REJET d’une Narration Sur la Violence Conjugale

 

Sheykh Gibril Fouad Haddad

 

 

REJET

 

 

Question :

En surfant sur le net, je suis tombé sur le récit suivant, mais hélas, je n’ai pu trouver aucun commentaire. Pouvez-vous me donner une explication ?

Le récit :

Il a été rapporté que Ash’ath bin Qais a dit : « Une nuit, j’étais invité (dans la maison) de ‘Umar, et au milieu de la nuit il s’en alla frapper sa femme, et je les ai séparés. Quand il revint se coucher, il me dit : « O Ash’ath, apprend de moi quelque chose que j’ai entendu du Messager d’Allâh : « Un homme ne doit pas être interrogé sur la raison qui l’a poussée à battre sa femme, et ne va pas dormir jusqu’à ce que tu ais prié le Witr ». Et j’ai oublié la troisième chose. » [1] et [2]

Le Hadith est classé Hasan (bon) par la maison d’édition Darussalam.

 

Réponse :

Méfiez-vous des éditeurs irréligieux qui (1) traduisent mal et (2) mentent sur le statut des hadiths sans scrupules. Premièrement, le libellé Arabe stipule clairement « Diftu` Umara », ce qui signifie : « J’ai accueilli `Umar (chez moi). » Deuxièmement, le hadith n’est pas hasan, mais très faible comme indiqué par le maître du hadiths Hanbali al-Maqrizi dans son Mukhtasar Kitab al-Witr (p. 50) ainsi que par d’autres, car il ne vient que par ‘Abd ar-Rahmân Musli qui non seulement est « inconnu » comme indiqué par ad-Dhahabī dans al-Moughni fil-Du’afā’, mais qui n’est pas non plus connu comme ayant rapporté autre chose si on regarde l’ensemble de la littérature du hadith! Cela fait de lui un homme à « la fiabilité complètement inconnue » (majhul) selon le critère de Ibn Hajar dans son Taqrib al-Tahdhib.

En outre, le fait qu’Ibn Hajar ai effectivement classé ‘Abd ar-Rahmân Musli comme « acceptable » (Maqbul) est une erreur comme l’ont souligné al-Arna’ût et Ma’ruf dans leur Tahrīr Taqrīb al-Tahdhīb puisque la définition de Maqbul est : « Celui qui a rapporté très peu de hadiths qui ne contiennent rien sur la base de quoi ils puissent être rejetés : s’il est corroboré [par d’autres narrations] alors il est appelé Maqbul ». Même si nous retenions ce rang-là pour Musli, ce n’est pas assez pour élever sa narration au rang de « juste » parce « Maqbul » signifie que son récit peut servir à en renforcer un autre, d’une chaîne différente, mais tout autant faible et dont le contenu est identique ou similaire et qui peut alors être classé comme étant hasan – mais une telle narration n’existe pas.

Cette narration particulière est rapportée par Abû Dâwûd, Ibn Majah et Ahmad (Arna’ūt ed. 1:275 §122 « isnād da‘īf » = Shākir ed. 1:219 §122 « isnād da‘īf »), toutes via ‘Abd ar-Rahmân Musli. [3]

Pour terminer, le sens des mots : « Un homme ne doit pas être interrogé sur la raison qui l’a poussée à battre sa femme » ne signifie qu’il est libre de le faire et bien au contraire il ne lui est pas permis de le faire, car le Prophète ﷺ a explicitement interdit de battre sa femme – mais cela veut plutôt dire qu’une personne ne doit pas être pressée de divulguer quelque chose de blâmable à propos de sa femme.

Wa Allâhu a’alam

 

Notes :

[1] Sunan Ibn Majah – Les chapitres sur le mariage – كتاب النكاح  Réf. anglaise : Vol.3, Livre 9, Hadith 1986 / Réf. Arabe : Livre 9, Hadith 2062

[2] Source : http://www.sunnah.com/urn/1320630

[3] « isnād da‘īf » signifie que la chaîne de transmission est classée comme étant faible.