Le statut de la tolérance en Islam

° Le statut de la tolérance
en Islam

Par le Mufti d’Egypte Sheykh Ali Goma’a [1]

 Tolerance

Le Qour’an établit des principes de vie clairs pour l’Humanité. Il déclare sans équivoque que tous les êtres humains ont été créés à partir d’un seul être et qu’ils sont tous unis de par leur origine commune.

Allâh -Ta’ala- dit :

« Ô hommes ! Craignez votre Seigneur qui vous a créés d’un seul être et qui, ayant tiré de celui-ci son épouse, fit naître de ce couple tant d’êtres humains, hommes et femmes ! Craignez Allâh au nom duquel vous vous demandez mutuellement assistance ! Respectez les liens du sang. En vérité, Dieu vous observe en permanence. » [2]

Le Prophète (salallâhou ‘alayhi wassalaam) a aussi dit :

« Tous les hommes sont les enfants d’Adam, et Adam fut créé de poussière. » [3]

Ainsi, d’un point de vue Islamique, tout le monde a le droit de vivre honorablement, sans distinction ni discrimination. L’être humain est honoré dans le Qour’an, sans distinction de religion, de couleur ou de race.

Allâh –Ta’ala- dit : 

« Certes, Nous avons honoré les fils d’Adam. Nous les avons portés sur terre et sur mer. Nous leur avons procuré d’agréables nourritures. Nous leur avons donné la préférence sur beaucoup d’autres de Nos créatures. » [4]

Il n’est pas juste que des gens s’engagent dans des discordes et dans des hostilités basées sur des critères tels que la race, la couleur de peau, la langue ou la religion. Au contraire, cette diversité devrait être une occasion pour apprendre à connaître l’autre et pour collaborer sur des intérêts communs. Ainsi, Allâh -Ta’ala- dit :

« Ô hommes ! Nous vous avons créés d’un mâle et d’une femelle, et Nous vous avons répartis en peuples et en tribus, pour que vous fassiez connaissance entre vous. En vérité, le plus méritant d’entre vous auprès de Allâh est le plus pieux. Allâh est Omniscient et bien Informé. » [5]

Le seul élément de distinction (entre les humains) avancé par le Qour’an est la contribution qu’une personne peut apporter au bien-être de toute l’humanité : « En vérité, le plus méritant d’entre vous auprès de Allâh est le plus pieux. »

En tant que tel, l’approche Islamique concernant les non-Musulmans et en particulier les gens du Livre (Juifs et Chrétiens), est basée sur une coexistence et sur une coopération, en particulier sur des questions d’intérêts communs fondés sur des valeurs et de l’éthique, qui sont promues non seulement par toutes les religions, mais qui sont aussi acceptées par toute l’humanité.

Le commandement de l’Islam concernant la manière dont il faut se comporter avec les non-Musulmans est résumé dans le verset suivant :

« Allâh ne vous défend pas d’être bons et équitables envers ceux qui ne vous attaquent pas à cause de votre religion et qui ne vous expulsent pas de vos foyers. Allâh aime ceux qui sont équitables. » [6]

Dans ce verset et dans d’autres, l’Islam définit les fondements de l’interaction du Musulman avec les autres : ces interactions trouvent leur origine dans la tolérance, qui est profondément liée au fait de pardonner aux autres leurs erreurs, d’aspirer à l’excellence dans la conduite et d’accroître les œuvres vertueuses.

Le fondement de ce point de vue tolérant vis-à-vis des autres religions provient d’un ensemble de croyances et de vérités que l’Islam inculque dans les cœurs et dans les esprits des Musulmans. Les principaux points étant : l’origine commune de toute l’humanité, la dignité des êtres humains, le fait que les différences religieuses existent par la volonté d’Allâh et le fait que les Musulmans ne sont pas mandatés pour juger les personnes d’autres confessions. En outre, en plus d’interdire les conversions forcées,  l’Islam encourage l’établissement de la justice entre les peuples, ce qui est nécessaire pour une coexistence stable et pacifique.

L’Islam distingue deux niveaux de non-Musulmans :

1/ Un individu non-Musulman ou un groupe de non-Musulmans vivant au sein d’une communauté Musulmane.

2/ Un groupe de non-Musulmans qui depuis l’extérieur traite avec un État Musulman.

L’Islam fournit les plus grands exemples de coexistence avec les non-Musulmans à ces deux niveaux. Il explique la façon de traiter les autres, à la fois en  théorie et en  pratique – et l’histoire humaine témoigne de cela tout au fil des siècles.

Le Prophète a déployé des efforts considérables pour enseigner la miséricorde, la tolérance et le pardon envers les non-Musulmans. Il nous a également mis en garde contre le fait d’être injuste avec eux : « Quiconque est injuste avec un mu’ahid [7], porte atteinte à ses droits, lui demande quelque chose au-delà de ses capacités, ou qui lui prend quelque sans son consentement, j’argumenterai contre lui au Jour du Jugement. » [8]

Lorsque l’Etat islamique fut élargi à l’époque du Prophète, il y avait beaucoup de tribus Arabes Chrétiennes, en particulier à Najran [9], avec lesquelles il avait signé des pactes. Ces pactes leur garantissait la liberté de conscience et de pratique, la protection de leurs lieux de culte, ainsi que leur liberté de pensée, d’éducation et de travail. Le pacte entre le Prophète et les habitants de Najran stipulait : « Le peuple de Najran et de ses environs jouissent de la protection d’Allâh et de Son Prophète. Cela inclut leur vie, leur religion, leurs terres, leurs propriétés – qu’ils y soient présents ou absents -, leurs marchés, et leurs lieux de culte. Aucun évêque ne devra être expulsé de son évêché, ni un ermite de son ermitage, ni un fond de dotation de son état de dotation. Les accords de ce pacte sont pour toujours garantis par la protection d’Allâh et de Son Prophète et ce jusqu’à qu’à ce que l’ordre d’Allâh arrive et aussi longtemps que le peuple de Najran restera fidèle à ce pacte et respectera les conditions formulées pour eux. » [10]

Pendant le califat de ‘Umar Ibn al-Khattâb, les Musulmans ont suivi l’exemple de leur Prophète lorsqu’ils ont signé un pacte avec le peuple d’Aelia (Jérusalem). ‘Umar leur a garanti la liberté de culte, ainsi que l’inviolabilité de leurs temples et de leurs rituels. Il déclara : « Ne prenez rien de leurs églises, ne les détruisez pas et ne portez pas atteinte à l’un d’eux. Ne prenez pas leurs biens, leurs croix ou leurs richesses. Ne les contraignez pas à quitter leur religion, et qu’aucun d’entre eux ne soit lésé, et que nul d’entre les Juifs ne vive à Aelia avec eux. » [11] et [12]

C’est ainsi que les Musulmans ont traité les gens d’autres religions à travers l’histoire.

Il est important de noter que les Coptes Egyptiens jouissent d’un statut spécial parmi les Musulmans, en particulier parmi les Musulmans Egyptiens. Umm Salama (qu’Allâh soit satisfait d’elle) rapporte que le Prophète a conseillé avant sa mort : « Je vous recommande par Allâh les Coptes d’Egypte. Vous les vaincrez et ils seront pour vous un appui matériel et un renfort dans le chemin d’Allâh. » [13]

Dans une autre narration, le Prophète dit : « Vous conquerrez une terre où l’on traite du qirât. Soyez pleins d’égard envers sa population car elle dispose d’une dhimmah et d’un lien de parenté [14]. » [15]

Tous ces exemples documentés, et bien d’autres encore qui sont trop volumineux pour être ici mentionnés, illustrent la tolérance de l’Islam et des Musulmans dans leur patrimoine, dans leur pensée et dans leur perspective vis-à-vis des  non-Musulmans.

Notes  :

[1] La Biographie de Sheykh ‘Ali Gomaa est disponible ICI
[2] Qour’an – Sourate An-Nisa, n°4, verset 1
[3] Sunan Abu Dawud 331/4, at-Tirmidhi 735/5
[4] Qour’an – Sourate Al-Isrâ ‘, n°17, verset 70
[5] Qour’an – Sourate Al-Hujurât, n°49, verset 13
[6] Qour’an – Sourate Al-Mumtahana, n°69, verset 8
[7] Le terme « mu’âhid » désigne aussi bien le non-Musulman résidant en terre musulmane que le non-Musulman résidant dans la terre non-Musulmane qui est liée par un traité de paix avec la terre Musulmane
[8] Sunan Abu-Dawud 170/3, al-Tirmidhi 336/3
[9] Une ville au sud-ouest de l’Arabie-Saoudite actuelle
[10] Dala‘il al-Nubuwwah by Imam al-Bayhaqi
[11] “History of al-Tabari“ 449/2
[12] Aelia est l’ancien nom de Jérusalem. Pour plus d’infos, lire cet article.
[13] At-Tabari 265/23
[14] Les liens de parenté mentionnés ici sont ceux de Hajar, qui fut Egyptienne
[15] Sahih Muslim 1970/4

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