Islam – Interdiction du commérage

Interdiction rigoureuse du commérage (namîma)

Par l’Imam An-Nawawi

 Medisance

 

 

Les Hadiths :

168. (105) On rapporte qu’ayant été informé qu’un certain homme colportait les propos malveillants pour semer la discorde, Hudayfa dit :  « J’ai entendu le Messager d’Allâh (salallahou ‘alayhi wassalam) dire : « Il ne sera point admis au Paradis de commère. » »

169. (…) Hammâm ibn al-Hârit dit : « Un homme rapportait les propos des gens à l’émir. Nous étions assis une fois dans la mosquée quand les gens dirent : « Celui-là fait partie de ceux qui rapportent les propos des gens à l’émir. Ensuite, cet homme s’approcha et prit place parmi nous. Alors Hudayfa dit : J’ai entendu le Messager d’Allâh  dire : « Le rapporteur n’entrera pas au Paradis. » »

170. (…) Hammâm ibn al-Hârit rapporte : « Nous étions assis avec Hudayfa dans la mosquée, quand un homme vint s’asseoir avec nous. On dit alors à Hudayfa : Celui-là est un rapporteur du gouvernant. Hudayfa dit alors spécialement à son intention : J’ai entendu le Messager d’Allâh dire : « Le rapporteur n’entrera pas au Paradis. » »

Commentaire de l’Imam An-Nawawi :

Il est dit dans une version [n°168] du hadith : « Il ne sera point admis au Paradis de commère (nammâm) ». Et dans l’autre [n°169-170] : « Le rapporteur (qattât) n’entrera pas au Paradis ». Les deux termes ayant la même signification.

Les ulémas définissent « namîma » comme étant le colportage des propos des gens, des uns aux autres, dans le but de semer la discorde entre eux. Dans son célèbre ouvrage Ihyâ’ ulûm ud-dîn, l’imam Abu Hâmid al-Ghazâlî dit ceci: Sache que (namîma) est un terme qui désigne généralement le colportage des propos d’autrui à celui qui en le sujet. Tel que dire: Untel dit de toi ceci et cela. Il ajoute que : Ce colportage ne se limite pas à cela, bien plus et plus précisément, ce genre de commérage consiste justement à révéler ce qui détestable à dévoiler et à tirer au grand jour, ou pour le destinataire, ou pour le destinateur ou pour le colporteur et indépendamment du fait que cette révélation se fasse par l’allusion, le signe ou le geste. Car, le commérage (namîma) est en réalité le dévoilement du secret et la violation de l’intimité qu’on déteste révéler. Ainsi, même si on voit quelqu’un cacher son propre argent et qu’on le révèle à autrui, ce sera certes du commérage (namîma). Aussi, celui à qui on rapporte des commérages en lui disant : Untel dit de toi telle chose ou veut te faire ceci et cela, doit observer six règles :

1. D’abord, il ne doit pas le croire car le colporteur des propos malveillants est foncièrement une personne perverse.

2. Il doit lui défendre le colportage, l’exhorter et lui montrer l’infamie de son acte.

3. Il doit le haïr partant de l’amour de Dieu (Exalté soit-Il), car le colporteur ou la commère est haïssable pour Dieu (Exalté soit-Il). Or, il est obligatoire de haïr ceux que Dieu (Exalté soit-Il) hait.

4. Il doit se garder de penser du mal de son frère absent.

5. Il doit également éviter que ces commérages le poussent ou l’incitent à espionner autrui ou a faire des recherches pour s’assurer de leur véracité.

6. Il doit refuser de commettre lui-même l’acte qu’il interdit au colporteur, par respect de sa propre personne. Autrement dit, il doit s’élever au-delà de la réplique qui l’entraîne à devenir lui-même commère quand il dit par exemple : untel a dit de moi ceci et cela. Il faut donc éviter de commettre soi-même l’acte qu’on interdit à autrui. [Fin de citation d’al-Ghazâlî ].

Tout ceci s’applique au colportage des propos en dehors du cas où cela sert une cause légale. Car lorsque la nécessité l’exige, il n’est certes pas interdit d’y recourir. C’est le cas, par exemple, d’informer quelqu’un que tel individu compte porter atteinte à sa personne, à sa famille ou à ses biens. C’est le cas aussi d’informer le gouvernant, ou les représentants de l’autorité que tel individu commet tel acte de nuisance à l’intérêt public ou pratique et diffuse telle chose qui provoque le désordre, tel que dénoncer un abus. Et alors, les autorités compétentes se doivent de dévoiler ces abus et les faire cesser. Ainsi, dans les cas similaires, rapporter les faits n’est pas interdit, voire même, cela peut s’avérer obligatoire ou recommandé selon le cas.

Dans le hadith: « Il ne sera point admis au Paradis de commère ou de rapporteur (nammâm) ». L’interdiction d’accès au Paradis s’interprète de deux façons différentes comme on l’a déjà vu dans des exemples des chapitres précédents :

Première interprétation : Cette privation d’accès au Paradis s’applique uniquement au rapporteur (croyant, cela va de soi) qui renie l’illégalité de son acte, sans se fonder sur une justification légale, notamment l’interprétation d’un texte, tout en sachant sa prohibition par la Loi.

Deuxième interprétation : Le rapporteur (croyant) n’entrera pas au Paradis, en premier lieu, avec les Bienheureux élus.

Wa Allâhou a’alam.