Les Perles du Ciel de Tarim - Découverte :

Maryam Szkudlarek est une de nos sœurs qui, après avoir accepté l’islam, a décidé de consacrer son temps à la quête de sagesse et des enseignements islamiques. Dans ce cadre, elle se rendit au Yémen à Tarim où elle passa deux ans et demi. Elle rédigea un livre fort touchant sur l’expérience qu’elle y a vécue dont la deuxième édition va être sous peu publiée.
Maryam Szkudlarek
Auteur

Pourquoi as-tu choisi le Yémen ?

J’étudiais l’arabe à Londres à mi-temps, car je travaillais l’autre moitié du temps et je n’étais pas satisfaite. Je désirais plus. Une de mes enseignantes me recommanda Tarim, après avoir demandé autour d’elle. Elle avait elle-même étudié en Syrie et en Égypte, mais la situation ne permettait pas que je m’y rende à ce moment-là. Le Yémen ne me faisait pas peur, cela fait bien longtemps que je n’ai plus confiance en les médias, mais c’est vrai que c’est étonnant de commencer par ce pays arabe si lointain et inconnu au lieu de tous les autres qui sont plus ouverts et proches de notre culture. Cependant, je ne dirai pas que j’ai « choisi » le Yémen entre d’autres. C’est, en fait, le seul choix qui m’avait été proposé et après avoir cherché un peu plus sur Tarim, j’ai été fascinée par l’endroit qui regorge de membres de la famille du Prophète Muhammad ﷺ, et je n’ai pas cherché plus loin. Puis, j’ai prié l’istikhara et tout s’est mis en place petit à petit.

Pourquoi « Les Perles du Ciel de Tarim » ?

Le ciel me fascinait au Yémen. Il est impressionnant, grand, étendu, dégagé il n’y a rien qui cache la vue ; seulement peuplé de milliers d’étoiles brillantes. Je me disais souvent que ces étoiles étaient hors du commun et qu’elles méritaient d’être connues tout comme les sagesses de Tarim et j’ai donc combiné les deux dans le titre.

Pourquoi as-tu choisi d’écrire un livre sur ta vie là-bas?

Au bout de quelques semaines d’émerveillement, je me suis dit que je ne devais pas perdre ces « Perles », que ma mission était de les partager. Il n’y a pas de coïncidence dans la vie, je n’étais pas là par hasard. Donc, j’ai commencé à écrire un journal intime quand j’en trouvais l’occasion. Une des enseignantes à Tarim m’avait offert un beau, volumineux cahier rose fleuri et c’est celui que je choisis pour écrire mon aventure.

À qui le livre est-il adressé ?

À tous ceux qui ont un intérêt pour la découverte d’autres cultures, de Tarim et aussi de l’islam. J’espère de tout cœur que mon récit pourra aider les étudiants des sciences islamiques qui vivent ou ont vécu la même situation que la mienne, à se retrouver et à s’identifier. Parfois certaines circonstances créent des doutes en nous en ce qui concerne notre foi, l’islam et notre véritable rôle à jouer dans ce monde, et en prenant connaissance des épreuves que d’autres ont traversées, on trouve la force de continuer et de se repositionner sur ce chemin unique et incroyable qui est la quête de Dieu. J’aimerais aussi que cette lecture accompagne les personnes désirant se convertir à l’islam et les motive à entrer dans notre grande famille.

Si tu pouvais prendre une chose que les habitants de Tarim possèdent, que serait-ce ?

L’adab ! Le beau comportement, sans hésitation. J’admire tant ces cultures qui ont du respect pour la religion, les parents, les enseignants, les personnes âgées et les endroits sacrés ! Je dis « ces cultures », car je n’ai pas seulement appris de la culture tarimienne, mais peut-être même plus des cultures malaisiennes et indonésiennes qui sont extrêmement polies et respectueuses. Cela m’a permis de constater ce qu’il nous manquait en Occident. Nous nous sommes beaucoup éloignés de la nature véritable de l’être humain qui est de s’émerveiller devant plus grand et plus érudit que soi. Nombreuses sont les activités des enfants et des adultes qui n’apportent aucune richesse spirituelle ; on devrait peut-être plutôt passer, tous ensembles, quelques semaines/mois à apprendre de ces peuples si souriants, innocents et généreux.

Qu’est-ce que tu as trouvé plus facile là-bas que dans d’autres cultures/pays et plus difficile ?

J’ai vécu dans quatre pays différents avant le Yémen, tous en Europe. Le Yémen est le premier pays du Moyen-Orient dans lequel j’ai vécu et bien-sûr le choc culturel a été dur. Néanmoins, Tarim n’est pas le Yémen non plus. C’est une ville particulière dans une région fortement attachée à la tradition locale. Le Nord du Yémen où Sana’a et ‘Aden se trouvent, ont certainement des cultures et des coutumes bien distinctes et peut-être plus souples. Pour en revenir donc à mon expérience plus technique, mon inscription à Dar az-Zahra n’a nécessité aucune formalité, ni conditions particulières, ni diplômes spécifiques. La motivation suffisait ce qui m’a énormément plu. Le contact avec les gens est très simple, même avec ceux qui ont une certaine position dans la société. On se sent à l’aise tout de suite. On peut retourner chez soi, pour des vacances, quand on veut, même en plein milieu du trimestre, l’administration ne va pas poser de questions. Pour certaines étudiantes, la difficulté était de ne pas pouvoir sortir de Dar az-Zahra excepté pour la sortie mensuelle chez la famille ou les amies. Ce règlement s’applique aux femmes non-mariées. À Dar al-Moustafa, les étudiants célibataires peuvent sortir. Les femmes et les hommes célibataires doivent vivre dans les instituts, seulement les familles peuvent vivre à l’extérieur et louer ou acheter leur maison. Les hommes sont extrêmement protecteurs envers les femmes, ce que j’ai beaucoup apprécié ; c’est une qualité essentielle que les hommes, pour beaucoup, ont gardé dans cette partie du monde.

Le peuple, d’une manière générale, n’a pas d’à priori sur les autres pays ou cultures. Personne n’a jamais relevé d’une manière négative que je sois du pays d’où je viens. Ils sont immensément ravis de rencontrer des frères et sœurs venus de loin. Il n’y a pas beaucoup de règles sociétales. Ce qui est bien et moins bien ! On peut attendre le taxi pendant des heures sans exagération. Il nous dit d’attendre, qu’il est sur la route… Des demi-journées sont gaspillées à attendre des gens, des papiers ; des rendez-vous sont annulés sans préavis… Il n’y a pas d’ordre et de système établi pour éviter ce genre de désagréments. Même s’ils sont parfois agacés, les locaux sont habitués, ils vivent comme cela.

La culture yéménite est éloignée de la culture française ou occidentale et c’est vrai que cela peut froisser. Notre culture influence invariablement la façon dont nous percevons la société, les rôles des hommes et des femmes, la famille… Il faut s’attendre à ne pas être toujours compris. Néanmoins, l’islam a plusieurs facettes et cela m’a pris du temps de comprendre ce point si essentiel.

Y a-t-il un aspect de ton séjour que tu aurais aimé améliorer ?

La nourriture. Je ne me suis jamais autant rendue compte de l’importance de bien manger que là-bas. Les repas sont – ou devrais-je dire « étaient » car il y a eu des améliorations de ce côté-là ainsi que sur d’autres éléments – très basiques à Dar az-Zahra, pas assez riches en nutriments. J’avais beaucoup de carences, qui provoquaient des trous de mémoire, je mémorisais et j’oubliais ; j’étais souvent malade et faible. Une bonne alimentation est essentielle à tout moment et surtout lorsque l’on étudie. Néanmoins, ce monde n’est jamais parfait. Lorsqu’Allah enlève un élément, Il enrichit une autre partie, et à Tarim, c’est la spiritualité et l’amour pour le Prophète ﷺ) – la nourriture pour le cœur – qui est présente en abondance.

Recommanderais-tu cet endroit aux musulmans de France pour de longues études comme tu l’as fait, ou pour une simple visite de quelques jours ou semaines ?

Tout dépend de ce que la personne recherche. Je ne recommanderais pas à un nouveau converti qui a très peu de connaissances de la religion (comme je l’étais quand je m’y suis rendue) d’y aller avec l’intention d’étudier à Dar az-Zahra ou à Dar al-Moustafa. La connaissance de l’arabe avant de s’y rendre est primordiale ainsi que celle de l’islam. La culture islamique de Tarim lui est propre et ce n’est pas celle que l’on retrouve ailleurs ; si l’on n’a pas de connaissances de fiqh et une certaine lucidité et souplesse quant à la pratique de la religion où que l’on se trouve, le séjour risque d’être difficile et déroutant. Tarim est un centre spirituel de haut niveau. La découverte de la religion doit se faire dans son environnement et sa culture ou dans une atmosphère proche de ceux-ci avec des enseignants qualifiés donneurs de bons conseils.

Quant à celui qui cherche à se perfectionner, il pourra trouver son bonheur dans une aventure comme celle-ci.

En revanche, la dowra en juillet est un stage extraordinaire pour tout le monde. Les cours sont dispensés par des érudits et traduits en plusieurs langues. L’emploi du temps est beaucoup plus agréable et relâché.

En ce qui concerne une simple visite, elle est bonne à faire tout au long de l’année, car Tarim a des secrets à dévoiler pour chacun à n’importe quel moment. Tous les mois pratiquement, il y a un événement à fêter. Mon conseil serait de la faire durant le mois de rabi’ al-awwal qui est un mois exceptionnel. Je n’ai pas revécu ce mois béni avec tant d’intensité, de lumière et d’amour depuis. Le mois du ramadan est aussi un mois magnifique à Tarim, surtout quand il coïncide avec la dowra.

Qu’est-ce qui t’as poussée à rester là-bas si longtemps malgré les difficultés ?

Je ne me voyais pas retourner en Europe avec si peu de bagages. Mon intention était de rester au moins cinq ans ! Je ne savais pas où aller pour continuer mes études et Tarim était toujours mieux que ce que j’avais auparavant. Je voulais également me dépasser. Si l’on baisse les bras à chaque difficulté, on risque de ne pas aller bien loin dans la vie. Lorsque la Jordanie m’a été proposée, j’ai pris les devants et une nouvelle porte s’est ouverte. Cette attente a été une bénédiction, car de nombreuses prières que j’avais faites à Tarim durant ces deux ans et demi se sont réalisées dans ce magnifique pays qu’est la Jordanie.

Que veux-tu transmettre par ce livre ? Qu’aimerais-tu que l’on retienne le plus ?

J’aimerais faire connaître un univers bien différent de ce que l’on peut s’imaginer, et aller à l’encontre du courant négatif et malveillant qui prône la haine et la peur. Le monde est en réalité bien plus beau que ce que l’on entend. Nous ne devons pas laisser les médias, la société, le système éducatif ou autre décider de la façon dont nous percevons les autres cultures, religions… L’islam est magnifique et engendre des êtres bons et désintéressés. Le Yémen n’est pas qu’un pays en guerre ! C’est une terre incroyable, dotée d’une histoire et d’un peuple hors du commun. Il y a tant à découvrir ! Les choses ne sont jamais comme elles paraissent et c’est une des leçons les plus importantes que l’islam nous apprend au quotidien. J’aimerais que les lecteurs soient transportés par ce monde inconnu et qu’ils réfléchissent. J’aimerais tant que notre vision « de l’autre », que l’on a où que l’on se trouve, change de manière positive !

Et en ce qui concerne les musulmans particulièrement, et encore plus spécifiquement ceux d’Occident, j’aimerais faire passer un message : la bonne compréhension et pratique de l’islam n’est pas réservée qu’à un seul groupe. D’après mon expérience, il est incroyable de constater que les musulmans les moins tolérants entre eux et avec les autres sont ceux d’Occident, alors que leur environnement est on ne peut plus libéral ! C’est un paradoxe qui me pousse à penser qu’étant dénués de culture islamique, les musulmans occidentaux se créent une identité islamique rigide – qui n’existe pas dans le monde musulman – et tous ceux qui ne s’y conforment pas sont rejetés en tant qu’amis ou connaissances et parfois même carrément en tant que musulmans ! Allah ne nous a pas tous créés de la même manière ; les personnalités et les besoins sont différents. Tant que l’on ne va pas à l’encontre des points qui ne peuvent être altérés dans la religion, chacun a le droit de vivre son islam de la manière qui lui correspond le mieux. Il n’y a aucune nouveauté de ce côté-là.

Pourquoi une deuxième édition ? Quelle est la différence avec la première ?

Le premier livre a été auto-édité, même si mes amies et moi avons passé beaucoup de temps à le peaufiner, il restait des coquilles et la mise en page n’était pas excellente. De plus, le prix du livre était cher, peut-être à cause des photos en couleur. Pour ces raisons, peu de temps après sa publication, je pensais déjà à une deuxième édition. Alhamdoulillah, quelques semaines plus tard, je m’entretenais avec la maison d’édition Halfa qui acceptait de le republier. Il n’y a pas de grands changements, mais seulement des petits ajouts et retraits. Le deuxième tirage n’a pas de photos – elles seront dorénavant disponibles sur le site de Halfa –, le prix est plus abordable ; il y a deux dates supplémentaires et la couverture est légèrement différente. La première édition a la particularité d’avoir été un travail de collaboration unique de frères et de sœurs non-professionnels dont la sincérité et les prières pour le succès du projet ont porté leurs fruits à travers la deuxième édition améliorée. Qu’Allah récompense les lecteurs pour leur enthousiasme et leur contribution quelle qu’elle soit, amen.

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