comme vous le verrez par la suite.
2) An-Nawawi aurait « réfuté » le kalam (ou ‘ilm al kalâm). Ils avancent pour cela le fait qu’un Ach’arite ne peut être qualifié ainsi qu’à partir du moment où il adopte le kalâm. Ce n’est pas tout à fait exact, vu qu’il est connu qu’il existe deux méthodes dans l’école des Ach’arites pour aborder le sujet des Attributs d’Allâh.

La position de l’Imâm an-Nawawi selon les gens de la Sunnah (Ahl us-Sunnah)
Il y a 3 façons de déterminer la croyance de l’Imâm an-Nawawi.
1) Analyser ce qu’on dit de lui ses contemporains, tels que ses étudiants, ses compagnons, les autres enseignants, etc…
2) Analyser ce qu’ont dit les savants qui sont venus après lui, concernant sa croyance et son statut chez les Sunnites.
3) Examiner ses ouvrages et déterminer ensuite sa position vis-à-vis du kalâm.
C’est ce que nous allons faire dans cet article.

Qu’ont dit ses étudiants, ses camarades et ses successeurs sur l’acceptation de sa Croyance ?
Le Sheykh ‘Alā’ud-Dīn ibn Al-‘Attār (d. 724 a.h), élève de l’Imām an-Nawawī et un de ses nombreux biographes, témoin de ses prodiges [karamāt] et qui a pris part à beaucoup de ses assises de science, a dit à son sujet :
« … Il était un Savant (‘Ālim), un Adorateur émérite (Rabbānī), sur qui les savants s’accordent concernant son savoir et son rang d’Imām… »
Il a dit aussi :
« Mon Sheykh m’a raconté qu’il donnait 12 cours par jour, afin de lire et d’expliquer à ses élèves les textes. Deux cours pour parler du « Wasit », un cours pour son « Muhadhhab », un cours pour les deux Sahih [i.e. Bukhari and Muslim], un cours spécialement pour le Sahih Muslim, un cours pour le « Luma’ » de ibn Al-Junni, un cours pour revoir Islah al-Mantiq [logique] de Ibn As-Sikkit رحمه الله, un cours sur la langue, un cours sur le Tasrif, un cours de Ussoūl al-Fiqh [fondements de la jurisprudence], un cours sur les « noms des hommes » dans le hadith [أسماء الرجال], et un cours sur les Ussoūul [fondements] de la Religion » [2]
Il a aussi rapporté à ses élèves les différents livres de hadith, comme le rapporte Ibn ‘Attar.
Il y a deux choses à retenir concernant ces paroles de Ibn ‘Attar :
1/ Il y avait un consensus à son époque concernant son rang d’Imâm et au sujet de sa science (alors que les wahhabi veulent nous faire croire qu’il n’est pas une référence en matière de croyance). Ibn ‘Attar exprime ici très clairement qu’il y avait ittifaq [agrément] des savants à propos de sa science, et qu’il était digne de confiance et qu’il comptait parmi ceux chez qui les gens prenaient la science. On reviendra sur ce point plus bas.
2/ Il apprenait et enseignait le kalam (voir l’introduction du  itab At-Tahqiq publié par la Dar Al-Jil page 18) et la logique [al mantiq], un fondement du Kalâm Sunnite. Dans le sunnisme, personne ne peut enseigner cette science sans être bien instruit à son sujet et sans la connaitre en profondeur. Ceci réfute les affirmations de ceux qui disent qu’il n’était pas un savant dans le kalam!

Le titre de Sheykh ul-Islam qui lui a été attribué à l’unanimité prouve que l’on peut prendre de lui dans la ‘Aqida et qu’il a enseigné des ouvrages Asha’rites
Les étudiants, compagnons et successeurs de l’Imâm an-Nawawi lui ont attribué le titre de “Sheykh ul-Islam”. Le titre de Sheykh ul-Islam démontre qu’il a maîtrisé toutes les sciences de l’Islam, et si tel est le cas, alors l’argument des pseudos-salafis selon lequel il n’est pas une référence en ‘Aqîda est rejeté, car ce statut donné par les savants prouve qu’il est une référence dans toutes les sciences. On peut souligner que nous parlons ici de l’agrément des savants Musulmans sur ce titre. Comme l’a remarqué l’Imam as-Sakhawi رحمه الله, il est vrai que certains individus ont exagéré dans l’éloge de quelques Savants en leur attribuant ce titre, sans qu’ils ne le méritent.
L’Imām as-Sakhāwī déclare que “Sheykh ul-Islām” désigne celui qui suit le Livre [Kitāab] et la Sunnah, qui a maîtrisé les Ussoūul [fondements] de la religion, qui s’est plongé en profondeur dans les différents avis qui existent entre les savants de façon à être apte à extraire les arguments légaux à partir des textes, et qui a compris les textes avec brio. [3]
Concernant l’Imam An-Nawawi, l’Imam ash-Sharif Muhammad ibn Al-Hasan Al-Wasiti al-Husayni رحمه الله (d. 776 A.H) a déclaré [4] :
« Le Sheykh, l’Imam, le ‘Alim [savant], le Rabbani, le Hafidh [maître des sciences du Hadith], le Faqih [juriste], le Sheykh ul-Islam de son époque, et d’après son époque. Il a fait partie des savants qui détenaient une connaissance immense et qui ont appliqué [leur savoir]. Il était du nombre des ascètes véridiques, des amis d’Allâh et de ceux qui le connaissent [‘arifin] … »
L’Imam Muhammad Al-Wasiti mentionne aussi ce qu’a dit Ibn Al-‘Attar de tous les cours qu’il avait dans une journée. Il précise qu’en matière de Ussoūl al-Fiqh il aurait passé en revue al-Luma’ de Abi Ishaq et le Muntakhi de l’Imam Fakhrud-Din ar-Razi رحمه الله, et pour les Ussoūl ad-Din, le Irshad de l’Imam al-Haramayn al-Juwayni رحمه الله! Le titre arabe complet du Irshad est : al-Irshad ila qawati’ Al-Adillat fi Usual al-’Itiqad. Le Irshad est un texte de Théologie Sunnite (Kalam) d’un niveau assez avancé écrit par l’un des Maîtres Asha’rites, l’Imam Al-Haramayn Abdul Malik Al-Juwayni, un livre maitrisé, enseigné et propagé par l’Imâm an Nawawi dans ses assises de Science.
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Trois points sont à retenir des textes ci-dessus, concernant notre discussion :
1/ L’Imam an-Nawawi a appris et a enseigné des textes Asha’rites, plus précisément de l’Imam al-Haramayn, et a reçu des ijazaat (permissions d’enseigner). C’est une preuve claire qu’il soutenait l’école Asha’rite, vu qu’il aurait aisément pu apprendre et enseigner d’autres ouvrages.
2/ Il a maîtrisé le Kalam, car enseigner le Irshad nécessite d’atteindre le niveau de Mutakallim (maître du kalâm, théologien) pour l’enseigner correctement! C’est la raison pour laquelle il a reçu de la masse des Musulmans de son époque l’agrément en ‘Aqidah et qu’ils n’ont pas contesté le fait qu’il enseigne ce type de travaux et est attesté qu’il (rahmatullâh ‘alayh) a clairement promulgué les positions de l’école Asha’rite.
3/ Il était un Maître de toutes les sciences de la religion, y compris des Ussoūl ad-Din (Les principes fondamentaux de la religion), science communément nommée ‘Aqida. Ce point réduit à néant l’argument des pseudos-salafis disant qu’il n’est pas une référence dans cette science ! Il a été appelé « Sheykh ul-Islam » par ces contemporains, ses étudiants et ceux qui lui ont succédé.
Parmi ceux qui lui ont attribué le titre de « Sheykh ul-Islam », nous pouvons citer entre autres l’Imam as-Sakhawi (Hayat Al-Imam an-Nawawi), l’Imam as-Suyuti [qui lui-même a reçu ce titre par d’autres savants] (voir Minhaj as-Sawi), l’Imam as-Subki dans ses Tabaqat, l’Imam Ibn Qadi Shuhbah et bien d’autres encore.

Ses positions dans la ‘Aqîda correspondent parfaitement à l’école d’Abul-Hasan Al-Asha’ri
L’Imam as-Subki stipule qu’il existe deux méthodes dans l’école d’Abul Hasan Al-Asha’ri concernant les Sifat d’Allâh (attributs), qu’il a également attribué à l’Imam al-Juwayni dans son ouvrage Risalat an-Nithamiyyah :
1/ Al-Imrar (passer sur les textes comme ils sont parvenus, sans en aborder le sens) et laisser la compréhension/le sens de ces textes à Allâh, tout en reniant tout ce qui ne sied pas à Allâh comme la ressemblance avec les créatures, l’anthropomorphisme, etc… Cette méthode est communément appelée at-Tafwid.
2/  At-Ta’wil qui consiste à interpréter les textes qui sont problématiques (ambigus) dans le sens où leur lecture littérale entraine l’anthropomorphisme, tout en restant en accord avec ce qui est connu dans la langue Arabe. [5]
L’Imam An-Nawawi a suivit ces deux chemins disant qu’ils étaient tous deux la voie des Salaf [pieux prédécesseurs], concernant les textes. Il n’a jamais dit qu’il fallait prendre ces textes au sens littéral strict, comme le disent les pseudo-salafis, et il a même renié cela, comme nous allons le voir plus bas. Vous verrez aussi que l’Imam an-Nawawi a utilisé le kalam (credo et preuves rationnelles) pour réfuter les anthropomorphistes.
Voici le commentaire qu’il fait concernant la « descente » d’Allâh (an-nouzoûl) [6] :
هذا الحديث من أحاديث الصفات، وفيه مذهبان مشهوران للعلماء: أحدهما وهو مذهب السلف وبعض المتكلمين أنه يؤمن بأنها حق على ما يليق بالله تعالى وأن ظاهرها المتعارف في حقنا غير مراد، ولا يتكلم في تأويلها مع اعتقاد تنزيه الله تعالى عن صفات المخلوق وعن الانتقال والحركات وسائر سمات الخلق، والثاني مذهب أكثر المتكلمين وجماعات من السلف وهو محكي هنا عن مالك والأوزاعي على أنها تتأول على ما يليق بها بحسب مواطنها، فعلى هذا تأولوا هذا الحديث تأويلين أحدهما: تأويل مالك بن أنس وغيره، معناه تنزل رحمته وأمره وملائكته، كما يقال فعل السلطان كذا إذا فعله أتباعه بأمره، والثاني: أنه على الاستعارة ومعناه الإقبال على الداعين بالإجابة واللطف.
« Ce hadith fait partie de ceux qui traitent des attributs d’Allâh. Il y a au sujet de ces hadith, deux voies principales (madhhab) au sujet de la croyance, que nous avons déjà clarifié dans le livre au sujet de la Foi [c.a.d. le chapitre de la Foi dans le recueil de hadith de Muslim], et le résumé en est :
1/ L’un de ces madhhabs est celui de la plupart des Salafs, et de quelques-uns des Mutakallimin [c’est-à-dire des théologiens, qui sont venus après le salaf], qui consiste à croire en ces textes comme étant véridiques, en fonction de ce qui convient à Allâh, et que leur sens apparent (dhahiriha) que nous connaissons, n’est pas le sens visé, et évitant de parler de son interprétation, avec la conviction que Allâh est exempt des attributs des créations, et entièrement exempt du mouvement, du déplacement, et du reste des autres états de la création.
2/ La seconde voie est le madhhab de la plupart des Mutakallimin et d’une partie du Salaf, et qui est rapportée de Mālik, et d’al-Awza’i. Elle consiste à interpréter les textes en fonction de ce qui est digne de Allâh. Ils l’ont fait et ils ont interprété ce hadith avec deux explications : l’une d’entre elles est un ta’wil (interprétation) par Mālik ibn Anas et d’autres, qui a dit : « il s’agit de Sa Miséricorde (Rahmah), Son Ordre (amr) et Ses anges qui descendent, comme on peut dire: “le Sultan a fait ceci” alors que cela a été fait effectivement par des personnes sous son commandement [et non par lui personnellement] ». Le deuxième type d’explication est que ceci est au sens figuré, c’est-à-dire que le sens serait que ceux qui L’invoquent seront acceptés et qu’il seront exaucés et recevront des “bonnes choses” (al-lotf) de la part d’Allâh. » [7]
Remarquez que l’Imam an-Nawawi rejette complètement le sens littéral, qui est la méthode empruntée par les pseudo-salafis, concernant la « descente » d’Allâh, et dit que la voie des Salafs et des Mutakallimin se limite au tafwid et au ta’wil. Notez qu’ici il adopte uniquement les deux méthodes de l’école Ash’arite (ndt : celle des Salafs et de leurs successeurs), rejetant tout autre façon d’aborder la chose, comme l’indique sa parole “deux opinions”… En d’autres termes, rien d’autre !
L’Imam an-Nawawi a cité également l’Imam Malik ailleurs dans son commentaire du Sahih de Muslim concernant la question de la « descente » d’Allâh,
فقد سئل الإمام مالك رحمه الله عن نزول الرب عزّ وجلّ، فقال “ينزل أمره تعالى كل سَحَر، فأما هو عزّوجلّ فإنه دائم لا يزول ولا ينتقل سبحانه لا إله إلى هو
L’Imam Malik fut questionné concernant la « descente » d’Allâh et il dit : « Allâh, Majestueux, Son ordre (commandement) descend chaque nuit, et comme pour Allâh ‘azza wa jall, il est éternel, il ne bouge pas, ni ne se déplace, qu’Il soit glorifié, et il n’y a point de divinité en dehors de Lui ! » [6/37]
Quant il a été questionné sur  le hadith de la femme esclave (ou hadith de la servante), laquelle à la question « Où est Allah ? » aurait répondu par « dans le ciel », l’Imam Malik a déclaré :
هذا الحديث من أحاديث الصِّفات، وفيها مذهبان تقدَّم ذكرهما مرَّات في كتاب الإيمان: أحدهما : الإيمان به من غير خوض في معناه، مع اعتقاد أنَّ الله ليس كمثله شيء،وتنزيهه عن سمات المخلوقات.
والثَّاني:تأويله بما يليق به. فمن قال بهذا – أي التأويل – قال: كان المراد امتحانها هل هي موحِّدة تقرُّ بأنَّ الخالق المدبِّر الفعَّال هو الله وحده، وهو الَّذي إذا دعاه الدَّاعي استقبل السَّماء، كما إذاصلَّى المصلِّي استقبل الكعبة،وليس ذلك لأنَّه منحصر في السَّماء، كما أنَّه ليس منحصراً في جهة الكعبة، بل ذلك لأنَّ السَّماء قبلة الدَّاعين، كما أنَّ الكعبة قبلة المصلِّين.
أو هي من عبدة الأوثان العابدين للأوثان الَّتي بين أيديهم، فلمَّا قالت: في السَّماء علم أنَّها موحِّدة وليست عابدة للأوثان.
« Ce hadith fait partie des hadiths sur les attributs d’Allâh. Il a suscité deux opinions (madhhab) que j’ai toutes deux mentionnées dans le chapitre de la Foi. La première est d’y croire sans en chercher le sens, tout en gardant à l’esprit que rien n’est semblable à Allâh et qu’Il est exempt des attributs propres aux créatures. Et la seconde opinion consiste à interpréter d’une façon qu’il Lui sied. » [… puis il cite les interprétations …] » [8]
Encore une fois ici, l’Imam an-Nawawi ne fait aucune mention de l’école des littéralistes qui s’engouffrent dans le sens littéral des textes et qui affirment ceci pour Allâh! L’Imam cite seulement les deux méthodes qui sont conformes à l’école Ash’arite!
Il dit également dans son commentaire (Sharh) du Sahih de Muslim :
إن الله تعالى ليس كمثله شيء وإنه منزّه عن التجسيم والانتقال والتحيز في الجهة وعن سائر صفات المخلوق
« Certes rien n’est semblable à Allâh ta’ala, il est exempt du tajsim (corporalité), du déplacement, et de la localisation, et du reste des attributs propres aux créatures. » [3/19]
C’est exactement les termes de l’école Ash’arite dans leurs textes quand il est question d’Allâh.
Et c’est en contradiction totale avec la croyance d’Ibn Taymiyya رحمه الله qui déclarait ne pas nier le “jism“ [le corps/la corporalité] pour Allâh. Il a dit :
« Il est bien connu que le Livre (Qour’an), la Sunnah, et le Consensus ne mentionne nulle part que tous les corps [ajsaam] sont créés, et il est dit nulle part qu’Allâh Lui-même n’est pas un corps ! Ni aucun des Imams parmi les Musulmans n’a jamais dit une telle chose. Par conséquent, si je choisis également de ne pas le dire, ça ne m’expulse pas de la fitra ni de la Shari’ah! ». [9]
De telles absurdités ne font que démontrer l’ignorance d’Ibnou Taymiyya en matière de ‘Aqida. Il est dit dans « Le Livre » qu’Allâh n’est pas un corps quand Il dit « Rien ne lui est semblable, et Il est As-Sami’ al-Basir! ». C’est un verset qui rejette toute notion de similitude entre Allâh et la création! Pour la raison que le jism [corporalité/corps] est un attribut des créatures, et constitue un tamthil [ressemblance]. Allâh ne s’est jamais attribué un corps [jism], alors qu’Ibn Taymiyyah est plus qu’heureux de lui en attribuer un, qu’Il soit Exalté de ce que ces gens déviants lui ont attribué !
Allâh a dit dans le Qour’an :
فَمَنْ أَظْلَمُ مِمَّنِ افْتَرَىٰ عَلَى اللَّهِ كَذِبًا أَوْ كَذَّبَ بِآيَاتِهِ
« Qui est plus injuste que celui qui forge des mensonges sur le compte de Allâh, ou qui traite Ses signes d’imposture? » [10]
Le Qour’an affirme donc qu’Il n’est pas un corps. Une question reste à poser aux partisans du Tajsîm (car c’est clairement du tajsîm) : Où Allâh s’est-Il donc attribué un « corps » ? Quelle preuve avez-vous ? Ou bien est-ce dû au fait que vous preniez les versets parlant de « main », « tibia », « hauteur », « pied », « œil » au sens littéral, imaginant ainsi Allâh à la manière des chrétiens païens, comme un corps [jism], mais différents des autres corps. En d’autres termes, avec une main plus grande que celle des humains. Ces gens ont inventé un mensonge sur Allâh en Lui attribuant de qu’Il a rejeté pour Lui-même! [11]
L’Imam an-Nawawi est à l’opposé de la croyance d’Ibn Taymiyyah. En fait, l’Imam an-Nawawi ne reconnait même pas l’école [méthodologie] d’Ibn Taymiyyah comme faisant partie d’Ahl us-Sunnah, comme vous pouvez le voir dans son commentaire du Sahih de Muslim, où il rejette le sens littéral et ce qu’il laisse entendre.
L’Imam an-Nawawi dit aussi dans son Sharh (commentaire) du Sahih de Muslim :
من العلماء من يمسك عن تأويلها ويقول نؤمن بأنها حق وأن ظاهرها غير مراد ولها معنى يليق بها وهذا مذهب جمهور السلف
وهو أحوط وأسلم والثاني أنها تتأول على حسب ما يليق بتنزيه الله تعالى وإنه ليس كمثله شيء
« Et parmi les savants il y a ceux qui s’abstiennent de faire le ta’wil [interprétation] et qui disent  : « nous croyons que c’est la vérité et que le sens littéral n’est pas celui visé, et que la signification [le sens] est celui qui sied à Sa Majesté et c’est là la voie de ma majorité des Salafs, et cette voie est la plus sûre et la plus saine ». La seconde méthode est celle qui consiste à interpréter les textes d’une manière qui convient à Sa Majesté, en rejetant toute imperfection au sujet d’Allâh ta’ala, et en se rappelant que « Rien n’est tel que lui »! » [16/166]
L’Imam an-Nawawi cite également l’Imam al-Mazari رحمه الله, le Malikite Asha’rite, en réfutation de la croyance d’Ibn Qutaybah selon laquelle Allâh procède une « image pas comme les autres images », en se basant sur le hadith qui dit « Allâh a créé Adam à Son image… ».
Il déclare :
ال المازري وقد غلط بن قتيبة في هذا الحديث فأجراه على ظاهره وقال لله تعالى صورة لا كالصور وهذا الذي قاله ظاهر الفساد لأن الصورة تفيد التركيب وكل مركب محدث والله تعالى ليس بمحدث فليس هو مركبا فليس مصورا قال وهذا كقول المجسمة جسم لا كالأجسام لما رأوا أهل السنة يقولون الباري سبحانه وتعالى شئ لا كالأشياء طردوا الاستعمال فقالوا جسم لا كالأجسام والفرق أن لفظ شئ لا يفيد الحدوث ولا يتضمن ما يقتضيه وأما جسم وصورة فيتضمنان التأليف والتركيب وذلك دليل الحدوث قال العجب من بن قتيبة في قوله صورة لا كالصور مع أن ظاهر الحديث على رأيه يقتضي خلق آدم على صورته فالصورتان على رأيه سواء فإذا قال لا كالصور تناقض قوله ويقال له أيضاً إن أردت بقولك صورة لا كالصور أنه ليس بمؤلف ولا مركب فليس بصورة حقيقة وليست اللفظة على ظاهرها وحينئذ يكون موافقا على افتقاره إلى التأويل واختلف العلماء في تأويله فقالت طائفة الضمير في صورته عائد على الأخ المضروب وهذا ظاهر رواية مسلم وقالت طائفة يعود إلى آدم وفيه ضعف وقالت طائفة يعود إلى الله تعالى ويكون المراد إضافة تشريف واختصاص كقوله تعالى ناقة الله وكما يقال في الكعبة بيت الله ونظائره والله اعلم
Il rejette l’approche littéraliste de ce hadith, comme celle d’Ibn Qutaybah رحمه الله. Remarquez qu’il utilise le kalâm Sunnite des Asha’rites qui dit qu’une « image » implique automatiquement le tarkib [être composé d’éléments ou de parties] et tout ce qui a un tarkib est muhdath [crée], et Allâh ta’ala n’est pas créé. C’est ici un argument de Kalâm rationnel et c’est une autre preuve contre les anthropomorphistes, et il est utilisé ici par l’Imam an-Nawawi pour réfuter cet insolent credo!
Un autre texte très clair de l’Imam an-Nawawi professe le credo Asha’rite vis-à-vis des Attributs d’Allâh dans son œuvre monumentale « al-Majmu‘ ».
Il y déclare :
اختلفوا في آيات الصفات وأخبارها هل يخاض فيها بالتأويل أم لا؟ فقال قائلون تتأول على ما يليق بها، وهذا أشهر المذهبين للمتكلمين، وقال آخرون: لا تتأول بل يمسك عن الكلام في معناها ويوكل علمها إلى الله تعالى ويعتقد مع ذلك تنزيه الله تعالى وانتفاء صفات الحوادث عنه، فيقال مثلاً: نؤمن بأن الرحمن على العرش استوى، ولا نعلم حقيقة معنى ذلك والمراد به، مع أنا نعتقد أن الله تعالى ليس كمثله شيء، وأنه منزه عن الحلول وسمات الحدوث، وهذه طريقة السلف أو جماهيرهم وهي أسلم
« Il y a une divergence concernant les versets traitant des attributs d’Allâh et leur narration. Doit-on les interpréter ou non ? Une partie des savants disent qu’ils doivent être interprétés en accord avec ce qui sied à Allâh, et c’est l’opinion la plus répandue parmi les deux écoles des Mutakallimīn. L’autre groupe soutient qu’on ne doit pas interpréter,  et qu’on doit plutôt s’abstenir de parler des significations et de confier le sens à Allâh tout en croyant en l’absence d’attributs propres aux créatures à Son sujet. Ils disent par exemple « Nous croyons que ar-Rahman ‘alal ‘arsh istâwa – [littéralement traduit par : « le Miséricordieux s’est Etablit sur le Trône »], et nous ne connaissons pas la réalité du sens visé par ces paroles, et nous y croyons tout en croyant également que rien n’est tel que Allâh, et qu’Il n’est pas concerné par le Hulūl et les caractéristiques des choses créées [al-hudūth], et c’est la voie des Salafs, en majorité, et c’est la voie la plus sûre. »
Al-Hulul est le fait de « résider dans » ou l’incarnation du Divin dans une chose créée, qu’il s’agisse d’un endroit ou d’une qualité. On retrouve ici encore citées les deux écoles [méthodes] des Ash’arites, qui sont le « tafwid » et le « ta’wil », ainsi que le rejet (à nouveau) du sens littéral. Regardez comme Sheykh ul-Islam l’Imam an-Nawawi emprunte l’école des pieux Salafs (le tafwid), et non la voie des littéralistes!
Une autre preuve indiquant l’Ash’arisme de l’Imam an-Nawawi est l’ éloge qu’il fait de l’école d’Abul Hasan al-Asha’ri dans « Tahdhib al-Asma’i wal-Lughat », dans son introduction concernant Ustadh Abū Isḥāq Al-Isfrā’īnī رحمه الله :
وكان الأستاذ أحد الثلاثة الذين اجتمعوا في عصر واحد على نصر مذهب الحديث والسنة في المسائل الكلامية , القائمين بنصر مذهب الشيخ أبي الحسن الأشعري , وهم الأستاذ أبو إسحاق الإسفراييني والقاضي أبو بكر الباقلاني والإمام أبو بكر بن فورك
« Ce professeur [Ustadh Abū Isḥāq Al-Isfrā’īnī] était l’une des trois personnes qui ont se sont réunie à l’époque pour secourir le madhdhab du Hadīth et la Sunnah dans les questions de Kalām, et ils ont été constants dans leur support de l’école du Sheykh Abil Hasan Al-Asha’rī  et ils [les trois] étaient al Ustādh Abū Isḥāq Al-Isfrā’īnī, le Qāḍī Abū Bakr al-Bāqilānī, et l’Imām Abū Bakr ibn Fūrak. »
L’Imam an-Nawawi décrit ici l’école Ash’arite comme « le madhhab du hadith et de la Sunnah dans les questions de Kalam », il s’agit là d’un éloge évident en faveur de l’école Ash’arite.

Conclusion : Les Déclarations l’Imam Adh-Dhahabi et de l’Imam as-Sakhawi
L’Imām adh-Dhahabī رحمه الله a dit dans son « Tārīkh al-Islām » concernant l’Imām an-Nawawī :
إن مذهبه في الصفات السمعية السكوت ، وإمرارها كما جاءت ،وربما تأول قليلاً في شرح مسلم.
« En vérité, son école [sa méthodologie] pour aborder les attributs était as-sukūt [de rester silencieux]. Ils les citaient comme ils sont venus et il les a interprété un petit nombre de fois dans son commentaire du Saḥīḥ de Muslim! »
L’Imam As-Sakhawi a cité ces mêmes paroles et a ensuite ajouté [dans sa biographie de l’Imam An-Nawawi] :
كذا قال، و التأويل كثير في كلامه
« C’est ce qu’il disait! Et on trouve beaucoup de ta’wīl (interprétations) dans ses paroles ! »
Il a également dit page 36,
وصرح اليافعي والتاج السُّبكي  رحمهما الله  أنه أشعري
« Il était Ash’arite comme l’ont rapporté l’Imam al-Yafi’i et At-Taj As-Subki [qu’Allâh leur fasse miséricorde] »
Et les mots exacts d’as-Subki dans ses « Tabaqat ash-Shafi’yya » sont :
فإن النووي أشعري العقيدة
« … et en vérité, An-Nawawi était Ash’arite dans la ‘Aqîda! »

Une réponse à une affirmation des pseudos-Salafis
Nous sommes tombés sur un article qui présupposait que l’Imam an-Nawawi ne pouvait être Asha’rite car il a critiqué certains des Mutakallimin (ceux qui utilisent le kalam) qui ont dit qu’il est nécessaire d’utiliser le kalâm pour atteindre la connaissance d’Allâh. L’Imam an-Nawawi a violemment critiqué cette position, aucun doute là-dessus et il a précisé que ce n’est pas la position de la majorité. Cependant, sa condamnation de ces Mutakallimin soutenant cet avis prouve également que l’Imam an-Nawawi était un Asha’rite et un Mutakallim.
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 » … et cette opinion (qawl) est tenue par plusieurs Mu’tazilites, et certains de nos compagnons Mutakallimin, et il s’agit d’une erreur évidente … »
Il qualifie ici les « Mutakallimin » comme étant « ses compagnons ». L’Imam an-Nawawi dans son Majmu’ utilise le terme “As-habnaa” pour qualifier les gens de son école (Shafé’ite) et il utilise la même formule ici pour son école Ash’arite! C’est clairement une déclaration d’appartenance à la même école de kalâm!
Et il a utilisé ce terme à plusieurs reprises dans son Sharh du Sahih de Muslim. Il dit à un autre endroit :
ومنها إثبات كرامات الأولياء وهو مذهب أهل السنة خلافاً للمعتزلة ، وفيه أنّ كرامات الأولياء قد تقع باختيارهم وطلبهم ، وهذا هو الصحيح عند أصحابنا المتكلمين
« … et ceci [dans le texte] est l’affirmation des prodiges [karamât] des amis d’Allâh [awliya’] et c’est le madhhab d’Ahl us-Sunnah, en opposition avec le credo Mu’tazilite […] et c’est l’opinion correcte [sahih] selon nos compagnons Mutakallimin! »
Il dit également dans son Sharh al Muhadhhab :
قال أصحابنا المتكلمون
« Nos compagnons Mutakallimin ont dit » (1/174)
Ceci concorde complètement avec tout ce que nous avons démontré et avancé tout au long de cet article ; c’est-à-dire que l’Imam enseignait le Kalam, l’utilisait et approuvait la méthode des Asha’rites. Il suffit pour vérifier cela de regarder dans son Sharh (commentaire) du Sahih Muslim et dans son « al Majmu’ » la manière dont il traite des Attributs d’Allâh. Il est, sans aucun doute, comme l’ont dit les Imams al-Yafi’i et Taj As-Subki, un Imam Asha’rite!
Tout ceci prouve clairement que les salafis ont menti sur l’Imam an-Nawawi – tout comme certains d’entre eux ont coupé des pans entiers dans ses ouvrages comme dans les Adhkaar! Cela est pour eux une nécessité compte tenu du fait que les Imâms de l’Islam n’ont pas la même croyance qu’eux, ils doivent donc déformer (ou supprimer) les paroles et opinions de ces Imams pour justifier leurs tendances anthropomorphistes! Mais Allâh a dit : « La malédiction d’Allâh est sur les menteurs » !

L’Imam An-Nawawi a mis en garde les profanes sur l’apprentissage du Kalâm Sunnite
L’Imam an-Nawawi, tout comme l’Imam al-Ghazzali, a mis en garde les gens de la masse (non avertis) sur le fait de plonger dans le kalâm, sans qu’il n’y ait une nécessité (pour dissiper un doute à ce sujet par ex.).
Voici les paroles de l’Imâm an Nawawi, traduites par le Sheykh Asha’ri et Sufi Nuh Keller dans son ouvrage « Reliance of the Traveller ». (Les « A » entre crochets [] sont les commentaires du Sheykh Abdul-Wakil Durubi).
« Comme pour les obligations de base de l’Islam, et ce qui concerne les principes de la foi, toute personne doit croire avec conviction ce qu’a rapporté le Messager d’Allâh sans émettre aucun doute à ce sujet. Quiconque procède ainsi n’est pas tenu d’apprendre les preuves de la scolastique. Le Prophète n’a exigé pas exigé davantage que ce que nous avons mentionné, ni d’ailleurs les 4 premiers Califs, ni les autres compagnons du Prophète, ni les premières générations de Musulmans venus juste après eux. Il convient plutôt au commun des gens et à la grande majorité de ceux qui apprennent la Science Sacrée d’éviter de discuter des subtilités de la théologie scolastique, de peur qu’une corruption difficile à éliminer prenne place dans leurs convictions religieuses de base. Il est plutôt préférable pour eux de se limiter de ce qu’on a mentionné plus haut avec certitude. Notre Imam Shafi’i a même été plus loin en disant que s’engager dans la théologie scolastique est interdit. [A : Il est ici question de la théologie scolastique hérétique qui proliférait à son époque et plaçait les théories rationnelles au dessus du Qour’an et de la Sunnah, et non la science de la théologie (`ilm al-tawhid) avec laquelle les savants Ash’arites et Maturidites ont clarifié et détaillé les principes de la foi de l’Islam Sunnite qui constitue une part importante des sciences Islamiques]. Il a insisté sur son interdiction, sur la punition sévère qui attend ceux qui s’y engagent, sur la disgrâce de s’y adonner et sur l’énorme péché que cela représente. Il a dit :
« Il est meilleur pour un serviteur de rencontrer Allâh avec n’importe quel péché hors idolâtrie (shirk) que de Le rencontrer coupable de théologie scolastique »
Il existe d’autres paroles, nombreuses et bien connues, dans lesquelles il exprime la même opinion. Mais si quelqu’un à des doutes [qu’Allâh nous en préserve] sur un des principes de la foi dont la croyance est obligatoire et que ces doutes ne peuvent être effacés par un autre moyen que l’étude des preuves des théologiens alors il devient obligatoire pour la personne d’apprendre afin de dissiper ces doutes et d’acquérir une croyance correcte sur cette question.
Un cas similaire a été rapporté par un élève de l’Imām ash-Shāfi’i (l’Imam al-Muzanī), qui démontre à la fois la nécessité de défendre la vérité de manière équivalente et dans les différences d’intelligence et de compréhension qu’Allâh a octroyée :
« J’ai débattu avec un homme qui m’a posé des questions qui m’ont fait douter dans ma religion. Je suis allé voir l’Imam ash-Shafi’i et je lui ai exposé l’affaire. Il m’a dit : « Où es-tu ?! », j’ai répondu « dans la mosquée ! ». Il m’a dit : « Non ! Tu es à Taran [un tourbillon dans la mer Rouge] et ces vagues se sont écrasées sur toi ! C’est la question favorite des athées et de leurs pairs [puis il donna à l’Imam Muzani la réponse]. Il vaut mieux pour un homme d’être jugé avec tous les maux de la terre que d’être jugé avec du Kalâm! »
L’Imam Al-Bayhaqi رحمه الله a commenté cette histoire dans son « Manāqib » :
« Ceci démontre l’excellente connaissance de l’Imam ash-Shāfi’i sur la de la question et l’obligation d’exposer les ambiguïtés des athées en cas de besoin. Par le mot kalam, il vise l’athéisme des athées et les hérésies des innovateurs, et Allâh est plus Savant! » [12]
Ainsi, lorsque le besoin s’en faisait sentir, l’Imam An-Nawawi ne se contente pas de recommander Kalam, il le rend wâjib [obligatoire] ! Que ceux qui disent que l’Imam an-Nawawi n’était pas Asha’rite méditent là-dessus : il a rendu obligatoire le Kalâm Sunnite des Ash’arites quand cela a été nécessaire [13], alors comment pourrait-il le considérer comme illégitime alors qu’il l’a rendu par ailleurs obligatoire en cas de besoin? L’Imam an-Nawawi était bel et bien un Asha’rite, qui a supporté cette école, utilisé ses preuves et ses travaux. Il a été cité par les savants de cette école et a déclaré qu’il était nécessaire d’apprendre les arguments si besoin.
Et notre succès suprême est auprès d’Allâh!
Que les bénédictions d’Allâh soient sur le Prophète Muhammad (salallâhou ‘alayhi wassalaam), sa famille et ses disciples ! Ameen.

Notes :
[1] Le frère Abu Layth ash-Shâfi’î est étudiant en Sciences Islamiques et également webmaster du site www.Shafiifiqh.com.
Article traduit en collaboration avec l’équipe francophone de Shafiifiqh (Ilhem Al-Mâlikiyya). Baraka Allâhou fikoum.
[2] Al-Minhaj As-Sawi fi Tarjamat Imam An-Nawawi, pages 57-60
[3] Al-jawahir wad-durar
[4] Al-Matalib Al-’Aliyyah fit-Tabaqat ash-Shafi’iyya
[5] Tabaqat Ash-Shafi’iyyah 5/191
[6] Sharh du Sahih de Muslim
[7] Sharh Sahih Muslim – Kitab Salat al-Musafirin
[8] Pour plus d’information sur le hadith de la servante, appelé aussi hadith de la femme esclave, lire l’article se trouvant ICI 
[9] At-Ta’sis 1/118
[10] Qour’an, sourate 7, verset 37
[11] Ceci est confirmé par ce récit, rapporté par le Sheykh Nuh Ha Mim Keller, dans lequel Mawlana Abdullâh Kakakhail, un savant d’Islamabad spécialiste de la Croyance Islamique (usûl ad-din) raconte une discussion qu’il a eue alors qu’il était étudiant, avec le vice-recteur de l’Université Islamique de Médine en 1966. Mawlana se souvient avoir parlé avec le vice-recteur des  mutashabihat, c’est-à-dire des versets Coraniques et hadiths dits « équivoques ». Lorsqu’ils en sont arrivés à parler de la « Main » d’Allâh, Mawlana déclara au vice-recteur, « Vous dites que  la main est connue, mais que son comment (kayf) est inconnu ». « Que signifie donc l’inconnu de ce comment ? » Le vice-recteur répondit : « Cela signifie que nous ne savons pas si la main est noire ou blanche, ni si elle est longue ou courte ». Ce vice-recteur se nommait Ibn Baz, et c’est ce qui était proposé à l’époque comme da’wa (appel à l’Islam) – c’est-à-dire une croyance (‘Aqida) semblable à celle qui inspira le plafond de la chapelle Sixtine.
[12] Manaqib Al-Imam Ash-Shafi’i page 458
[13] Pour plus d’informations sur l’école Ash’arite et son histoire, lire l’article suivant : Introduction à la croyance ash’arite « l’école du tawhîd sunnite »

Les Salafis sont-ils majoritaires dans le monde Musulman ?

Réponse du Mufti Muhammad ibn Adam al-Kawthari

  masjid-kristal

 

 

Question :

Je vis en Angleterre et je me sens vraiment déprimé. Partout où je me rends, je ne rencontre que des salafis et des gens ayant un penchant pour le salafisme. Ces deux dernières années, j’ai cherché à me marier, mais là aussi, le résultat est identique.

Je me suis alors senti perdu et très isolé. J’ai appris que la voie traditionnelle est celle de la majorité, mais mon expérience personnelle me démontre le contraire.

Je suis séduit par la relative ouverture d’esprit et par la voie spirituelle de ces savants qui appellent au chemin traditionnel. Cependant, je n’arrive pas à rencontrer de telles personnes. Au contraire, je ne croise ici que des esprits étriqués, comme les salafis et comme ceux qui attaquent les autres Musulmans (qui suivent une école de Jurisprudence et la ‘Aqida Maturidi) à cause d’avis tels que celui de la non-célébration du Mawlid, etc.

J’ai rencontré des Musulmans du Moyen-Orient et ils sont également portés vers le salafisme. Il semblerait que seuls les Musulmans du sous-continent indien ne le soient pas.

Comment puis-je être certain que la voie que j’ai choisie soit la bonne? Le fait que les salafis/wahhabis aient le contrôle des deux villes Saintes, ne signifie-t-il pas que Allâh les a favorisés? J’étais persuadé que l’innovation (bida’a) ne pouvait pas exister à Médine.

Je m’excuse si ces questions peuvent sembler un peu étranges, mais je suis très perturbé et cela commence à affecter ma santé mentale.

Réponse :

Au nom d’Allâh, le Tout Miséricordieux, le Très Miséricordieux,

C’est juste que vous avez eu la malchance de rencontrer les mauvaises personnes. Il est inexact de dire que la majorité des Musulmans sont des Salafis et que seuls les Musulmans du sous-continent indien ne le sont pas. Le fait est que, plus de 85% des Musulmans suivent le chemin traditionnel de l’orthodoxie Sunnite du courant majoritaire d’Ahl al-Sunna wa al-Jama’a. C’est le chemin suivi depuis plus de mille ans et ce n’est que récemment (au cours des 30 dernières années) que la secte (dite) Salafi est apparue.

La majorité des Musulmans d’Inde, du Pakistan, des Émirats arabes unis, d’Asie, de Turquie, de Syrie, d’Irak, et de nombreux autres pays suivent le Madhab (l’école) Hanafi. Les Musulmans d’Indonésie, de Malaisie, du Sri Lanka, du Yémen, d’Égypte et d’une partie de la Syrie suivent généralement l’école Shafi’ite. L’école Malikite est principalement pratiquée dans les pays d’Afrique du Nord, comme la Tunisie, l’Algérie, la Mauritanie, le Maroc, la Libye, etc. On peut trouver des Hanbalites dans certaines parties de l’Arabie saoudite, au Koweït, au Bahreïn, en Syrie et dans d’autres pays. Les Écoles de Croyance (‘Aqida) Ash’arite et Maturidite sont également très répandues dans ces terres musulmanes.

Il est par conséquent totalement erroné de supposer que les Musulmans Sunnites sont en minorité, alors qu’au contraire, ils ont toujours été et demeurent encore aujourd’hui le courant traditionnel et majoritaire.

Sayyiduna ‘Abd Allâh ibn ‘Umar rapporte que le Messager d’Allâh (salallâhou ‘alayhi wassalaam) a dit : « Certes, Allâh n’unira jamais cette communauté dans l’égarement. La Main d’Allâh est avec la majorité, vous devez donc suivre le groupe le plus large, car celui qui en dévie est guidé vers l’enfer. » [1]

Par conséquent, soyez assuré que le bon chemin est celui que vous avez choisi, et c’est celui suivi par la majorité des Musulmans. En Angleterre, il y a beaucoup de savants Sunnites, en fait, la majorité des Mosquées (Masjids) et des Imams sont Sunnites. Je vous recommande de sortir du cercle étroit et limité dans lequel vous vous trouvez actuellement.

Quant aux différends qui peuvent exister entre Musulmans suivant tous une même voie Sunnite traditionnelle et suivant un Madhaab et la ‘Aqida Maturudi (ndt : ou Ash’ari), c’est certainement quelque chose qui est très regrettable. Il faut expliquer à ces personnes d’une manière agréable et douce que ces questions sont sans importance et qu’elles doivent être laissées de côté (car nous ne serons pas interrogés dessus le Jour du Jugement) et qu’il est préférable de se concentrer davantage sur les bases de l’Islam. Vous devez également éviter de tomber dans des discussions de ce type et comprendre que le fait d’être entouré de telles personnes ne devrait jamais vous dissuader de suivre la voie Sunnite.

En ce qui concerne votre dernier point évoquant le contrôle de Haramayn par les Salafis, il convient de garder à l’esprit que le contrôle des terres sacrées n’est pas en aucune manière une preuve que l’on est sur la vérité. Il existe dans l’histoire de nombreux exemples durant lesquels des usurpateurs avaient le contrôle sur ces terres sacrées.

Jusqu’à il n’y a pas si longtemps, les terres saintes étaient sous le contrôle des savants Sunnites. On pouvait assister dans les Mosquées sacrées de Makkah al-Mukarrama et de Madina al-Munawwara à quatre assemblées pour chaque Salat, en conformité avec les quatre Ecoles Sunnites traditionnelles de loi Islamique. Beaucoup de grands savants y ont vécu et y ont enseigné pendant des siècles. Ceci jusqu’à ce que Muhammad ibn Abd al-Wahhab et ses disciples viennent imposer leurs idéologies dans ces terres.

Il est pertinent de rappeler qu’il y a de grands savants Sunnites qui vivent encore aujourd’hui sur ces terres, malgré la vigilance rigoureuse du gouvernement et des groupes tournés vers le Salafisme/Wahhabisme. Des Savants tels que, Sheykh Muhammad al-Awwama (Un Syrien, grand savant Hanafi), Sheykh Habib Zayn (Un Yéménite, grand savant dans l’école Shafi’ite et dans le Tasawwuf), Sheykh Abd al-Hafidh al-Makki (un grand savant Hanafi et Soufi, originaire du Pakistan), Sayyidi Alawi al-Maliki (à Makka al-Moukarrama) et bien d’autres, qui résident et enseignent dans ces terres bénies.

L’imam Indien Muhammad Zakariyya al-Khandahlawi, un des grands savants du Hadith et de l’école Hanafite, a passé de nombreuses années de sa vie à Madina al-Munawwara. Ses élèves et disciples sont très nombreux. Mon propre Sheykh, Mawlana Sheykh Muhammad Yusuf Mutala (qu’Allâh le préserve) a été l’un de ses principaux élèves. J’ai personnellement entendu mon Sheykh dire que, dans les années soixante-dix, celui qui était à la tête des Imams de Haram à la Mecque, Sheykh Muhammad ibn Abd Allah as-Subayl (qui était aussi un Imam à l’époque) venait régulièrement assister aux rassemblements de Dhikr et de Tasawwuf de Sheykh Muhammad Zakariyya.

Enfin, rappelez-vous le Hadith du Messager d’Allâh :

Sayyiduna Abd Allâh ibn ‘Umar rapporte que le Messager d’Allâh a dit : « Ô Allâh, bénis pour nous la Syrie ! Ô Allâh, bénis pour nous le Yémen ! » Les gens (présents) dirent alors : « Et le Najd ? ». Il reprit : « Ô Allâh, bénis pour nous la Syrie ! Ô Allâh, bénis pour nous le Yémen ! » Ils dirent : « Et le Najd ? », et je crois qu’à la troisième fois il dit : « A cet endroit, il y aura des tremblements de terre et des séditions, et c’est également à cet endroit qu’apparaîtra la corne du diable. » [2]

Et Allâh est plus Savant.

[Mufti] Muhammad ibn Adam al-Kawthari
Darul Iftaa
Leicester, Royaume-Uni

Notes :

[1] Hadith rapporté par Ahmad, Sunan Tirmidhi, n° 2167 [2] Hadith authentique rapporté par al-Bukhari

Lire également les articles suivants :

– Les savants salafis eux-mêmes admettent qu’ils sont un groupe ultra minoritaire

– La nécessité de suivre le Groupe majoritaire

A voir : Dans cette courte vidéo sous titrée en français, sheykh Yussuf al-Qaradawi évoque également le sujet.

 

Les Ijazas de Ibn Baz et de Al-Albani


Par Sheykh Nuh Ha Mim Keller

 

 

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Question :

Les Salafis affirment que Ibn Baz (RA) et Al-Albani (RA) ont des ijazas [1] provenant de grands shouyoukh [2]. Ils disent que Al-Albani a obtenu une ijaza de certains shouyoukh en Syrie, avez-vous des informations à ce sujet?

 

Réponse :

Notre professeur de hadith, Sheykh Shu‘ayb al-Arna’ut, nous a dit, à ma femme et à moi-même, que Sheykh Nasir al-Albani a appris sa science du hadith à partir des livres et des manuscrits de la Bibliothèque Dhahiriyya à Damas, et suite à ses longues années de travail sur les livres de hadith. Il n’a obtenu aucune part significative de ses connaissances à partir de savants du hadith vivants. Selon Sheykh Shu’ayb, c’est pour la bonne raison qu’il n’y avait personne à Damas à l’époque qui connaissait bien le hadith, et qu’il n’a voyagé nulle part ailleurs pour apprendre. J’ai entendu des Salafis dire qu’il avait reçu une ijaza d’une personne en Syrie, mais cela ne peut venir (selon Sheykh Shu’ayb) que d’une personne ayant une connaissance beaucoup moins importante que la sienne.

Je crois Sheykh Shu’ayb à ce sujet, parce que sa famille, comme celle de Sheykh Nasir (Al-Albani), étaient des Albanais ayant émigré à Damas lors de la chute de l’Empire Ottoman, et ils se connaissent tous assez intimement. Le sentiment que l’on a, est que le père de Sheykh Nasir, Sheykh Nuh al-Albani, était un Hanafi à ce point strict qu’il fit naitre une sorte de réaction excessive chez Sheykh Nasir Al-Albani, non seulement contre Abu Hanifa et son madhhab, mais également contre les shouyoukh Islamiques traditionnels. Selon Sheykh Shu’ayb, Sheykh Nasir (Al-Albani) a étudié le Tajwid (récitation du Coran) et peut-être le livre de fiqh hanafite élémentaire Maraqi al-falah [l’ascension au succès] avec son père Sheykh Nuh al-Albani et il reçu (éventuellement) d’autres enseignements en fiqh Hanafite de Sheykh Muhammad Sa’id al-Burhani, qui enseignait à la mosquée Tawba, dans le quartier des Turcs du côté du Mont Qasiyun, près de la boutique du père de Sheykh Nasir (al-Albani). Par la suite, Sheykh Nasir (al-Albani) constata que son temps pourrait être dépensé de façon plus rentable au côté des livres et des manuscrits de la Bibliothèque Dhahiriyya et dans la lecture d’ouvrages à des étudiants, il n’assista plus alors à aucun autre cours.

Quant à son ijaza ou « certificat d’apprentissage », Sheykh Shu‘ayb nous dit qu’elle fut obtenue lorsqu’un savant du hadith d’Alep, Sheykh Raghib al-Tabbakh, était en visite à la Bibliothèque Dhahiriyya à Damas, et que le Sheykh Sheykh Nasir (al-Albani) lui fut signalé comme un étudiant du hadith prometteur. Ils se sont alors rencontrés et ont discuté. Le Sheykh l’a alors autorisé « dans toutes les chaînes de transmission qu’il a été autorisé à rapporter », c’est-à-dire une ijaza générale, bien que le Sheykh Nasir n’ait jamais assisté aux enseignements du Sheykh ou lu des livres de hadiths avec lui. Sheykh Raghib al-Tabbakh possédait des chaînes de shouyoukh remontant aux principaux ouvrages de hadith, tels que Sahih al-Bukhari, les Sunan d’Abou Dawoud, et avait donc une chaîne remontant de manière ininterrompue jusqu’au Prophète (salallâhou ‘alayhi wassalaam) pour ces livres. Mais c’était une autorisation (ijaza) de tabarruk, ou « pour la bénédiction », et non pas un « certificat d’apprentissage », car Sheykh Nasir (Al-Albani) n’est pas allé à Alep pour étudier auprès de lui et Sheykh Raghib al-Tabbakh n’est pas venu à Damas pour lui donner des cours.

Ce type d’autorisation (ijaza), de tabarruk, est une pratique de certains savants traditionnels : donner une autorisation afin d’encourager un étudiant qu’ils ont rencontré et apprécié, qu’ils trouvent doté de bonnes connaissances, ou qu’ils espèrent voir devenir savant. La raison pour laquelle je connais l’existence de telles ijazas, c’est parce que j’en possède une du savant Mecquois du hadith Sheikh Muhammad ‘Alawi al-Maliki, qui m’autorise à rapporter « toutes les chaînes de transmission que moi-même [Muhammad ‘Alawi al-Maliki] j’ai été autorisé à rapporter par mes shouyoukh », ce qui inclue les chaînes de transmission remontant aux Imams du hadith : Malik, al-Bukhari, Muslim, Abu Dawud, at-Tirmidhi, an-Nasa’i, Ibn Majah (La Mecque : Muhammad ‘Alawi al-Maliki, 1412/1992). Bien que mon nom soit sur l’autorisation, et qu’elle soit signée par le Sheykh, cela ne fait pas de moi un savant du hadith comme lui, parce qu’en dehors de certains de ses cours publics, ma connaissance dans le hadith ne vient pas de lui, mais de Sheikh Shu‘ayb, avec qui j’ai effectivement étudié. Plus exactement, Sheikh al-Maliki connaît mes shouyoukh à Damas, il sait que je suis le traducteur de ‘Umdat al-salik [Support du Cheminant] dans le Fiqh Shaféite, nous nous connaissons depuis un certain temps, et il approuve ma méthode. La valeur scientifique de telles ijazas est simplement d’attester du fait que nous nous sommes rencontrés. »

 

Quant à Ibn Baz, je ne sais pas avec qui il a étudié, mais de par ses émissions diffusées à la radio, je serais très surpris qu’il n’ait jamais étudié avec quelqu’un de non engagé dans ce que lui et ses collègues appellent la da’wa ou « la propagation », c’est-à-dire les révisions de l’Islam prônées par Muhammad ibn ‘Abd al-Wahhab.

 

Comme il est illégal de dire quoi que ce soit de détesté à propos d’un musulman, sauf dans le cadre d’un intérêt admis par la Loi Sacrée, la discussion qui suit ne sortira pas du cadre (a) de chercher à savoir si ces révisions constituent une exagération sectaire se différenciant de l’Islam traditionnel, et (b) s’il est avéré qu’elles sont sectaires, comprendre comment cela influence les déclarations sur lesquelles Sheykh Ibn Baz et Nasir Al-Albani pourraient par ailleurs être suivis.

 

Je vous mentionne cela, parce que comme vous le savez, certaines personnes s’offensent de l’utilisation du mot Wahhabi et ils ont de bonnes raisons si l’on entend par là qu’ils n’aiment pas l’Islam, ou ne cherchent pas à le pratiquer au mieux de leur compréhension et de leur capacité. Je crois que cela est vrai pour pratiquement tous les groupes séparatistes depuis le début de l’Islam. Pour autant qu’ils ne contredisent pas quelque chose de nécessairement connu dans la religion (nécessairement connu signifiant que n’importe quel musulman saurait répondre si on lui posait la question), on peut dire de tous ces groupes qu’ils ont essayé de comprendre et d’appliquer le Coran et la Sunna, bien que leur compréhension les ait amené à une conclusion erronée. C’est pourquoi les manuels de Shari’a disent des choses comme :

 

Ils [ceux qui se soulevèrent contre le calife] dépendent des lois Islamiques (parce qu’ils n’ont pas commis un acte qui les met en dehors de l’Islam, ce qui ferait qu’on les considérerait alors comme non-Musulmans. Ils ne sont pas non plus considérés comme moralement corrompus (fasiq), car se rebeller n’est pas une limite critique, mais il s’agit plutôt de leur compréhension qui est erronée), et les avis de leur juge Islamique sont considérés comme juridiquement valides (à condition qu’il ne déclare pas légal d’ôter injustement la vie des Musulmans) si ces avis sont tels qu’on les considérerait comme valides s’ils étaient émis par notre propre juge (Reliance of the Traveller, 594).

 

Le fait que ces personnes puissent considérer les Musulmans qui ne font pas partie de leur secte comme des non-Musulmans – ce qui est la marque de fabrique des sectes hétérodoxes (Batil) de tout temps et en tous lieux – ne change pas les avis cités ci-dessus, et le calife ou son représentant peut utiliser la force nécessaire pour mettre fin à la discorde. Voici ce que l’on trouve dans Hashiya radd al-muhtar ‘ala al-Durr al-mukhtar sharh Tanwir al-absar [3], dont chaque mot est considéré comme un des éléments déterminants (nass) dans l’école Hanafi :

 

(Al-Haskafi:) Ceux qui se révoltent contre l’obéissance à l’Imam [c’est-à-dire le calife ou son représentant] sont de trois types :

1/ Les bandits de grand chemin, et leur statut est connu [c’est à dire la peine de mort, s’ils ne se livrent pas avant d’être capturés];

2/ Les rebelles (bughat) contre le califat, dont le statut sera discuté ci-dessous [c’est-à-dire qu’ils sont combattus avec autant de force que nécessaire pour les faire cesser, comme indiqué dans Reliance plus haut];

3/ Les kharijites, c’est-à-dire des hommes avec une force militaire qui se révoltent contre l’Imam en raison d’une interprétation scripturaire erronée (ta’wîl), estimant qu’il est dans un égarement digne de la mécréance (kufr) ou dans la désobéissance à Allâh (ma’siya) qui nécessite qu’ils le combattent, ceci selon leur interprétation erronée des Écritures et qui considèrent comme légitime de prendre nos vies, nos biens, nos femmes comme esclaves et qui considèrent les Compagnons de notre Prophète comme des mécréants. Leur statut est le même que celui des rebelles (bughat) contre le califat: [voir n° 2 ci-dessus] par consensus unanime des savants du fiqh.

(Ibn ‘Abidin) : Ses paroles « et qui considèrent les Compagnons de notre Prophète comme des mécréants » ne font pas partie des conditions qui déterminent qu’une personne est un kharijite, mais c’est plutôt une simple clarification sur ce qu’on fait ceux qui se révoltèrent contre ‘Ali (RA). Autrement, il suffit d’être convaincu qu’ils considèrent mécréant ceux contre qui ils se battent, comme cela s’est produit de nos jours avec les disciples de [Muhammad ibn] ‘Abd al-Wahhab, qui sortirent du Najd en révolte, et prirent les sanctuaires de la Mecque et de Médine. Ils suivaient l’école Hanbalite, mais pensaient qu’ils [eux-mêmes] étaient LES musulmans et que ceux qui croyaient différemment d’eux étaient polythéistes (mushrikin). Sur cette base, ils jugèrent légal de tuer des Musulmans Sunnites (Ahl al-Sunna) ainsi que leurs savants religieux, jusqu’à ce qu’Allâh le Très-Haut mette en déroute leurs forces et que les armées Musulmanes attaquent leurs bastions et les humilient en 1233 A.H. [1818] (Hashiya radd al-muhtar, 4.262).

 

Le mufti Shafe’ite de la Mecque, Ahmad ibn Zayni Dahlan (m. 1304/1886), historien et savant, a écrit l’histoire de la prise de pouvoir des lieux saints par les Wahhabites dans un certain nombre d’ouvrages, dont l’un, son livre d’histoire en deux volumes intitulé al-Futûhât al-Islamiyya [Les conquêtes Islamiques], donne la description suivante de ce qui est probablement devenu le plus célèbre et certainement le plus meurtrier de leur ijtihad, à savoir que la Sunna du Tawassul (invoquer Allâh par l’entremise de) [4] constitue de la mécréance (shirk) :

Muhammad ibn ‘Abd al-Wahhab a affirmé que son but dans cette école de pensée qu’il a innové était de purifier la croyance en l’unicité d’Allâh (Tawhid), et d’abjurer l’adoration de fausses divinités (shirk) et [de démontrer] que les Musulmans avaient adoré de fausses divinités depuis six cents ans et qu’il leur avait restitué leur religion. Il interpréta les versets Coraniques révélés au sujet des adorateurs de faux dieux (polythéistes) comme se référant à ceux qui adorent Allâh seul, comme [par exemple] la parole d’Allah le Très-Haut :

 

« Y a-t-il un être plus égaré que ceux qui invoquent, en dehors de Dieu, des divinités qui n’exauceront jamais leurs prières jusqu’au Jour de la Résurrection, qui sont totalement insensibles à leurs invocations » [5]

Ainsi que Sa Parole :

« N’invoque pas, en dehors de Dieu, ce qui ne peut ni te faire du bien ni te nuire, sinon tu serais du nombre des injustes ! » [6] 

 

Il y a beaucoup de versets similaires dans le Coran ; ainsi Muhammad ibn ‘Abd al-Wahhab a dit que quiconque cherche l’aide du Prophète ou d’autres personnes parmi les prophètes, les amis d’Allâh (awliya) ou les vertueux, ou bien fait appel à lui ou lui demande d’intercéder, est comme ces adorateurs de faux dieux et donc est inclus dans la généralité de ces versets. Il croyait la même chose à propos du fait de visiter la tombe du Prophète et de tous les autres des prophètes, ainsi que celles des amis d’Allâh, ou encore celles des saints. Il a dit à propos de la Parole d’Allâh le Très-Haut citant les dires des idolâtres à propos du culte de leurs idoles,

« Nous ne les adorons que pour qu’elles nous rapprochent davantage de Lui » [7]

 

que les gens qui prient Allâh par le biais d’un intermédiaire (Tawassul) sont comme ces adorateurs de faux dieux qui disent : « Nous ne les adorons que pour qu’ils nous rapprochent davantage de Lui ». Il a déclaré que les adorateurs de faux dieux ne croyaient pas leurs idoles capables de créer quoi que ce soit mais plutôt que le Créateur était Allâh le Très-Haut, comme indiqué par la parole d’Allâh :

 

« Et si vous leur demandez qui les a créés, ils diront : ‘Allâh’ » [8]

Et,

« Si jamais tu leur demandes qui a créé les Cieux et la Terre, ils répondront sûrement : ‘Allâh’ » [9]

 

de telle façon qu’Allâh ne les avait pas jugé pour avoir commis de la mécréance et avoir adoré de fausses divinités, mais plutôt par rapport à leur parole, « que pour qu’ils nous rapprochent davantage de Lui », et qu’en conséquence ces gens [Musulmans qui font le Tawassul] sont comme eux.

 

Et cela est tout simplement faux, car les Musulmans croyants ne prennent pas les prophètes (Paix sur eux) ou les amis d’Allâh comme des dieux ni n’en font des associés (shuraka’) d’Allâh, mais plutôt ils croient qu’ils sont des esclaves créés qui appartiennent à Allâh et qui ne sont pas dignes d’être adorés.

 

Quant aux adorateurs de faux dieux à propos desquels ces versets du Coran ont été révélés, ils croyaient que leurs idoles étaient des dieux, et les vénéraient comme tels, même s’ils reconnaissaient qu’ils n’avaient pas créé quoi que ce soit – tandis que les croyants eux, ne soutiennent pas que les prophètes ou les awliya sont dignes d’adoration ou de la divinité et ne les vénèrent pas avec la révérence due exclusivement au Seigneur. Plutôt, ils croient qu’ils sont les serviteurs d’Allâh et Ses bien-aimés, ceux qu’il a élus et choisis et croient que par Les bénédictions qu’Il leur accorde (baraka), Il fait preuve de miséricorde envers Ses serviteurs. Leur intention dans la recherche de bénédictions à travers eux est une miséricorde d’Allâh le Très-Haut, et les preuves qui attestent de la validité de cela sont nombreuses dans le Coran et la Sunna.

 

Le credo des Musulmans est que le Créateur – Celui qui afflige, Celui qui avantage, Celui qui mérite d’être adoré – est Allâh seul. Ils ne croient pas que quelqu’un d’autre soit Puissant (capable) et ils croient que les prophètes et awliya ne créent rien, ne possèdent aucune capacité de favoriser ou de nuire, mais simplement que par la grâce qu’Allâh leur accorde (baraka), Il fait montre de miséricorde envers les serviteurs créés.

 

C’est la « croyance » des adorateurs de faux dieux selon laquelle leurs idoles méritaient l’adoration et la divinité qui les rendaient coupable d’associer à Allâh (shirk) des copartenaires et non simplement leur parole : « Nous ne les adorons que pour qu’elles nous rapprochent davantage d’Allâh ». Car c’est seulement lorsqu’il leur fut prouvé que leurs idoles ne méritaient pas d’être adorées, ce qu’ils croyaient pourtant, qu’ils dirent alors pour se trouver une excuse: « Nous ne les adorons que pour qu’elles nous rapprochent davantage de Lui ».

 

Alors comment Ibn ‘Abd al-Wahhab et ses partisans peuvent-ils considérer que les croyants qui reconnaissent le Tawhid dans son ensemble puissent être comparables à ces adorateurs de faux dieux qui croyaient en la divinité de leurs idoles? Aucun croyant n’est concerné par tous les versets cités ci-dessus, ni par ceux qui comme eux font explicitement référence à des non-Musulmans et aux adorateurs de fausses divinités.

L’Imam Al-Bukhari rapporte de ‘Abdullâh ibn ‘Umar (qu’Allâh soit satisfait du père et du fils) qui a relaté que le Prophète a dit lors de sa [prédiction de la] description des Kharijites qu’ils « se serviraient des versets révélés au sujet des non-Musulmans et qu’ils les appliqueraient aux croyants ».

 

Et dans un autre hadith, également d’après Ibn ‘Umar, le Prophète a dit : « Ce que je crains le plus pour ma Oumma, c’est un homme qui interprète le Coran et l’utilise hors de son contexte » ;  ces deux hadiths sont applicables à cette secte.

 

Si le fait que des croyants invoquent Allâh à travers un intermédiaire (Tawassul) était considéré comme de l’adoration de fausses divinités, cela n’aurait pas été fait d’abord par le Prophète lui-même, ni par ses Compagnons, ni par la Umma Musulmane, du premier au dernier [10].

Ce passage nous montre pourquoi les Wahhabis ont été considérés comme des Kharijites, des hommes qui, comme le note Al-Haskafi ci-dessus, se sont révoltés contre l’imam « en raison d’une interprétation scripturaire erronée (ta’wîl), » estimant qu’il « est dans un égarement digne de la mécréance (kufr) ou dans la désobéissance à Allâh (ma’siya) nécessitant qu’ils le combattent ».

Ce qui met principalement en difficulté leur théorie selon laquelle le Tawassul revient à adorer de faux dieux, c’est le fait qu’il a été enseigné à la Oumma par le Prophète, ce qui explique peut-être pourquoi personne dans les onze siècles de science Islamique qui ont précédé Muhammad ibn ‘Abd al-Wahhab n’avait considéré cela comme de la mécréance.

 

À cet égard, il est impensable que Ibn ‘Abd al-Wahhab n’ait pas été informé du fait que son propre Imam [ndt : celui qu’il prétendait suivre], Ahmad ibn Hanbal, ait enjoint son élève le plus remarquable, Abu Bakr Ahmad ibn Muhammad al-Marrudhi (m. 275/888) de faire Tawassul par le Prophète. Al-Marrudhi rapporte le Tawassul du hadith du Compagnon (Sahabi) ‘Uthman ibn Hunayf qui contient les paroles : « Ô mon Seigneur ! Je Te demande et je me dirige vers Toi par Ton Prophète Mohammed, le Prophète de la miséricorde. Ô Mohammed !  Je me dirige par ton intermédiaire vers ton Seigneur pour mon besoin afin qu’il soit comblé », que al-Marrudhi rapporte de Ahmad ibn Hanbal, à partir du « chapitre des supplications » de son Kitab al-mansak [Livre de la Umra et du Hajj]. Cela est mentionné par Ibn Taymiya [11] que j’ai plutôt tendance à croire à ce sujet, car il a essayé de réfuter les propos de son Imam à propos du caractère Sunna de cette pratique, mais sans la considérer comme de l’idolâtrie (shirk) ou de la mécréance (kufr), ce que les Wahhabis ont fait quatre siècles plus tard.

 

Muhammad ibn ‘Abd al-Wahhab a aujourd’hui disparu, avec les fatwas qu’il a émis et dont le résultat à été les attaques contre la Mecque, Taïf, et Médine dès 1205/1790 par les « réformateurs » qui croyaient que la vie, les femmes et l’argent des Musulmans Sunnites ordinaires qui ne considéraient pas le Tawassul comme du shirk pouvaient légalement être pris par ceux qui le considéraient comme tel. Il n’y a plus de Wahhabites de ce type. Comme l’a dit le roi Fahd (qui, dans l’ensemble, a eu une influence modérée positive) il y a quelques années dans un discours, « Nous ne sommes pas Wahhabites, nous sommes Hanbalites ».

 

Pourtant, si la « révolte » (selon les propos d’Al-Haskafi) s’en est allée, la « mauvaise interprétation des textes » demeure et son influence intellectuelle reste forte sur tous les aspects de l’institution religieuse en Arabie Saoudite. Bon nombre des idées agressives [ndt : en provenance d’Arabie Saoudite] sont emballées et exportées vers d’autres pays Musulmans sous l’égide d’Ibn Baz et l’accréditation donnée par le soutien de Sheykh Al-Albani et de ceux qui le suivent.

 

Il s’agit de « révisions » qui visent à changer l’Islam traditionnel et si beaucoup de Musulmans ordinaires ont oublié cela, c’est en raison de l’ampleur avec laquelle ils [les Wahhabis] ont réussi, encouragés par des subventions importantes [ndt : grâce au pétrodollar] et le manque actuel de savants traditionnels (‘Ulama) pour enseigner la vérité aux Musulmans. Pourtant, on sent bien qu’ils marquent une phase transitoire, car Allâh a promis de protéger la religion (din) et si les réfutations des savants classiques ont été entendues, ces innovations disparaitront comme neige au soleil. En attendant, les Wahabbis ont programmé des pseudos réformes pour les trois piliers du din, à savoir : l’Islam (la Shari’a), l’Iman (‘Aqida), et l’Ihsan (Tariqa). À partir de ces catégories, les « réformes» peuvent être résumées ainsi :

1) L’Islam (Shari’a) : À leur crédit, le mouvement dont nous parlons a ravivé l’intérêt pour le hadith parmi les érudits musulmans du bord opposé. Mais l’accent mis sur hadith et ses disciplines connexes, à l’exclusion des autres sciences Islamiques toutes aussi indispensables à la compréhension de la révélation, telles que la méthodologie du fiqh, ou le conditionnement du hadith selon les principes généraux exprimés dans le Coran, a créé une fausse division dans l’esprit de nombreux musulmans entre le fiqh et le hadith. Et c’est une innovation (bida’a) intellectuelle de l’espèce la plus menaçante pour l’Islam dans lequel n’a jamais accepté l’ijtihad [12] provenant de non-mujtahids [13], ou quoi que ce soit présentant une insuffisance en fiqh (littéralement : la compréhension des points subtils) du hadith.

Une des tristes conséquences de la division faite entre le fiqh et le hadith est la renaissance de la pensée Dhahirite dont nous avons parlé plus haut, avec « l’invalidité de son littéralisme mal placé » dans l’interprétation des textes scripturaires primaires. Un tel littéralisme se produit nécessairement sur une personne formée seulement au Hadith (comme le Sheykh Al-Albani) [notamment] si elle essaie de déduire des avis Juridiques Shari’a sans posséder la maîtrise des outils d’interprétation nécessaires pour relever les défis auxquels sont confrontés les mujtahids, par exemple, dans le raccordement d’entre un certain nombre de hadiths sur une question particulière qui pourtant semble contradictoire, ou encore en ce qui concerne les nombreux autres problèmes intellectuels inhérents à l’ijtihad. Cet ardent Dhâhirisme – en particulier chez les adeptes de Sheykh Al-Albani – a incité certains Musulmans contemporains à croire sérieusement qu’il faille choisir entre suivre « le Coran et la Sunna », et suivre l’une des écoles des Imams Mujtahid [14].

 

Si le grand mensonge a aujourd’hui gagné en crédibilité c’est uniquement parce que très peu de musulmans comprennent ce qu’est un ijtihad et comment il se fait. Je pense que le remède à cela consiste à familiariser les Musulmans avec des exemples concrets sur la façon dont les Imams Mujtahids arrivent à dériver des avis juridiques de Shari’a spécifiques à partir du Coran et des Hadith. En premier lieu, démontrer l’étendue de leurs connaissances dans le Hadith (Muhammad ibn ‘Ubayd Allah ibn al-Munadi [m. 272/886] rapporte que Ahmad ibn Hanbal a déclaré qu’avoir mémorisé trois cent mille hadiths ne suffisait pas pour être un mujtahid), puis en second lieu, démontrer leur maîtrise des principes déductifs qui permettent de joindre entre eux tous les textes primaires. Jusqu’à ce que cela soit fait, les partisans de ce mouvement continueront probablement à suivre l’ijtihad de non-mujtahids (les Shouyoukh qui inspirent leur confiance), sous le slogan « le Coran et la Sunna », comme si l’obligation de les suivre était une notion étrangère aux véritables mujtahids. Les disciples [de cette doctrine] peuvent à la rigueur ne pas être blâmés, car [selon l’expression] « pour quelqu’un qui n’a jamais voyagé, sa mère est l’unique cuisinière ». Mais j’impute la responsabilité aux Shouyoukh qui, quelles que soient leurs motivations, écrivent et parlent comme s’ils étaient les uniques cuisiniers.

2) L’Iman (‘Aqida) : L’acceptation et l’adhérence aveugle des opinions d’Ibnou Taymiya et d’Ibn al-Qayyim al-Jawziyya dans la ‘Aqida ont abouti à un certain nombre de conséquences :

 

L’une d’entre elles est le rejet par Ibn Taymiya de toute expression figurative (majaz) dans le Coran. C’est ce que nous avons nommé plus haut : « littéralisme mal placé ». Ceci a eu pour conséquence de faire naitre l’anthropomorphisme dans les esprits et a permis qu’il se propage un peu partout sous le slogan du « retour à la ‘Aqida des premiers Musulmans », alors qu’ils en sont loin.

 

À cet égard, je parlais récemment avec Mawlana Abdullâh Kakakhail, un savant d’Islamabad spécialiste de la Croyance Islamique (usûl ad-din), qui m’a dit avoir été diplômé de l’Université Islamique de Médine en 1966, et qui peu après, alors qu’il s’apprêtait à rentrer chez lui, avait été convoqué au bureau du vice-recteur de l’université. Celui-ci exprima sa déception à propos du fait que l’étudiant n’ait pas davantage profité de l’enseignement dispensé dans l’université à propos de la Croyance Islamique (‘Aqida). Le vice-recteur dit qu’il savait qu’Abdullâh retournait au Pakistan avec les mêmes principes de foi que ceux avec lesquels il était venu. Ils sont ensuite venus à parler des  mutashabihat, c’est-à-dire des versets Coraniques et hadiths dits « équivoques » jusqu’à ce qu’ils en arrivent à parler de la « Main » d’Allâh [15]. « Vous dites », dit le jeune homme au vice-recteur, que : « la main est connue, mais que son comment (kayf) est inconnu ». « Que signifie donc l’inconnu de ce comment ? » Le vice-recteur répondit : « Cela signifie que nous ne savons pas si la main est noire ou blanche, ni si elle est longue ou courte ». Ce vice-recteur se nommait Ibn Baz, et c’est ce qui était proposé à l’époque comme da’wa (appel à l’Islam) – c’est-à-dire une croyance (‘Aqida) semblable à celle qui inspira le plafond de la chapelle Sixtine.

 

Deuxièmement, pour expliquer le fossé béant qui existe entre ce genre d’anthropomorphisme et l’ensemble de la littérature antérieure en matière de Tafsir du Coran, ils ont été obligé de se justifier en expliquant que l’école Ash’ari se serait glissée dans la Umma et aurait altéré la « ‘Aqida des premiers Musulmans (as-Salaf us-Salih) », alors qu’on ne trouve aucune trace de la ‘Aqida que les Wahhabis prétendent être celle des Salafs. Cela a divisé le domaine de la ‘Aqida en deux camps : les pros et les anti-Ash’ari, alors que depuis les mille années précédentes, les Musulmans Sunnites s’étaient mis en accord autour de l’orthodoxie des écoles Ash’aris et Maturidis. Pourquoi avoir réparé quelque chose qui n’était pas cassé?

 

En fait, quand un richissime commerçant de Djeddah a sorti des oubliettes la ‘Aqida d’Ibn Taymiya au début de ce siècle en finançant l’impression en Égypte de son livre Minhaj al-sunna al-nabawiyya ainsi que d’autres de ses œuvres, le Mufti d’Egypte Muhammad Bakhit al-Muti‘i, confronté à de nouvelles questions sur la validité de l’anthropomorphisme a écrit : « C’est une discorde (fitna) qui dormait ; qu’Allâh maudisse celui qui la réveille ».

 

Mais il est vraisemblable que l’héritage le plus malheureux laissé par le mouvement Wahhabi originel est quelque chose qui est maintenant pratiqué du Najd au sous-continent Indien, d’Est en Ouest, à savoir la facilité avec laquelle les Musulmans se qualifient les uns les autres de « mécréants ». Que ce soit à propos d’une question de Fiqh comme le Tawassul, ou sur une question de ‘Aqida comme celle que l’ont à évoqué plus haut et c’est précisément le sectarisme qu’Allâh nous a interdit dans le Coran par les paroles :

 

« Ne suivez pas l’exemple de ceux qui, après avoir reçu les preuves, se sont divisés et se sont opposés les uns aux autres. À ceux-là est réservé un châtiment exemplaire » [16].

 

Le sectarisme de ce genre est quelque chose qui n’existait pas dans l’Islam Sunnite traditionnel durant les mille dernières années, mais il représente plutôt une rupture avec cette tradition. Même si on la justifie au nom d’une « réforme Islamique » ou d’un « retour aux sources de l’Islam », le sectarisme est et demeure le type de bida’a d’égarement à propos duquel le Prophète a dit dans un hadith rapporté par Muslim :

 

« Quiconque apporte à notre affaire-ci une chose nouvelle non fondée sur elle, verra cette chose rejetée ». [17] 

 

3) L’Ihsan (Tariqa) : Le troisième item de la réforme, poursuivie de manière agressive aujourd’hui encore est la tentative faite pour éliminer du cercle des sciences Islamiques le Tasawwuf ou « soufisme », bien qu’il ne fasse pourtant aucun doute qu’il ait été considéré comme tel par presque tous les savants classiques, et ce, depuis que les sciences religieuses furent pour la première fois retranscrites. Notre époque a vu l’impression et la réimpression de travaux comme des passages du Talbis Iblis [Les ruses de satan] d’Abd ar-Rahman ibn al-Jawzi dans lequel « les Soufis » (dans le sens d’un groupe d’entre eux à son époque) sont critiqués, sans dire en passant qu’un grand nombre des biographies de son ouvrage en cinq volumes Sifa al-safwa [Description des élus] sont celles des mêmes soufis cités in extenso dans Al-Risala al-Qushayriyya l’ouvrage classique de Qushayri sur le Soufisme.

 

Le Soufisme existe pour la bonne raison que la Sunna que nous avons pour obligation de suivre ne se limite pas seulement aux paroles et aux actes extérieurs du Prophète mais aussi à ses états, comme la confiance en Allâh (tawakkul), la sincérité (ikhlas), la mansuétude (hilm), la patience (sabr), l’humilité (tawadu’), le perpétuel souvenir d’Allâh, et ainsi de suite. Beaucoup, beaucoup de hadiths et des versets du Coran indiquent le caractère obligatoire de la réalisation de ces (et des centaines d’autres) états du cœur, comme indiqué dans le hadith rapporté par Muslim, dans lequel le Prophète dit :

 

« Quiconque a un atome d’orgueil dans le cœur n’entrera pas au Paradis » [Muslim 1.93]

 

ou le hadith sahih dans les Sunan d’Abou Dawoud sur le caractère obligatoire d’avoir une présence du cœur dans la prière (salat), dans lequel ‘Ammar ibn Yasir rapporte avoir entendu le Prophète dire,

 

« En vérité, l’homme quitte (une prière) dont il n’obtient que le dixième de la récompense, le neuvième, le huitième, le septième, le sixième, le cinquième, le quart, le tiers ou la moitié » (Sunan Abu Dawud [N.d. Réimpression. Istanbul: al-Maktaba al-Islamiyya, n.d.] 1.211).

Une réflexion d’une demi-minute suffit à montrer à chacun de nous où nous en sommes sur ces aspects de notre din, et pourquoi en temps normal, aider les Musulmans à atteindre ces états n’étaient pas laissés à des amateurs, mais plutôt délégué à des Ulémas du cœur, les savants du Soufisme Islamique.

 

Comme dans d’autres sciences Islamiques, des erreurs se sont produites historiquement dans le Soufisme, comme principalement le fait de ne pas reconnaître la Shari’a et les principes de la foi (‘Aqida) de Ahl as-Sunna comme étant au-dessus de chaque humain. Mais ces erreurs n’étaient par exemple pas différentes des isra’iliyyat (contes sans fondement des Bani Isra’il) qui se sont glissé dans la littérature exégétique Coranique (tafsir), ou des mawdu’at (hadiths forgés) qui se sont glissé dans la masse des hadiths prophétiques. Pour autant, on ne considère pas cela comme une preuve que le tafsir est mauvais, ou que le hadith égare, mais plutôt, dans chaque discipline les erreurs ont été identifiées et les mises en garde ont été effectuées par les Imams spécialistes de ces matières parce que la Umma avait besoin du reste. Et de telles corrections sont précisément ce que nous trouvons dans des livres comme la Risala de Qushayri, dans l’Ihya d’Al-Ghazali et d’autres ouvrages de Soufisme.

 

En revanche, les réformateurs de notre époque ont trouvé comme échappatoire de créer des doutes sur le fait qu’il n’y aurait [en fait] véritablement aucune science Islamique permettant d’atteindre la sincérité spirituelle à partir d’une voie méthodique et fondée sur la connaissance. Mais peut-être aujourd’hui, commencent-ils à réaliser que si l’on met fin à toutes les aspirations spirituelles, on ne produira que des Musulmans agressifs n’ayant aucun autre moyen de se sentir plus religieux que part l’argumentation pour prouver à leurs coreligionnaires Musulmans que ces derniers le sont moins qu’eux. Un état peu enviable, décrit dans le hadith du Prophète :

 

« Aucun peuple ne s’est égaré après avoir été sur la vérité si ce n’est à cause des polémiques »

 

Pour résumer, le mouvement visant à réformer notre din attaque l’autorité Scientifique qui a toujours soutenu ses trois piliers. Et ils le font dans l’Islam, en retournant le cœur des Musulmans contre les écoles juridiques (madhhabs) qui représentent notre Shari’a; dans l’Iman, en présentant l’anthropomorphisme d’Ibn Taymiya comme « la voie des premiers Musulmans » [ndt : as-Salaf al-Salih], et dans l’Ihsan, en essayant de fermer la porte de la spiritualité Islamique traditionnelle une fois pour toutes.

 

Sheykh Nasir al-Albani et Ibn Baz sont parmi les sommités principales de ce mouvement, et l’ensemble de la carrière de ce dernier démontre son attachement à ces réformes, que ce soit les publications imprimées sous ses auspices et distribuées à travers le monde, ou bien l’aide financière accordée aux universitaires wahhabis dans le but qu’ils repartent de Médine diplôme en poche vers leur pays d’origine pour ensuite diffuser les enseignements de la secte, relatant inlassablement à quel point seuls peu de Savants Musulmans au cours des milles quatre cents dernières années ont vraiment compris l’Islam comme il a été compris par le Prophète et par eux-mêmes.

 

Alors peut-être que la meilleure réponse à votre question à propos des ijazas de ces deux hommes est de demander en retour : Quel intérêt le système traditionnel d’ijaza a-t-il donc pour ces réformateurs, alors que sa fonction consiste à ce que les savants traditionnels conservent intacte la compréhension de l’Islam à travers les siècles alors que ces réformateurs ont pour ambition de changer cette compréhension?

 

Notes du traducteur :

[1] Ijaza : Autorisations et certifications délivrées par les Savants à leurs élèves une fois qu’ils ont parfaitement maitrisé la matière ou le livre qui leur a été enseigné.

[2] Shouyoukh est le pluriel de sheykh

[3] commentaire d’Ibn ‘Abidin : le guide du perplexe sur les perles bien choisies d’Haskafi, une exégèse de (Tumurtashi).

[4] En substance, le terme tawassul désigne le fait d’emprunter et de mettre en avant une wasîlah – un chemin ou un moyen – susceptible de rendre les invocations plus recevables auprès d’Allâh à Qui on s’adresse et vers Qui on se dirige.

[5] Qour’an – 46/5
[6] Qour’an – 10/106
[7] Qour’an – 39/3
[8] Qour’an – 43/87
[9] Qour’an – 31/25

[10] Dahlan, al-Futûhât al-Islamiyya [Le Caire: Al-Maktaba al-Tijariyya al-Koubra, 1354/1935], de 2.258 à 59

[11] Qa‘ida jalila fi al-tawassul wa al-wasila [N.d. Réédition. Beyrouth : al-Maktaba al-‘Ilmiyya, n.d.], 98

[12] L’ijtihâd est le jugement résultant de la réflexion du mujtahid.

[13] Le Mujtahid est le savant reconnu par ses pairs, ayant atteint un niveau d’érudition très avancé, lui permettant de prononcer une interprétation personnelle (ijtihâd) sur un point de droit dans l’Islam. Peu de savants ont atteints ce niveau, on compte parmi eux des Imam comme Abou Hanifa, Malik ibn Anas, Ahmad ibn Hanbal, ash-Shafé’i. On estime qu’aujourd’hui il n’existe pas de savants Mujtahid, c’est pourquoi les ‘Ulamas des écoles se réunissent en comité afin de réunir leurs compétences pour étudier les questions nouvelles.

[14] C’est-à-dire les écoles Malikite, Shafé’ite, Hanafite et Hanbalite. Bien entendu suivre l’une de ces 4 écoles est sans nul doute LE meilleur moyen de suivre le Coran et la Sunna.

[15] Qour’an – 48/10 : « La Main de Dieu est au-dessus des leurs »
[16] Qour’an – 3/105
[17] Muslim 3/1343

Suivi d’une école – Les Salafis sont-ils des transgresseurs?

Par le Mufti  Muhammad ibn Adam al-Kawthari [1]

Qouran

 

 

Question :

Vous savez que nous avons la secte dite Salafi. Sont-ils considérés comme transgresseurs?

 

Réponse :

Au nom d’Allâh, le Très Compatissant, le Miséricordieux,

Le message réel de l’Islam est l’obéissance à Allâh. L’accent a été mis sur le suivi du Messager d’Allâh (salallâhou ‘alayhi wassalaam), parce qu’il représente les commandements d’Allâh. Par conséquent, tous les musulmans devraient s’efforcer de suivre les commandements d’Allâh le Tout-Puissant et Son Messager.

Toutefois, il existe de nombreux commandements et injonctions du Coran et de la Sunna qui sont confus et ambigus. En fait, il y a certains énoncés qui semblent (apparemment) en contradiction avec d’autres versets du Coran et des Hadiths.

Par exemple : Il y a un Hadith qui dit : « Celui qui a un imam, la récitation de l’imam (en prière) est sa récitation » [2]. Cela indique que celui qui suit l’imam dans la prière doit rester silencieux. Toutefois, un autre Hadith dit : « Il n’y a pas de Salat (prière) pour celui qui n’a pas récité la Sourate Al-Fatiha ».

Maintenant, si une personne a les qualifications requises, la connaissance profonde des différentes sciences de la Shari’ah qui exige de nombreuses années d’intenses études avec piété et crainte d’Allâh, alors elle peut étudier les différentes preuves et décider pour elle-même qu’elle est la position correcte. Cette catégorie de personne est connue sous le nom de « Mujtahid » [3].

Toutefois, si l’on est en deçà des conditions requises pour être Mujtahid (de nombreux chercheurs ont mentionné qu’il est impossible pour une personne d’atteindre le niveau de l’Ijtihad à notre époque), il est alors nécessaire pour elle de suivre un Mujtahid qui a passé toute sa vie dans l’étude des différentes sciences de la Shari’ah. Ceci est connu comme « le suivi d’une école (Madhhab) ».

Il convient de rappeler que lorsque nous suivons un Madhhab (une école de jurisprudence), nous ne suivons pas une seule personne, mais nous suivons les travaux de recherche effectués par des milliers de savants qui ont consacré leur vie pour cette noble cause.

Allâh dit dans le Saint Qur’an :

« Demandez donc aux gens du rappel si vous ne savez pas ». [4] et [5]

Si une personne est dans l’illusion et se considère comme un Mujtahid et qu’en réalité elle ne l’est pas (comme c’est le cas généralement), alors c’est certainement mauvais et cela conduit à la déviation.

Quant à la question « Les Salafis sont-ils des transgresseurs (ndt : sur ce point) », cela dépend de la personne, toutefois les gens normaux sont en deçà de l’exigence de l’Ijtihad, et par conséquent il leur est nécessaire de suivre une école (Madhhab).

Je ne voudrais pas faire un jugement général sur le fait qu’ils soient (tous) ou non des transgresseurs, nous laissons cela à Allâh le Très-Haut, afin de ne pas être interrogé sur cette question le jour de Qiyamah.

Qu’Allâh bénisse la Oummah par l’unité, car c’est ce dont elle a le plus besoin actuellement, et qu’Il nous guide tous dans le droit chemin (Ameen).

Et Allâh est plus savant.

Muhammad ibn Adam al-Kawthari
Darul Iftaa, Leicester, Royaume-Uni

Notes :

[1] La biographie du sheykh est disponible ici : Biographie de Sheykh Muhammad ibn Adam al-Kawthari

[2] Sunan Ibn Majah et al-Bayhaqi

[3] Le Mujtahid est celui qui prononce une interprétation personnelle (ijtihâd) sur un point de droit dans l’islam. L’ijtihâd est le jugement résultant de la réflexion du mujtahid. Il existe trois catégories de Mujtahid :

1) Al-mujtahid al-mutlaq : capable de faire se rapprocher des textes divergents et en tirer la synthèse, élaborer les principes juridiques sans référence à une école particulière (madhhab). Ces compétences sont considérées comme exceptionnelles et rarissimes.

2) Al-mujtahid al-mutlaq al-muntasib le même mais dans le cadre d’une école interprétative (madhhab).

3) Al-mujtahid fil-madh’hab dans le cadre d’une école interprétative, capable d’élaborer des réponses juridiques sur des questions nouvelles.

Seuls les savants les plus compétents atteignent le rang de Mujtahidin.

[4] Les gens du rappel sont les savants.

[5] Sourate Al-Nahl – verset 43

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Demander des « preuves »
est un Dalil clair de ton ignorance

 

Par Sheykh  Ridhwan Salim [1]

 

dalil

 

 

Au nom d’Allâh. Toute louange Lui revient, notre Seigneur et Protecteur, et que la paix et la miséricorde soient sur son dernier Prophète ﷺ.

Les remarques qui suivent ne sont pas formulées dans l’intention d’offenser qui que ce soit. Nous aimons tous nos frères qui aiment Allâh et Son Messager, qui travaillent sincèrement pour cette religion (deen), quelle que soit l’orientation qu’ils choisissent. Si les parole qui vont suivre peuvent paraitre sévères à l’encontre de certains, c’est parce que la gravité de l’époque dans laquelle nous vivons nous oblige à aller droit au but.

Le bref commentaire qui suit résulte du fait que l’on m’a demandé de donner un avis juridique sur un sujet donné. L’auteur de la question voulait également connaître  les « preuves » appuyant cet avis. Je me suis aperçu qu’il avait l’intention de comparer les « preuves » données par les différentes personnes auxquelles il avait posé la question afin de déterminer par lui-même quel serait l’avis le plus « fort ».

J’ai estimé que le fait d’exposer les « preuves » tirées de l’école Juridique Hanafite sur cette question à une personne aussi profane était inapproprié. Je vais tenter d’expliquer pourquoi.

J’ai cité l’avis de l’école Juridique Hanafite, et lui ai dit : Une telle fatwa, si elle vient de l’une des quatre écoles juridiques d’ahlou s-Sunna wal-Jama’a, est le résultat de l’étude, de la recherche et de l’ijtihad de centaines de savants parmi les plus grands que compte cette Umma, et qui ont contribué à élaborer, à réviser et à corriger les avis juridiques de chaque école. Ils étaient des maîtres dans les disciplines Islamiques, et beaucoup d’entre eux avaient mémorisé plus de cent mille hadiths de notre Prophète bien-aimé. Nombre de savants de l’école juridique Hanafite ont atteint ce rang respecté de « Gardien (Hafidh) du Hadith ».

En plus de cela, ils comptaient parmi ceux qui avaient atteint les plus hauts niveaux de piété et de crainte d’Allâh, ce qui est largement confirmé dans leurs biographies respectives. Par conséquent, nous acceptons volontiers les avis qu’ils ont donné sans avoir à les questionner à propos de leurs « preuves », et nous nous détournons de ceux qui ne se soumettent pas à l’autorité de ces grands savants de la Umma, et veulent examiner les « preuves » pour chaque avis, malgré le fait que la plupart d’entre eux n’aient même pas eu une formation de base dans les sciences Islamiques, ou même étudié l’un des livres authentiques de Hadith avec un professeur.

Qu’un tel profane, demande des « preuves » est ridicule. C’est comme si quelqu’un qui n’a même pas étudié les sciences physiques au collège se mettait à débattre à propos de la théorie de la relativité avec un grand professeur de physique. Ou comme si quelqu’un qui n’a même pas des connaissances de base en biologie ou en chimie débattait avec un éminent docteur sur quel médicament est préférable pour guérir telle ou telle maladie.

Une telle personne se ferait rire au nez ! Penses-tu qu’un professeur daignerait lui prêter attention ? Il ne voudrait même pas perdre son temps en engageant une discussion avec lui. Si une telle personne désire vraiment donner son avis sur la physique théorique, elle devra d’abord étudier les sciences physiques pendant deux ans au collège, puis encore deux ans au lycée dans le but d’obtenir son baccalauréat, puis ensuite acquérir une licence (3 ans), puis une maîtrise (1-2 ans), puis un Doctorat (3-5 ans) [ndt : système scolaire anglo-saxon]. Enfin, cette personne sera en mesure de commencer une discussion avec le professeur !

Similaire, ou pire encore, est le Musulman qui n’a même pas suivi un cursus de base dans le Droit Islamique, et qui se permet de se mesurer aux plus grands Juristes de la Umma parmi les Pieux Prédécesseurs (Salaf) et leurs Successeurs (Khalaf)! Il ne possède même pas des outils de base lui permettant de comprendre ou d’évaluer une « preuve ».

Penses-tu qu’émettre des avis concernant la Jurisprudence Islamique soit plus aisé que de donner des avis dans le domaine de la physique théorique?

Le simple fait que tu demandes une « preuve » est en soi un Dalil clair de ton ignorance de ce que le processus de l’ijtihad implique.

Penses-tu que donner une « preuve » consiste simplement à citer un verset du Qour’an ou un simple Hadith ?

Ton rôle en tant que profane ou débutant dans la connaissance Sacrée n’est pas de demander les avis Juridiques ainsi que leurs « preuves ». En revanche, ton rôle se limite à demander les avis juridiques seuls, ceux de l’une des quatre écoles Juridiques reconnues, tout en sachant que ces avis se basent sur une connaissance et une étude approfondies des sources.

Si tu es vraiment intéressé par les « preuves » alors entreprend la démarche nécessaire pour aller étudier les sciences religieuses. Tu y es vivement convié! Atteindre un niveau de base te prendra entre 5 et 8 années d’études sérieuses. Ca c’est juste pour le diplômé de base, tu n’as pas encore entamé la spécialisation!

Fais-moi confiance, les écoles juridiques ne donnent pas d’avis sans « preuves ». Les ouvrages encyclopédiques de référence qui traitent avec détails des arguments pour les avis de l’école Juridique Hanafite sont nombreux et bien connus, et leurs auteurs sont des grands maîtres du Hadith et de la Jurisprudence. S’il te plaît n’hésite pas à les consulter aussi souvent que tu souhaites voir les « preuves » d’un avis juridique donné. Mais une personne novice comme toi lorsqu’elle lira ce type d’ouvrages ne sera pas en mesure de les comprendre, de la même manière qu’un collégien essayant de lire des travaux pointus en physique quantique, ou en recherche médicale en sortira plus embrouillé qu’autre chose.

Il est temps d’être humble. Si tu es un collégien, tu dois étudier les bases, et accepter ce que tes enseignants te disent pour l’instant. Dans plusieurs années, si tu es un élève intelligent, et que tu travailles dur, tu seras alors peut-être en mesure de discuter de théories complexes et de te forger tes propres opinions.

Malheureusement, parmi les innovations condamnables de notre époque, figure un mouvement qui s’est développé au sein de notre Umma, rejetant le suivi des quatre écoles Juridiques reconnues, et encourageant les musulmans lambdas à sonder chaque avis, afin qu’ils puissent se faire leurs propres opinions et se forger leur propre voie! (Ca doit être la Sunna du chanteur américain, Frank Sinatra  qui chantait « I did it my way » (je l’ai fait à ma manière), mais certainement pas la Sunna des savants du Salaf). Si tu penses qu’en tant que collégien, tu peux donner des avis sur la théorie quantique, alors Ahlan wa sahlan!

Tu dois toutefois être averti que ce que tu fais, c’est-à-dire donner une fatwa/un avis Juridique directement à partir des textes, sans pour autant être qualifié pour le faire est absolument interdit (haram). Si tout le monde avait d’office le droit de délivrer des décisions juridiques ou de choisir entre elles, cela conduirait au désordre et au chaos dans la Loi Sacrée. (En passant, le fait d’être Arabe ou de parler l’Arabe ne fait pas non plus automatiquement de toi un mufti qualifié!). Toutes les disciplines ont des cursus et des méthodologies permettant leur étude. La Jurisprudence Islamique et sa méthodologie Juridique est l’une des disciplines les plus difficiles et cela prend de nombreuses années pour devenir compétent dans ce domaine.

Pour devenir avocat, par exemple, tu dois obtenir d’excellents résultats scolaires, puis obtenir ensuite un diplôme de Droit. Même après cela tu dois réussir les examens d’entrée au barreau. Cependant ce n’est pas suffisant! Tu dois ensuite passer plusieurs années de formation sous la tutelle d’un avocat confirmé avant d’être autorisé à pratiquer toi-même. Et tout ceci, simplement pour devenir un avocat subalterne! Et ensuite, combien d’années de recherche continuelle et d’expérience seront nécessaires pour que tu deviennes un éminent avocat, ou un juge à la cour suprême?

Il est donc étrange que chaque Pierre, Paul, Jacques ou Hamza de notre Ummah se considère suffisamment qualifié pour délivrer des avis Juridiques Islamiques, après avoir lu quelques versets du Qour’an et une version résumée du Sahih d’al-Boukhari! Il s’agit là du reflet de notre ignorance profonde concernant le sujet traité. Tu n’es même pas entré à l’école de Droit et tu veux prononcer des jugements légaux!

Tu es un collégien et tu veux entrer dans un débat entre professeurs!

Sois humble! Si tu désires discuter de questions de Droit Islamique, va t’asseoir aux pieds des savants, les héritiers des prophètes (que la Paix soit sur eux), et étudie auprès d’eux. Apprend de leur bon caractère ainsi que de leur science, purifie-toi, de sorte que tu deviennes un récipient digne d’accueillir la lumière de la science sacrée.

Si tu as passé ta vie à étudier la mécanique ou la médecine, ou que t’es consacré au commerce au lieu de chercher la science sacrée, et que maintenant, à un âge plus avancé, tu as décidé de devenir un peu plus « religieux », commence par venir à la mosquée, etc. S’il te plait, ne crois pas que tu peux suivre une formation accélérée dans le Din simplement en lisant « Fiqh as-Sunna » ou le Tafsir d’Al-Mawdudi, et d’arriver ainsi à un niveau où tu puisses débattre avec les savants. Laisse donc les questions de Din à ceux qui ont consacré leur jeunesse et sacrifié de nombreuses années de leur vie à l’étude des disciplines sacrées.

Comme le dit souvent un de mes professeurs : « Il est question de Din et non de tin (la figue) !! ». C’est de l’enseignement de l’Islam qu’il s’agit ! Ce n’est pas le jouet de tout un chacun. C’est l’influence de l’occident qui à donné aux gens cette arrogance qui leur permet de croire qu’ils peuvent donner leur avis sur tous les sujets, de la théologie à la Loi Islamique. La vérité est que tu n’es pas en mesure d’évaluer les « preuves » d’un avis Juridique et de parvenir à une conclusion pour toi-même quant à quelle opinion est la « plus forte ».

Je me souviens une fois être entré dans une discussion avec un jeune homme de 18 ans, rasé de prêt, vêtu d’un jean et d’un blouson de cuir, à l’extérieur de la mosquée de mon quartier. Il avait commencé à pratiquer deux ans auparavant. Il m’expliquait tranquillement comment il examinait les « preuves » avancées par les différentes écoles juridiques sur chaque « question » et pouvait ensuite conclure lui-même quel était l’avis le plus fort ! Le fait qu’il ne connaissait pas un seul mot de la langue Arabe n’a pas suffit à le dissuader de poursuivre ses activités scolastiques – il ferait tout traduire en anglais bien évidemment!

Malheureusement, ce pauvre frère et ceux qui lui ressemble n’ont pas la moindre idée de la complexité des avis juridiques ni de l’étendue des discussions entre les écoles sur chaque question. Ne se rendent-ils pas compte qu’en réalité ils « suivent aveuglément »  le premier « savant » venu et les informations qu’il leur présente sur cette « question ». Ils n’ont en fait jamais vérifié les sources elles-mêmes, par exemple les ouvrages de référence des quatre écoles juridiques, pour voir ce qui s’y trouve à propos de ce sujet. Il est bien connu que l’on ne peut pas aller cherche les avis Hanafites dans les ouvrages Shafi’ites, ou vice versa, car les avis des autres écoles juridiques n’y sont pas forcement bien présentés. Il faut aller puiser directement dans les textes de l’école elle-même.

Je vais juste vous donner un simple exemple, communément constaté, dans lequel les pauvres frères et sœurs pensent qu’ils ont accompli un formidable « ijtihad », et sont parvenus à leur « propre » conclusion sur un sujet donné (après avoir « réalisé » que les quatre écoles sont en fait dans l’erreur ces 1424 dernières années). Cette question est celle du placement des mains durant la prière. Il est fréquent aujourd’hui de voir les Musulmans prier en plaçant leurs mains sur leur poitrine ou sur leur cou plutôt que d’adopter la position traditionnelle des mains au-dessus ou en-dessous du nombril, ce qui était pourtant la pratique des Musulmans depuis plus de mille ans. En effet, les quatre écoles sont unanimes sur le fait que les mains doivent être placées juste au-dessus ou en-dessous du nombril – certainement pas sur la poitrine (sauf pour les femmes dans l’école Hanafite), et encore moins au niveau du cou! (Certains Malikites considèrent que la Sunnah est de placer les bras le long du corps).

Cependant, les jeunes « mujtahid » du 21ème siècle sont bien plus savants. Evidemment, tous ces grands experts en Jurisprudence des quatre écoles n’avaient pas eu accès à « Fiqh as-Sunna », qui guide essentiel à tout mujtahid en herbe! Il est même disponible dans une version très pratique, traduite pour les « mujtahid » non arabophones! Il suffit simplement d’ouvrir le chapitre nommé : « Les actes Sunnah de la prière, La position des mains » (vol.1 p.132) pour découvrir qu’at-Tirmidhi rapporte un Hadith selon lequel le Prophète a prié avec ses mains sur sa poitrine, et qu’at-Tirmidhi classe ce hadith, comme « Hassan ». On pourra aussi y lire qu’un hadith semblable se trouve dans « Le Sahih » d’Ibn Khouzayma, et qu’Ibn Khouzayma « le considère comme Sahih ».

Ca y est! Le jeune mujtahid a fait son travail! Il est maintenant évident pour lui qu’il existe des Hadiths Sahih sur cette question ! (Il ne sait pas qui est Ibn Khouzayma … mais il se dit que ca doit être quelqu’un d’important!). Les quatre écoles Juridiques ont donc tout faux! Par la suite, on apercevra le frère dans la mosquée de son quartier plaçant ses mains bien haut sur sa poitrine, regardant d’un air un peu méprisant ceux qui suivent « aveuglément » les écoles Juridiques [ndt : Hanafite, Shafé’ite, Hanbalite, Malikite].

Maintenant, jetons un coup d’œil aux « preuves » données dans « Fiqh  as-Sunna ». Ce que nous y découvrons est consternant.

Tout d’abord, ceux qui ont vraiment étudié « Al-Jami’ » d’at-Tirmidhi s’apercevront qu’at-Tirmidhi ne mentionne même pas de Hadith selon lequel le Prophète aurait prié avec ses mains sur sa poitrine et qu’il l’a encore moins classé comme Hassan! Une erreur très grave de la part de l’auteur de « Fiqh as-Sunna ».

Deuxième erreur majeure : bien qu’Ibn Khouzayma mentionne effectivement un hadith du Prophète plaçant ses mains sur sa poitrine, il ne le considère cependant pas comme authentique (Sahih). En fait, Ibn Khouzayma ne fait aucun commentaire sur l’authenticité des Hadiths qu’il rapporte dans son livre. Mais ceux qui connaissent la méthodologie d’Ibn Khouzayma s’apercevront que tout porte à croire qu’il ne considère pas cette narration comme solide. Tout d’abord, il ne mentionne pas le fait de placer les mains sur la poitrine dans le titre dans l’en tête de ce chapitre (qui est sa méthode habituelle pour indiquer sa compréhension du statut juridique des narrations du chapitre). Deuxièmement, il place la narration à la fin du chapitre, ce qui indique aussi la faiblesse de ce dernier.

Quoi qu’il en soit, un coup d’œil sur la chaîne des narrateurs de ce Hadith permet de constater qu’elle contient Mu’ammal ibn Isma’il, qui est un narrateur faible selon les dires de la plupart des savants du Hadith, à cause de sa mémoire épouvantable! L’Imam al-Bukhari le considère d’ailleurs comme un « munkar al-Hadith », ce qui signifie que les Hadith qu’il rapporte sont automatiquement rejetés ! Il existe encore d’autres critiques de cette narration, mais nous ne les aborderons pas ici.

Maintenant, nous voyons où est le problème : Le jeune mujtahid n’était pas vraiment un mujtahid tout compte fait! En réalité il a été un « suiveur aveugle » de la pire espèce. Il a lu un chapitre de « Fiqh as-Sunna » et a accepté « aveuglément » ce qu’il y a lu, tout en pensant qu’il avait fait un formidable ijtihad! Et tu n’as pas idée du nombre élevé d’erreurs que ce livre contient encore. Et c’est l’un des livres les plus populaires de nos jours auprès des Musulmans! Les erreurs citées plus haut sont de graves erreurs. J’ai entendu un de mes professeurs déclarer que les erreurs contenues dans ce livre sont bien plus graves que celles (bénignes) que l’on peut parfois constater dans les écrits des savants. Elles indiquent plutôt l inexcusable et réelle ignorance de l’auteur.

En définitive, la réalité est que tu es un imitateur aveugle (muqallid), que tu le saches ou non. Il te reste simplement à choisir qui tu comptes suivre : s’agit-il de l’auteur de « Fiqh as-Sunna », ou al-Albani, ou bien l’une des quatre écoles Juridiques Sunnites reconnues? En fin de compte, l’étude des preuves des avis Juridiques n’est pas un mal en soi, mais cela nécessite un contexte et un cadre bien précis.

Bien d’autres commentaires pourraient être faits sur ce sujet, mais nous nous contenterons de ce qui a été dit. Nous implorons Allâh qu’Il nous couvre tous de Sa Miséricorde et nous guide vers la vérité en toutes choses, et qu’Il nous permette de toujours suivre cette vérité, et d’agir continuellement selon ce qui Le satisfait. Que la Paix et la Miséricorde d’Allâh soient sur Son Messager bien-aimé, sa famille et tous ses Compagnons. Toute louange revient à Allâh, Seigneur des Mondes.

Écrit par,
le serviteur de la science sacrée,
Ridhwan ibn Muhammad Salim.
Damas, mois de Ramadan 1424 H

 

En savoir plus :

1 – « Réfutation de ceux qui suivent autre chose que les quatre écoles juridiques » (« radd ‘ala man ittaba’a ghayr al madhahib al arba’ah »), par l’Imam Ibn Rajab Al-Hanbali (en arabe)

2 – « Le non-madhhabism : La plus dangereuse innovation menaçant la loi Islamique » («  La madhhabiyyah: akhtar al-bid’ah tohaddidu al-sharee’ah al-islamiyyah »), par Sheykh Dr. Muhammad Saïd Ramadan al-Bouti (Directeur du département de Shari’a de l’Université de Damas) (en arabe)

3 – « Le statut juridique du suivi d’un madhhab », par Justice Shaykh Taqi ‘Uthmani (Juge Suprême (Qadi) du Pakistan) (en anglais)

4 – « Les quatre madhhabs », par Sheykh Abdul-Hakim Murad (en anglais)

5 – « Les bénéfices des sciences de la Jurisprudence » (« fawaa’id ‘uloom al-fiqh »), introduction à « ‘ilaa ul-sunan », par Sheykh Kayranwi (en arabe)

6 –  « Signification de la parole de l’Imam Muttalibi : « Si un hadith est authentique, alors il s’agit de mon madhhab » (« ma’na qawl al-imam al-muttalib : itha sahha al-hadith fa huwa madhhabi »), par Sheykh al-Islam, l’Imam Taqi ud-Din al-Subki (en arabe)

7 – « Fatwa concernant l’obligation de suivre les Savants bien guidés » par Sheykh Murabit al-Haajj and Sheykh Hamza Yusuf (en arabe et en anglais)

Notes :

[1] La biographie du Sheykh est disponible ici : Biographie du Sheykh Ridhwan Ibn Muhammad Salim

 

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Quels avantages y a-t-il à suivre une école Juridique [Madhaab]? [1]

 


MaqamMecca[2]


Allâh dit : « Demandez aux gens de sience, si vous ne savez pas! »

Sheykh Nuh Ha Mim Keller mentionne dans une de ces conférences que, dans la Tariqa Shadhili le Sheykh n’a pas une importance énorme. Le Murshid Shadhili (guide spirituel) exige seulement une chose, le suivi strict de l’une des quatre écoles Juridiques.

Simple n’est-ce pas? Presque! Cela signifie plusieurs choses :

A) Il faut d’abord apprendre le madhab (l’école)- au moins ses règles de base.

B) Il faut ensuite suivre le célèbre principe du Tasawwuf : ‘amal bil-Ilm ou agir avec la connaissance.

C) Il faut avoir at-Taqwa fid-din [3]. Cela signifie que l’on ne peut pas piocher les avis qui nous plaisent juste dans le but de satisfaire nos moindres passions. Plutôt, on doit craindre Allâh et suivre les Mujtahideen du madhaab. Certains croient à tort qu’un Madhaab dans le Fiqh ne représente que les opinions d’un seul imam. Conclure à une telle chose est de la bêtise. Lisez n’importe quel travail, disons, de Fiqh Hanbali, on y trouvera au moins 10 grands Mujtahideen mentionnés. Une école de droit est composée de nombreux Mujtahideen qui cherchent à soutenir ou à réfuter les opinions de leurs « collègues » antérieurs.

Quels sont les avantages majeurs à suivre un Madhaab ?

 

1) La sécurité dans la pratique de ma religion (Deen).

Dans cette ère de « l’information », chacun s’efforce – surtout s’il est influencé par nos frères Wahhabites – de parvenir jusqu’à l’avis correct. Mais comment atteindre cet avis correct lorsque l’on est un novice, juridiquement ignorant des normes du Fiqh, sans connaissance des bases des Usoul et Furu de la Législation, asbaab-an-Nuzul, Ilm-al-hadith (en particulier Jarh et Ta’deel), du Tafsir et donc du Qour’an et que l’on ne maîtrise pas la langue arabe, etc…

Comment le choix d’un madhaab peut-il être bénéfique à une personne? Savoir que l’on suit constamment un avis fondé sur des preuves solides, sans même devoir les mémoriser, est un avantage énorme! Savoir que l’avis suivi provient de personnes qualifiées dans la Jurisprudence, qui après avoir maîtrisé les 20 sciences et plus de l’Islam, sont arrivé à cet avis par le biais nécessaire de l’Ijtihad. Savoir que plus de 1200 années de profonde érudition soutiennent une telle position. Sans oublier que cet avis- que vous avez pris de votre madhaab – a résisté à l’épreuve du temps. Lorsque les ennemis des madhaab écrivaient des réfutations sur ces avis, votre madhaab répliquait à leurs exposés avec argumentations et preuves à l’appui.

2) L’acquisition de l’entraînement spirituel.

Quand on doit passer au crible les avis, on est constamment fatigué par cette recherche et le risque que l’on a de suivre un avis non valide. Cette énergie dépensée est inutilement gaspillée. L’énergie dépensée en effectuant ces recherches pourrait être redirigée vers des actes d’adoration ou vers l’exécution de ce qui est connu comme étant une opinion valable dans la Shari’ah. La sécurité provoque ainsi une chance pour le demandeur d’agir au lieu de simplement « d’étudier ». En effet, l’apprentissage n’a aucune signification si ce qui est appris n’est pas appliqué.

3) Le suivi des Salafs.

En suivant un madhab, on suit vraiment les Salafs. J’ai entendu les pseudos-salafis prétendre qu’ils suivaient les Salafs. Je me demande ce que l’imam Ash-Shafi’i dirait à propos de ces gens qui n’ont pas mémorisé le Qour’an, maîtrisé la langue, appris les 20 sciences et plus de l’Islam, mais pensent qu’ils peuvent déchiffrer ce qui dans la Jurisprudence relève du haqq ou du batil. Voudriez-vous qu’un avocat diagnostique si oui ou non vous avez un cancer? Existe-il une question plus importante que celle qui concerne votre au-delà?

Regardez les hommes qui sont venus avant nous. Par exemple les Hafidhs (ce terme signifie qu’ils ont mémorisé minimum 100.000 hadiths avec formulation et chaîne) : Ibn Khouzayma, Taqiy-ud-Dîn As-Subki, Ibn Hajar Al-‘Asqalani et Haytami, l’imam An-Nawawi, Al-Boukhari, Al-Muzani, As-Suyuti, Al-Bayhaqi, An-Nasaa’i, et des centaines d’autres, faisaient tous partie d’un madhaab (ici l’école Shafé’ite)! J’utilise seulement cet exemple pour montrer que ces incroyables savants, maîtres du hadith, docteurs en droit, plaçaient leur confiance et leur âme dans l’Ijtihad de ces Imams [4]. Pourtant, à notre époque, des Musulmans rejettent avec arrogance et même condamnent leurs avis juridiques, comme s’ils étaient eux juridiquement autorisés à le faire.

Posez-vous simplement cette question : Combien de hadiths (à la fois le texte et les chaînes) avez-vous mémorisé? Maintenant, comparez cela aux plus de 100.000 hadiths mémorisés par chacun de ces hommes mentionnés ci-dessus, tous membres de l’école Shafé’ite.

Êtes-vous meilleur qu’eux dans la compréhension Juridique? Dans le Hadith? Dans la Langue?

Ces sommités dans le Hadith et diverses sciences Islamiques, ont pourtant tous choisi de suivre l’une des quatre écoles Juridique et ce malgré leur immense bagage scientifique.

Je pense que ceux qui ont abandonné les quatre Madhaab ont en fait abandonné la science des Compagnons. C’était leur érudition qui a conduit à l’incarnation de ce qui est connu aujourd’hui comme étant le « Fiqh ». C’était leur sang qui a été versé pour l’édification de la Jurisprudence. Pourtant, les pseudos-salafis se moquent de leurs sacrifices en accablant la position des Salafs, et en essayant de hisser leurs propres avis au-dessus des avis des Salaf-us-Salih (les Pieux Prédécesseurs).

Je demande à Allâh d’ouvrir nos cœurs à Sa Loi et de nous raffermir sur Sa Religion! Qu’Allâh déverse Ses Bénédictions sur notre maître bien-aimé Muhammad , sa famille et ses Compagnons. Ameen!

Notes :

[1] Article élaboré à partir d’une réflexion du frère Abu Layth de SeekingIlm.

[2] Jusqu’au début du siècle, il y avait autour de la Kaaba les 4 maqams représentant les 4 écoles Sunnites de Fiqh, jusqu’à leur destruction par les wahhabites en 1917. Ces maqams servaient aux pèlerins qui pouvaient venir y questionner un Mufti de leur école. Le nombre de pèlerins augmentant chaque année on peut comprendre la nécessité qu’il y avait à faire de la place autour de la Kaaba. Cependant ces 4 maqams n’ont pas été déplacées mais tout simplement détruites, pour des raisons évidentes d’incompatibilité avec la vision unilatérale et sectaire qu’ont les Wahhabites de l’Islam.

[3] La crainte révérentielle (délaisser les interdits, chercher la satisfaction d’Allâh).

[4] Malik ibn Anas, Ahmad ibn Hanbal, Abou Hanifa, Ash-Shafi’I et leurs successeurs (Qu’Allâh leur fasse Miséricorde).